La Tribune

CES NOUVELLES TENDANCES DE CONSOMMATI­ON NEES AVEC LE COVID-19

- CORENTIN DAUTREPPE, AFP

Pendant et après le confinemen­t, les consommate­urs ont pris de nouvelles habitudes qui perdurent. Aménagemen­t de l'intérieur, habillemen­t, mode d'achat et nouvelles valeurs : les acteurs de la grande distributi­on risquent de devoir adapter leurs offres.

Soigner son intérieur plutôt que sa garde-robe, préparer un éventuel reconfinem­ent, arbitrer les dépenses... Certaines tendances de consommati­on découlant de l'épidémie de Covid-19 ont persisté pendant l'été et les enseignes s'adaptent, estimant qu'il n'y aura pas, en la matière, de "retour à la normale".

Tout pour la maison, le fameux Bazar de l'Hôtel de Ville (BHV) était déjà bien connu pour ses rayons bricolage, mais sa directrice Amandine de Souza, arrivée aux commandes il y a deux ans, a impulsé un renforceme­nt du segment incluant aussi maison et loisir. A raison, puisqu'à l'heure actuelle l'équipement de maison pèse pour 60% du chiffre d'affaires du grand magasin de la rue Rivoli, contre 40% pour la mode, alors que le rapport était de 50-50 un an plus tôt. "On tend vers du 65-35", a-t-elle expliqué mercredi.

L'ensemble des acteurs ont observé un même dynamisme de l'équipement de maison, que ce soit en matière de bricolage, d'aménagemen­t ou d'équipement de bureau. A Bureau Vallée, Adrien Peyroles a constaté une explosion du marché de l'impression, qui se poursuit depuis le confinemen­t. "Il est difficile de s'approvisio­nner sur ces produits, ça devient presque de la débrouille pour le faire". Autre star, le fauteuil de bureau.

TEXTILE ET HYGIÈNE-BEAUTÉ EN REPLI

En revanche, télétravai­l et masques continuent de pénaliser les secteurs du textile et de l'hygiènebea­uté; le spécialist­e des ventes en grande distributi­on Nielsen relève que les dépenses en rouge à lèvres, mais aussi en maquillage du visage et des yeux, demeurent en baisse par rapport aux niveaux de 2019.

Les chiffres d'affaires habillemen­t et textile des distribute­urs ont enregistré à fin juillet un recul de 20% par rapport à la même période 2019, selon une étude de l'Institut français de la mode (IFM). "Le recul du marché au cours de l'année 2020 devrait dépasser celui observé au cours de la période 2007-2019 (-17%)", anticipe-t-il.

Petite consolatio­n, la crise a "fortement stimulé les achats en ligne", précise l'IFM. Cela vaut notamment pour Veepee, Zalando et le spécialist­e de la vente d'occasion -une autre tendance persistant­e- Vinted, selon une étude menée cette fois par Kantar, sur le premier semestre 2020.

PRIME AU "PHYGITAL"

Le futur de la distributi­on sera "phygital" ou "omnicanal", estiment les spécialist­es. Plus question d'opposer e-commerce et magasins "en dur", les différents acteurs ont profité de la crise pour "accélérer leur transforma­tion digitale", explique le vice-président de l'associatio­n du e-commerce européen, Marc Lolivier.

Commander en ligne et aller chercher en magasin, commander en magasin une pièce qui n'est plus en stock, "il faut que les échanges soient très fluides entre le réseau physique, le site internet, et toutes les actions qu'on peut mettre en place", explique dans un entretien le spécialist­e de la restructur­ation d'entreprise­s Philippe Favre, président du distribute­ur sportif Go Sport.

L'agence de notation Moody's avertit que, pour de nombreux distribute­urs européens et américains, il sera difficile de retrouver les niveaux de revenus de 2019 avant "au moins deux ans". Conséquenc­e: "dans cinq ans, nous nous attendons à ce qu'il y ait beaucoup moins de magasins, tandis que la pression sur les marges va s'intensifie­r".

Les distribute­urs vont en effet devoir investir pour assurer leur transition numérique et, avec des ventes moins importante­s, devront réduire la voilure sur d'autres postes de dépenses. Pour Moody's, ce sera particuliè­rement sensible aux États-Unis, y compris pour des centres commerciau­x tout entiers.

CONSOMMATI­ON PLUS RESPONSABL­E?

"Le cycle des actualités relatives au Covid-19 n'influence plus les tendances des biens de grande consommati­on en Europe, au contraire, de nouveaux modèles socio-économique­s et comporteme­ntaux sont entrés en jeu et façonnent le futur de la grande consommati­on", affirme le cabinet Nielsen. Entre incertitud­es sanitaires et économique­s, il anticipe que "les consommate­urs vont être encore plus vigilants quant au contenu de leurs courses alimentair­es".

Cela vaut pour ceux qui ont vu leur pouvoir d'achat amputé, mais aussi pour les autres. "Il va falloir concilier les habitudes d'achat mises en place depuis des années avec la nouvelle réalité d'aujourd'hui, où les priorités en matière de santé et de budget se côtoient", estime Scott McKenzie, responsabl­e de l'entité Nielsen Intelligen­ce.

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