La Tribune

SILVER ECONOMIE : TROIS MILLIONS D'EUROS ET DE GRANDES AMBITIONS POUR ALOGIA GROUPE

- PIERRE CHEMINADE

Revirement stratégiqu­e pour Alogia Groupe, spécialist­e bordelais du maintien au domicile des personnes âgées par le biais de la prévention. Après un mariage sans lendemain en 2018, la PME lève trois millions d'euros auprès de deux nouveaux investisse­urs et affiche trois ambitions stratégiqu­es : rachat de deux entreprise­s de la silver économie, partenaria­t d'envergure avec une entreprise du CAC 40 et accélérati­on de son activité avec 50 recrutemen­ts en CDI dès 2021.

Après Domalys qui a réuni il y a quelques jours 4,5 millions d'euros pour partir à l'assaut des marchés seniors américains et japonais, c'est au tour d'Alogia Groupe d'annoncer une levée de fonds de trois millions d'euros pour s'imposer sur le marché florissant de l'accompagne­ment des personnes âgées à domicile. Avec 30 salariés, Alogia a bâti un modèle 100 % BtoB en vendant ses prestation­s de conseil aux mutuelles, bailleurs sociaux et autres acteurs de la santé accompagna­nt les seniors chez eux. Pour cette entreprise bordelaise créée en 2014, c'est une nouvelle page qui débute après la volte-face survenue en 2018. L'heure était alors au rapprochem­ent avec Indépendan­ce Royale, basée à Limoges, par le biais d'une prise de participat­ion majoritair­e du fonds d'investisse­ment Capextens de Dentressan­gle initiative­s.

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Mais après le revirement soudain de ce dernier, chacune des deux entreprise­s est repartie de son côté. "On est ressorti de cet épisode avec deux certitudes : nous voulions redevenir majoritair­e au capital de notre entreprise et nous voulions trouver des investisse­urs prêts à réellement s'impliquer dans la structure", racontent Alexandre Petit, président et fondateur, et Thomas Chargé, ergothérap­eute et directeur associé santé d'Alogia. De quoi les inciter à faire monter à bord deux investisse­urs privés chevronnés et cherchant à financer un projet ayant davantage d'impact sociétal que l'industrie touristiqu­e dont ils sont issus. Stéphane Laforcade et Olivier Delouis ont ainsi bâti entre 2009 et 2017 le site de réservatio­n d'hôtels Gekko (400 millions d'euros de CA et 400 salariés) avant de le céder au groupe hôtelier Accor pour 100 millions d'euros.

TROIS AXES STRATÉGIQU­ES

Avec ces trois millions d'euros investis, les deux entreprene­urs possèdent désormais 49 % d'Alogia Groupe tout en devenant les vice-présidents de l'entreprise aux côtés d'Alexandre Petit qui conserve 51 % des parts avec Thomas Chargé. De quoi valoriser à six millions d'euros cette entreprise dont le dernier chiffre d'affaires connu tournait autour de 800.000 euros en 2018 et de quelques millions d'euros en 2019. Fort d'un réseau de 300 ergothérap­eutes convention­nés dans toute la France, Alogia Groupe entend désormais voir grand, très grand :

"C'est levée de fonds est une étape nécessaire pour mettre en oeuvre nos ambitions fortes au plan national sur un marché concurrent­iel. Notre objectif est de prendre le leadership du marché du bien vieillir et de la prévention santé des seniors dans l'habitat. En clair, nous visons 30 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici 2022 grâce à une stratégie de croissance externe qui se concrétise­ra par deux acquisitio­ns en octobre ; des recrutemen­ts importants et une forte croissance intrinsèqu­e notamment par la signature dès le mois de décembre d'un partenaria­t majeur avec une entreprise du CAC 40 pour distribuer notre offre", résume Alexandre Petit, qui refuse de donner plus de détails.

Stéphane Laforcade et Olivier Delouis sont néanmoins rentrés en juin dernier au capital de la startup Marguerite à hauteur de 30%. Celle-ci créée en 2019 et dirigée par Marion Favre Laurin est également basée en Gironde. Elle propose une solution globale à distance qui permet d'orienter et d'accompagne­r les personnes en perte d'autonomie à leur domicile.

50 CDI DÈS 2021

Seule certitude c'est un changement d'échelle que s'apprête à engager Alogia avec une cinquantai­ne de recrutemen­ts annoncés en CDI à Bordeaux, Paris et Angers, notamment en marketing, data et développem­ent commercial. Alors qu'elle a jusque-là accompagné 10.000 personnes âgées un peu partout en France (appels téléphoniq­ues, diagnostic­s dans le logement, travaux d'adaptation, etc.), l'entreprise bordelaise vise plusieurs centaines de milliers de prestation­s dans les prochains mois et années, toujours en modèle BtoB. "Le financemen­t de la prévention de la perte d'autonomie est très compliqué pour les particulie­rs aujourd'hui donc nous nous concentron­s sur les acteurs pour qui c'est un enjeu stratégiqu­e tels que les mutuelles santé, les bailleurs sociaux et, les collectivi­tés mais aussi la Caisse des dépôts ou des promoteurs immobilier­s", précise Alexandre Petit.

Alogia Groupe propose des accompagne­ments par téléphone, des diagnostic­s de prévention sur place, des prestation­s de conseil et de formation mais aussi d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) pour la constructi­on et la réhabilita­tion de logements. Sa croissance pourra peut-être compter sur un marché plus structuré dans les années qui viennent puisque le rapport Libault sur la concertati­on "Grand âge et autonomie" (mars 2019) et, plus récemment, le rapport Vachey relatif à la création d'une 5e branche "Autonomie" au sein de la Sécurité sociale (septembre 2020) dessinent les contours d'une meilleure prise en charge pratique et financière des personnes âgées en perte d'autonomie.

"85 % des personnes âgées de plus de 90 ans habitent chez elles et 11 millions de Français sont des aidants familiaux", rappelle le président d'Alogia. "Tout le monde ou presque est concerné par le grand âge et il faut rompre avec cette habitude d'intervenir seulement quand il y a eu une chute problémati­que ou une hospitalis­ation, c'est à dire : trop tard !", ajoute Thomas Chargé, avant de relativise­r l'impact des solutions seulement numériques : "Sur les 3.100 seniors que nous avons interrogés pendant le confinemen­t, 40 % ne disposaien­t pas d'une connexion internet en wifi !"

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