La Tribune

MOHED ALTRAD (MHR) ET BERNARD LAPORTE, LE PATRON DU RUGBY FRANCAIS, PLACES EN GARDE A VUE

- AFP - GUILLAUME DAUDIN ET ANDREA BAMBINO

Mohed Altrad, le patron du groupe Altrad à Montpellie­r, a été placé en garde à vue ce 22 septembre, ainsi que Bernard Laporte, le président de la Fédération française de rugby. Ce dernier est soupçonné d’être intervenu auprès de la commission d’appel de la Fédération pour faire diminuer des sanctions contre le club de Montpellie­r en 2017.

A dix jours de briguer sa succession à la tête de la fédération française de rugby (FFR) Bernard Laporte a été placé en garde à vue mardi matin à Paris, dans l'enquête sur ses liens avec le groupe Altrad.

Le patron du groupe, Mohed Altrad, propriétai­re du club de Montpellie­r et sponsor des Bleus, a également été placé en garde à vue par la police financière, tout comme le patron du Mondial-2023 Claude Atcher, et deux hauts responsabl­es de la Fédération, Serge Simon et Nicolas Hourquet.

Laporte est notamment soupçonné d'avoir favorisé le Montpellie­r Hérault Racing (MHR), en intervenan­t auprès de la commission d'appel de la FFR pour faire diminuer des sanctions contre le club, fin juin 2017.

Le patron du rugby français, 56 ans, est arrivé mardi matin dans les locaux de la Brigade de répression de la délinquanc­e économique (BRDE) à qui le parquet national financier (PNF) avait confié les investigat­ions en 2017, ont indiqué des sources concordant­es à l'AFP. Le vice-président de la FFR, Serge Simon, s'est aussi présenté à la BRDE mardi matin, a constaté une journalist­e de l'AFP.

Laporte, ancien sélectionn­eur des Bleus (2000-2007), devenu ensuite secrétaire d'Etat chargé des Sports de Nicolas Sarkozy (2007-2009), s'est toujours défendu de toute interventi­on en faveur de Montpellie­r, même s'il a reconnu avoir téléphoné au président de la commission, Jean-Daniel Simonet.

Des inspecteur­s généraux du ministère des Sports ont également établi dans un rapport transmis à la justice que les décisions de la commission ont été "modifiées", entre les 29 et 30 juin 2017. Dans un premier temps, la commission d'appel aurait décidé de confirmer les sanctions prononcées par la Ligue (LNR), soit 70 000 euros d'amende et un match à huis clos, avant de passer à 20 000 euros d'amende et un sursis sur le match à huis clos. Le dossier portait sur le déploiemen­t de banderoles hostiles à la Ligue par les supporteur­s du MHR.

FRANCE 2023

Trois mois plus tôt, le groupe Altrad, spécialisé dans les matériels de bâtiment, était devenu le premier sponsor maillot du XV de France, avant de soutenir la candidatur­e française, finalement victorieus­e, pour l'organisati­on de la Coupe du monde 2023.

En révélant l'affaire en août 2017, le JDD avait aussi mis au jour l'existence d'un contrat entre BL Communicat­ion, une société dirigée par Bernard Laporte, et Altrad Investment Authority, pour un montant de 150 000 euros. Sous la pression, l'ancien manager de Toulon y avait renoncé.

Les policiers ont déjà entendu plusieurs protagonis­tes en 2019, notamment les trois membres de la commission d'appel de la FFR qui devaient juger le dossier le 29 juin 2017.

Sur fond de vives tensions entre la Ligue de rugby et la Fédération, l'affaire avait gâché le début de mandat de Bernard Laporte, élu le 3 décembre 2016. Elle risque maintenant de gêner la dernière ligne droite de sa campagne auprès des clubs, chargés de le départager face à son principal opposant, Florian Grill.

Lundi, l'avocat de Laporte, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, a dénoncé le "timing" de cette convocatio­n, une "ingérence judiciaire" dans le processus électoral selon lui.

"INTÉRÊT SUPÉRIEUR"

Dans une interview au Parisien, Bernard Laporte avait assuré qu'en appelant Simonet, il avait simplement souhaité lui "donner un éclairage politique" sur les tensions dans le rugby et qu'il fallait apaiser la situation au sein du rugby profession­nel.

Jean-Daniel Simonet, lui, a assuré aux inspecteur­s du ministère des Sports que sa commission n'en était qu'au stade d'une "hypothèse" de décision le 29, d'après lui trop sévère.

Interrogé par le tribunal lors d'un procès en diffamatio­n perdu par le patron de la FFR contre L'Equipe, le 9 mai 2019, Philippe Peyramaure, un des membres de la commission d'appel, avait livré un témoignage beaucoup moins consensuel.

D'après lui, Simonet l'avait appelé au matin du 30 juin pour lui raconter le coup de fil d'un Bernard Laporte "pas content", qui lui "avait dit, de manière plutôt brutale, qu'Altrad était un sponsor important de l'équipe de France (premier sponsor maillot), un soutien important pour la candidatur­e" victorieus­e de la France à l'organisati­on du Mondial-2023 "et qu'il fallait supprimer ces sanctions".

"C'est l'intérêt supérieur du rugby", aurait ajouté Jean-Daniel Simonet, selon cette version.

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