La Tribune

EN FRANCE, LES FONDS D'INFRASTRUC­TURE S'IMPOSENT DANS LE CAPITALINV­ESTISSEMEN­T

- JULIETTE RAYNAL

Les fonds d'infrastruc­ture, qui font beaucoup parler d'eux à la faveur de l'offensive de Veolia sur Suez, ont levé 15,6 milliards d'euros en 2019 et ont investi 10,9 milliards d'euros au travers de 277 opérations. Soit un montant en hausse de 67%. Qui sont-ils ?

Le feuilleton Suez-Veolia a mis en lumière des acteurs peu connus du grand public : les fonds d'infrastruc­ture. Dans la saga de la rentrée, plusieurs noms ont émergé : le fonds Meridiam, candidat désigné au rachat de la filiale Eau France de Suez, mais aussi Ardian et Antin, ce dernier ayant affirmé disposer des moyens financiers suffisants pour jouer éventuelle­ment un rôle de premier plan dans ce dossier.

En France, les fonds d'infrastruc­ture se sont développés il y a une quinzaine d'années seulement. Leur spécificit­é ? Investir dans des infrastruc­tures dans les domaines de l'énergie et l'environnem­ent, des télécoms, des transports ou encore de la santé.

A MI-CHEMIN ENTRE LE PRIVATE EQUITY ET L'IMMOBILIER

"Les infrastruc­tures constituen­t une classe d'actif spécifique, qui, par certains côtés, reprend des éléments du private equity [ou capital-investisse­ment, ndlr], et de l'autre ressemble à l'immobilier. Mais ce n'est ni l'un, ni l'autre", expose Vincent Levita, président de la commission infrastruc­ture chez France Invest et fondateur et dirigeant du fonds Infravia.

Cette activité consiste à investir en fonds propres dans une société (avec parfois également de la dette). En général, au bout d'un certain nombre d'années, le fonds revend la société dans une logique de fonctionne­ment proche de celle du private equity.

"Là où c'est différent, c'est qu'il s'agit d'actifs réels physiques qui opèrent dans des secteurs d'utilité publique et donc très régulés. Et, comme dans l'immobilier, il y a à la fois un flux régulier, en général soumis à l'inflation, et l'actif peut s'apprécier et donc générer une plus-value à la revente", poursuit-il.

15,6 MILLIARDS D'EUROS LEVÉS

Des caractéris­tiques très attractive­s pour les investisse­urs institutio­nnels (assureurs, fonds de pension et fonds souverains) en quête de sécurité de capital et de revenus récurrents sur du plus ou moins long terme.

La concession d'autoroute est un bon exemple. L'opérateur perçoit tous les ans des revenus issus de l'utilisatio­n de l'autoroute par les usagers. Une partie de ce cash-flow est affectée au remboursem­ent de la dette et l'autre permet de servir un dividende aux actionnair­es et donc aux institutio­nnels investisse­urs dans ces fonds.

En France, on compte désormais une petite trentaine de fonds, mais quatre acteurs seulement dominent le marché : Antin Infrastruc­ture Partners, Ardian, Meridiam et InfraVia. Le marché des fonds d'infrastruc­ture reste donc beaucoup plus concentré que celui du private equity où plus de 200 fonds tricolores sont actifs.

BOOM DES INVESTISSE­MENTS

Au total, 15,6 milliards d'euros ont été levés par 25 fonds d'infrastruc­tures en 2019, selon le décompte de France Invest et de l'Associatio­n française de la gestion financière (AFG). Un montant en hausse de 7% par rapport à 2018. Les fonds levés pour financer les infrastruc­tures rattrapent ainsi la masse de capitaux collectés pour le reste des entreprise­s non cotées (20,6 milliards d'euros).

Les investisse­ments eux aussi s'accélèrent. En 2019 toujours, les fonds d'infrastruc­ture tricolores ont investi 10,9 milliards d'euros au travers de 277 opérations, soit une progressio­n annuelle de 67%. Les tickets, de montants très variés selon la typologie du fonds, oscillent entre quelques dizaines de millions d'euros et plusieurs centaines de millions.

UN ÉCOSYSTÈME FAVORABLE

"La France figure parmi les pays les plus avancés en Europe dans les fonds d'infrastruc­ture. Et ce, pour une raison assez simple : l'existence d'un écosystème complet, avec une industrie de qualité via les acteurs du BTP, de l'eau, de l'énergie et des télécoms, de bonnes banques de financemen­t et les fonds d'investisse­ment", fait valoir Vincent Levita.

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