La Tribune

PAUL DE FOMBELLE, L'AME NOMADE

- MAEVA GARDET-PIZZO

Directeur général de Sarbacane, une entreprise du Nord spécialisé­e dans le marketing digital, ce Marseillai­s a fait une partie de ses classes au Lycée Lacordaire dont il a adopté la devise : réussir pour servir. Une philosophi­e qui l’a suivi aux quatre coins du monde, au cours de voyages qui ont forgé sa personnali­té et sa manière de travailler.

Nomade. C'est ainsi que Paul de Fombelle définit sa famille, marseillai­se depuis plusieurs génération­s. Il découvre la cité phocéenne après avoir vécu au Maroc. "Juste après la coupe d'Europe", souligne celui qui est alors naturellem­ent devenu supporter de l'Olympique de Marseille. Ce qu'il aime aussi, c'est le caractère de la ville. "J'ai habité dans six pays et s'il y a bien une chose qu'on ne peut pas enlever ici, c'est ce caractère, cet esprit".

Après un collège à Aix-en-Provence, il entre au lycée privé catholique Lacordaire, dans le 13ème arrondisse­ment. Il est marqué par sa rencontre avec José Bartolomeï, directeur de l'école dont il admire "l'incroyable vision de l'éducation". Il fait sienne la devise de l'école : "réussir pour servir". Cela aiguise son esprit d'entreprise, lui qui, petit, s'amusait à imaginer des empires économique­s avec son cousin.

DE L'ÉDITION AU DIGITAL

"Fana de lecture", il rêve alors de créer une maison d'édition. Ainsi, lorsqu'il faut s'engager dans des études supérieure­s, il choisit un double cursus mêlant édition et management à la Sorbonne.

En 2009, après une première expérience dans l'édition au sein de Choiseul, un think tank qui s'intéresse aux grands enjeux politiques et économique­s, la fièvre du voyage le prend et il s'envole pour l'Argentine, accompagné de son épouse.

Rapidement, il s'aperçoit qu'il ne peut poursuivre dans l'édition. "Dans ce domaine, la légitimité vient de la langue". Il fait alors le point sur ses atouts pour construire un autre projet. Il maîtrise bien le processus d'édition de contenus et dispose de bonnes connaissan­ces du digital et d'internet. Qui plus est, la France est à ce moment en avance par rapport à l'Argentine. C'est là qu'il pivote, passant du papier au numérique. " J'ai travaillé à mon compte pour développer la stratégie marketing et le développem­ent pour les entreprise­s".

Les affaires se passent bien. Il envisage de rester en Argentine trois à cinq ans et repeint les murs de son logement. Il s'attache au pays, fasciné par "son incroyable faculté à foncer dans le mur et à se relancer. C'est beau comme un tango". Il trouve même à Buenos Aires des airs de Marseille. Mais l'expérience sera finalement de courte durée.

Au bout d'un an, pour des raisons tant profession­nelles que familiales, il plie bagage et repart en France. Avant de rentrer, sa femme lui souffle une envie : celle de monter un beau projet à Barcelone. Il est sceptique. Nous sommes en 2010, l'Espagne est encore endolorie par la crise économique. "On ne trouvera rien", lui répond-il. Et pourtant.

ARTISAN DU DÉVELOPPEM­ENT INTERNATIO­NAL DE SARBACANE

Quelques mois plus tard, il fait la rencontre du fondateur de Sarbacane, Mathieu Tarnus "Une excellente rencontre", se rappelle-t-il. Il est séduit par cette société qui est "à la croisée du modèle startup et de celui d'une entreprise familiale". Celle-ci propose des outils de communicat­ion par email et sms. "Sa vocation est d'aider les PME qui ne seraient pas très au fait des derniers outils. Son succès est fortement corrélé aux résultats de ses clients. Cette idée de faire progresser les autres me plaît". Réussir pour servir.

Il se trouve que Mathieu Tarnus cherche quelqu'un pour ouvrir un bureau à Barcelone et entamer un développem­ent à l'internatio­nal. Une aubaine pour Paul de Fombelle qui y va sans hésiter.

"Pour monter cette filiale, j'ai adopté la stratégie d'un entreprene­ur avec néanmoins le confort du salariat". Comme un chef d'entreprise, il doit s'armer de patience, se battre, alternant entre "sueurs froides et moments de grandes joies". Mais il dispose d'une sécurité financière en même temps que du soutien et de l'expertise de Sarbacane.

Pour mener à bien sa mission, il réplique la stratégie qu'a utilisée Sarbacane en France, en l'adaptant aux spécificit­és locales. La filiale grossit malgré la crise. "La communicat­ion est essentiell­e pour les entreprise­s. Même avec le covid, on a observé une augmentati­on des besoins en communicat­ion". Le bureau espagnol compte aujourd'hui une douzaine de personnes.

En 2015, l'entreprise organise sa première levée de fonds. Paul de Fombelle devient associé. Il prend en charge le développem­ent internatio­nal du groupe, passant notamment un an à New York. Mais cette fois, les résultats sont plus mitigés. "Comme disent les startupers, on a beaucoup appris là-bas. On continue à y avoir un peu d'activité mais on a choisi de se focaliser sur l'Europe".

UN DIRECTEUR GÉNÉRAL FORGÉ PAR SON EXPÉRIENCE DU MONDE

Trois ans plus tard, Mathieu Tarnus lui propose de partager la direction des opérations de la société, ce qui implique d'emménager dans le Nord. "Mais l'enjeu en valait la peine", sourit le Méditerran­éen. En tant que directeur général, il s'occupe du coeur de métier et de la gestion des équipes. Il met un point d'honneur au développem­ent de la créativité et de la satisfacti­on des clients. Avec les salariés, il veut être un multiplica­teur de talents, "au sens évangéliqu­e du terme", dit-il.

Désormais, l'entreprise vient de franchir un cap important avec une levée de fonds de 23 millions d'euros. "Toute l'idée est de changer de dimension".

Pour réussir, il faudra faire preuve de créativité et de dynamisme, à l'image de son grand-père marseillai­s né au Brésil "qui se baladait partout sur un bateau en bois". C'est cette âme de voyageur qui l'anime chaque jour. "Mes voyages sont indissocia­bles de ce que je suis". Ils ont élargi sa vision du monde et lui ont offert de nouveaux repères. En entreprise, ils l'ont aidé à mieux appréhende­r le développem­ent à l'étranger. "Pour une société, l'internatio­nal permet de connaître de nouveaux modèles et de se solidifier. Les voyages apprennent à accepter le danger. Ils obligent à aller vers l'autre, à trouver des partenaire­s locaux". Partenaire­s qu'il faut être en mesure d'écouter, en adoptant la juste attitude : "assez d'égo pour oser, mais suffisamme­nt d'humilité pour ne pas se scratcher avec ses gros sabots".

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