LE PLAN DU GOUVERNEMENT POUR UN "NUMERIQUE" PLUS DURABLE
Le gouvernement a présenté sa feuille de route pour limiter l'empreinte environnementale du numérique. Au menu : des pouvoirs plus larges confiés à l'Arcep, la remise en question des subventions des téléphones portables, mais aussi un soutien plus appuyé aux start-up de la greentech.
Baromètre environnemental des acteurs du numérique, prise en compte des enjeux environnementaux dans l'attribution des prochaines fréquences 5G, soutien aux "datacenters vertueux", accompagnement des start-up greentech à fort potentiel... Le gouvernement, après la présentation de premières mesures début octobre, a finalisé, ce mardi 23 février, sa feuille de route pour limiter l'empreinte écologique du numérique. Une initiative qui doit répondre aux propositions de la Convention citoyenne pour le Climat, dont les membres exigent plus de sobriété numérique.
Car si le numérique peut constituer un levier pour accélérer la transition écologique, il affiche aussi une empreinte environnementale forte et souvent sous-estimée par le grand public. Celle-ci représenterait entre 5 et 10% de l'impact environnemental de la France, en prenant en compte les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi les consommations en eau et en ressources non renouvelables. Plus de 75% de cette empreinte écologique provient de la phase de fabrication des équipements des utilisateurs.
Lors d'un colloque à Bercy en octobre dernier, Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, et Cédric O, secrétaire d'État chargé du numérique, avaient justement présenté une série de mesures destinées à encourager la prolongation de la durée de vie des appareils, alors que 88% des Français changent de téléphone portable tandis que l'ancien fonctionne toujours et que moins de 40% des déchets d'équipements électriques et électroniques sont recyclés en Europe.
PRESSION SUR LES OPÉRATEURS TÉLÉCOMS
Les nouvelles mesures présentées ce 23 février ciblent notamment les opérateurs télécoms. L'une des actions phares prévoit en effet de saisir l'Arcep, le régulateur du secteur, pour qu'il analyse les pratiques commerciales des opérateurs autour de la subvention des téléphones. Objectif : analyser l'impact du modèle du téléphone à 1 euro par rapport aux autres modèles de ventes afin de savoir s'il accélère, oui ou non, le renouvellement des terminaux. A terme, le gouvernement pourrait donc encadrer le renouvellement des smartphones.
"Nous sommes prêts à prendre des mesures", a déclaré une source proche du gouvernement, sans donner plus de détails. "Le sujet prioritaire c'est d'allonger la durée de vie des terminaux. C'est là où on aura le plus d'impact", ont assuré les cabinets des deux ministres.
BAROMÈTRE ENVIRONNEMENTAL
La feuille de route prévoit aussi de mettre en place un baromètre environnemental des acteurs du numérique, dont le pouvoir de collecte sera confié à l'Arcep.
"Il faudra une base légale pour permettre à l'Arcep de collecter des données [environnementales, ndlr] auprès des opérateurs et des autres acteurs du numérique [fournisseurs de contenus, fabricants d'équipements et éditeurs de logiciels, ndlr]. Le baromètre verra le jour progressivement", a indiqué le cabinet de Cédric O.
Le gouvernement français demande également à l'Arcep d'étudier les enjeux environnementaux qui pourraient être liés à la prochaine attribution des fréquences mobiles dans la bande 26 GHz, prochaine étape cruciale dans la montée en puissance du réseau de téléphonie mobile de cinquième génération (5G).
Concernant l'utilisation des appareils, le gouvernement va lancer une campagne de sensibilisation des Français à la sobriété numérique, pilotée par l'agence de la transition écologique (Ademe). Surtout, il entend renforcer les critères d'éco conditionnalité auxquels doivent répondre les data centers pour bénéficier d'un tarif réduit sur la taxe d'électricité. Ici plusieurs thématiques sont envisagées, comme l'efficacité énergétique, la valorisation de la chaleur fatale (c'est-à-dire la chaleur dégagée par le fonctionnement des serveurs mais non utilisée) ou encore l'efficience de la consommation en eau.
300 MILLIONS D'EUROS POUR LES GREENTECH
Dernier levier identifié : le soutien aux start-up de la green tech pour accélérer l'innovation au service de la transition écologique. Dans cette optique, le gouvernement entend soutenir plus largement les greentech à fort potentiel de croissance en les faisant bénéficier des dispositifs d'accompagnement French tech 120 et Next 40.
Au menu également, la création d'un fonds dédié de 300 millions d'euros. Enfin, une mission sera confiée au sénateur Bargeton pour identifier les solutions "mobilisant le numérique au service de l'environnement et formuler des propositions pour massifier ces initiatives et outiller les territoires".
"Une très grande partie de ces mesures" sont destinées à être mises en oeuvre dans le courant de l'année, ont indiqué les cabinets des deux ministres.
(avec AFP et Reuters)