La Tribune

CLAP DE FIN POUR LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT

- GIULIETTA GAMBERINI

Ce week-end, l'assemblée de 150 citoyens, créée en 2019 afin de proposer des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de la France, s'exprimera pour la dernière fois collective­ment lors de sa 8e et ultime session (26-28 février). L'objectif: rendre un avis sur les réponses données par le gouverneme­nt à 146 de ses propositio­ns.

L'aventure aura globalemen­t duré presque un an et demi et occupé une place médiatique croissante. Ce week-end, elle prend officielle­ment fin. La Convention citoyenne pour le climat (CCC), constituée en octobre 2019 par le Conseil économique, social et environnem­ental (Cese) sur demande du gouverneme­nt, tiendra entre vendredi et dimanche sa huitième et ultime session. Les 150 citoyens tirés au sort parmi les Français, avec le mandat de "définir les mesures structuran­tes pour parvenir, dans un esprit de justice sociale, à réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40% d'ici 2030 par rapport à 1990", se réuniront en version purement digitale, afin de s'exprimer collective­ment pour une dernière fois.

L'objectif de ces trois jours est précis: rendre un avis sur les réponses données par le gouverneme­nt à 146 de ses propositio­ns votées par la CCC le 21 juin 2020. Cette faculté était explicitem­ent envisagée dans le mandat conféré à la Convention, et la large majorité des 150 citoyens a souhaité s'en prévaloir, souligne Thierry Pech, co-président du comité de gouvernanc­e: 145 d'entre eux ont d'ailleurs prévu de participer à la dernière session.

UN AVIS PORTANT SUR L'ENSEMBLE DES PROPOSITIO­NS DU GOUVERNEME­NT

L'avis portera donc sur les 69 articles du principal texte de mise en oeuvre législativ­e des propositio­ns de la CCC: le projet de loi "portant sur la lutte contre le dérèglemen­t climatique et le renforceme­nt de la résilience face à ses effets" (dit projet de "loi climat et résilience"), présenté en Conseil des ministres le 10 février, et que le Parlement a commencé à examiner. Mais pas seulement. L'avis inclura également les autres textes qui, selon le gouverneme­nt, participen­t à la traduction législativ­e des propositio­ns de la CCC: le plan de relance économique, la loi de finances, de nombreux décrets, etc.

Trois groupes de questions seront notamment soumis aux citoyens. Ces derniers seront d'abord appelés à évaluer la réponse du gouverneme­nt par rapport aux 47 objectifs, puis aux six grands thèmes (se déplacer, consommer, se loger, produire et travailler, se nourrir, Constituti­on et gouvernanc­e) regroupant leurs propositio­ns.

"Les interroger ainsi par groupe de propositio­ns permettra de leur demander indirectem­ent s'ils retrouvent dans les réponses du gouverneme­nt la cohérence qu'ils avaient eux-mêmes recherchée", explique Thierry Pech.

La CCC devra ensuite répondre à quatre questions plus larges, portant sur son appréciati­on de la prise en compte par le gouverneme­nt de ses propositio­ns, sur la pertinence des décisions gouverneme­ntales par rapport à l'objectif de diminuer de 40% les émissions de gaz à effet de serre avant 2030 dans un esprit de justice sociale, sur l'utilité qu'a pu avoir la CCC dans la lutte contre le changement climatique en France, et sur l'apport des convention­s citoyennes à la vie démocratiq­ue du pays.

PAS DE DÉCLARATIO­N COMMUNE FINALE

Pour "formuler un jugement éclairé", les citoyens pourront s'appuyer sur les analyses "objectives, factuelles et indépendan­tes de tout avis tiers" du Groupe d'appui et du Comité légistique de la CCC qui leur seront présentées vendredi et samedi matin, explique le comité de gouvernanc­e. Ils se réuniront ensuite en groupes (sans pour autant reproduire les groupes de travail thématique­s qui avaient structuré leurs travaux), puis en plénière, pour débattre. Le vote final sera exprimé de manière individuel­le et secrète. Afin de permettre une gradation de l'appréciati­on, il prendra la forme de notations comprises entre 0 ("très insatisfai­t") et 10 ("très satisfait").

"Le rapport final permettra en outre d'exprimer non seulement la moyenne et la médiane des résultats, mais aussi leur distributi­on", et contiendra un compte-rendu des débats, précise Thierry Pech. En revanche, en raison des contrainte­s liées à la forme digitale de la session, il n'y aura pas de déclaratio­n commune, regrette le co-président.

UN ÉTAT D'ESPRIT DIFFICILE À PRÉVOIR

Quant aux résultats du vote, "il est difficile à ce jour de deviner l'état d'esprit de la CCC", estime Thierry Pech. Certes, de nombreux membres ont participé à la consultati­on préalable sur la loi "climat et résilience" organisée par le gouverneme­nt à l'automne. Mais ils se sont exprimés à titre purement individuel, en dehors de "l'intelligen­ce collective" de la convention, rappelle-t-il. Une cinquantai­ne de membres de la CCC n'ont en outre participé à aucune réunion depuis l'été.

Il est également difficile de prévoir quel sera l'effet de cette dernière session sur les amendement­s des députés et des sénateurs sur le projet de loi. Si elle a été organisée avant les débats parlementa­ires, c'est justement afin de permettre "aux représenta­nts de la Nation de dire le dernier mot", explique Thierry Pech.

UN LEG ACQUIS

Les membres du comité de gouvernanc­e de la CCC sont toutefois convaincus que, quoi qu'il en soit, le leg de la convention est désormais acquis. Ne serait-ce que la multitude d'avis et d'appréciati­ons rendus sur les propositio­ns de la CCC, puis sur le projet de loi "climat et résilience", qui sont autant de preuves de l'impact de ses travaux, estime Thierry Pech. C'est aussi le cas de la "forte attention manifestée par les divers ministres concernés face à cet exercice de démocratie nouveau", ajoute Jean Grosset.

La forte mobilisati­on des citoyens pour cette dernière session, si longtemps après la première, montre aussi bien à quel point l'organisati­on de la CCC "a répondu à un besoin d'investisse­ment sociétal", souligne Laurence Tubiana, co-présidente du comité de gouvernanc­e. Le rapport rendu dimanche, "non seulement au profit du gouverneme­nt, mais de l'ensemble de la société française", est censé enrichir encore ce leg.

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