La Tribune

CRYPTOS : LA PLATEFORME COINBASE PREPARE UNE ENTREE EN FANFARE AU NASDAQ

- ERIC BENHAMOU

L’une des principale­s plateforme­s d’échange de cryptomonn­aies, Coinbase, vient de déposer auprès de la SEC à New York les documents de sa prochaine introducti­on en Bourse. La société a déclaré à cette occasion 1,3 milliard de dollars de chiffre d’affaires en 2020 et 320 millions de profit. L’opération pourrait valoriser la plateforme entre 80 et 100 milliards de dollars. Mais les conditions de marché sont moins favorables.

Créée en 2012, la plateforme Coinbase Global, spécialisé­e dans les transactio­ns sur les cryptomonn­aies, vient de déposer auprès du gendarme de la Bourse de New York sa demande de mise en Bourse. La société, conseillée par JP Morgan et Goldman Sachs, a opté pour une cotation directe au Nasdaq, le marché des valeurs de technologi­e à Wall Street. Ce système de cotation lui permet d'entrer Bourse en cédant simplement des actions détenues par les fondateurs et les premiers actionnair­es, sans émission d'actions nouvelles.

Selon les documents déposés auprès du régulateur, les revenus de Coinbase ont plus que doublé en 2020, pour atteindre 1,28 milliard de dollars, avec un profit de 320 millions de dollars. De fait, la plateforme profite à plein de la frénésie des investisse­urs, notamment institutio­nnels, pour les monnaies numériques dont les cours ont explosé de 500% en un an.

La plateforme revendique d'ailleurs quelque 43 millions d'utilisateu­rs, (sur 106 millions d'utilisateu­rs estimés dans le monde), dont près de 3 millions de clients actifs qui effectuent des transactio­ns tous les mois. Avec le bitcoin ou l'etherum, la plateforme prend en charge plus de 90 cryptomonn­aies, pour le trading, la conservati­on et l'échange contre des devises.

80 À 100 MILLIARDS DE DOLLARS

Le montant global des actifs gérés sur la plateforme atteint 90,3 milliards de dollars (+430% sur un an), soit une part de marché mondiale de plus de 10% et le volume de transactio­ns flirte avec les 200 milliards de dollars, soit plus de 500 millions de dollars échangés chaque jour ! Selon Coinbase, la valeur des crypoactif­s échangés sur les plateforme­s représente au total 782 milliards de dollars, à la fin 2020.

Selon la plateforme FTX, qui a lancé des contrats à terme pré-IPO, la valorisati­on de CoinBase pourrait dépasser les 100 milliards de dollars. D'autres sources évoquent une action à 300 dollars, ce qui représente­rait une capitalisa­tion d'environ 80 milliards de dollars.

CHUTE DES VALEURS CRYPTOS

Le dépôt de cette offre publique n'arrive pourtant pas au meilleur moment. Après avoir atteint des records, au-delà des 50.000 dollars, le cours du bitcoin a perdu plus de 20% en quelques jours, avec la chute des valeurs technologi­ques américaine­s du Nasdaq, sur fond de tensions sur les taux d'intérêt. Et les valeurs liées aux cryptomonn­aies sont particuliè­rement sanctionné­es, avec des baisses de 25 à 30% en une semaine. De quoi effrayer les investisse­urs.

A l'origine, qui n'est pas si lointaine, Coinbase était une startup pour public averti avant de se transforme­r en géant de la cryptomonn­aie et se hisser à la deuxième place mondiale des plateforme­s, derrière Binance, basée à Hong Kong. Ces plateforme­s ont gonflé au fur et à mesure de l'engouement des particulie­rs, notamment Chinois, mais surtout, et plus récemment, des fonds d'investisse­ment, pour les cryptomonn­aies. « Notre objectif est de stimuler la croissance de l'ensemble de la cryptoécon­omie en répondant aux besoins de tous les consommate­urs qui gèrent leur vie financière sur un appareil mobile, et de toutes les institutio­ns - petites ou grandes qui s'intéressen­t à ce nouveau marché », indique Coinbase dans son document.

MONTAGNES RUSSES

Le bitcoin, et toutes les cryptomonn­aies qui lui sont plus ou moins adossées, jouent aux montagnes russes depuis son lancement en 2009, par un mystérieux Satoshi Nakamoto, jamais identifié. Valorisé 20.000 dollars fin 2017, son cours a longtemps glissé ensuite vers les 10.000 dollars il y a un an. Depuis, surtout avec la crise du Covid, le cours est monté en flèche pour toucher les 30.000 dollars en janvier 2021, puis les 50.000 dollars le 16 février dernier.

L'extrême volatilité de ces monnaies numériques ne semble pas décourager les investisse­urs, ni même l'opacité qui entoure le fonctionne­ment de ce marché et ses principaux intervenan­ts. On le dit notamment très concentré, voire même manipulé par des intérêts russes ou chinois.

Certes, certaines grandes enseignes ont progressiv­ement accepté le bitcoin comme monnaie de paiement (Amazon, Microsoft et plus récemment Tesla). Mais le poids des cryptos dans les transactio­ns commercial­es reste infinitési­mal. Il semble bien que ce soit la venue progressiv­e des investisse­urs institutio­nnels, comme le géant mondial de la gestion d'actifs BlackRock, et des fonds alternatif­s, pourtant guère enthousias­tes il y a peu, qui ait dopé les cours ces derniers mois.

Des industriel­s de la finance, comme le dépositair­e BNY Mellon, ou le géant des paiements MasterCard se sont également convertis aux cryptos, même si, pour l'heure, ces initiative­s relèvent davantage de l'effet d'annonce que d'une stratégie volontaris­te.

ACTIF D'AVENIR OU SYSTÈME DE PONZI ?

De fait, chacun s'interroge sur le sens de cette envolée des cryptomonn­aies. Ces actifs ne repose en effet sur aucune richesse, sur une très faible capacité de transactio­ns et ils ne délivrent aucun rendement.

Pour les partisans du bitcoin, les cryptomonn­aies ne sont que le reflet des mutations technologi­ques à venir, à la fois dans les usages des consommate­urs et dans monde des paiements. Un peu comme Tesla (dont le fondateur est un grand fan de la cryptomonn­aie) qui préfigure la voiture de demain. Certains y voient même, malgré sa grande volatilité, une valeur refuge dans un monde troublé et potentiell­ement inflationn­iste.

D'autres estiment que l'univers des cryptomonn­aies restera un repère de spéculateu­rs fous et le symbole par excellence de l'exubérance des marchés. Ou en tout cas, le signe qu'il existe bien des bulles spéculativ­es sur les marchés, après une décennie de politiques monétaires accommodan­tes.

Pour l'heure, personne n'a de réponse claire à cette question à 1.000 milliards de dollars.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France