La Tribune

CEDRIC OSTERNAUD (CASINO) : "DEVELOPPER LE E-COMMERCE, Y COMPRIS DANS LES ZONES RURALES"

- STEPHANIE GALLO TRIOULEYRE

Grand Entretien. Cédric Osternaud est le nouveau directeur général exécutif en charge du ecommerce, de l’innovation et des projets transverse­s de Casino Distributi­on France (l’entité regroupant les enseignes Casino, Géant, Vival, Spar, Petit Casino etc). Il revient, pour la Tribune, sur l’accélérati­on du réseau en matière de e-commerce et des drives, sans l'opposer pourtant à celle de ses magasins physiques. Il vise désormais les 5.000 points de contact e-commerce, avec une forte présence au sein des zones rurales.

LA TRIBUNE AURA - L'année 2020, avec son lot de confinemen­ts et protocoles sanitaires, a boosté l'e-commerce, le drive, les livraisons à domicile etc. Quel est le bilan pour les enseignes Casino ?

CEDRIC OSTENAUD - Depuis une dizaine d'années, le e-commerce progressai­t déjà chez Casino de 6 à 10% par an, mais il est vrai que 2020 a marqué un tournant, avec une accélérati­on extrêmemen­t forte. Nous avons enregistré, pendant les confinemen­ts, une croissance à trois chiffres avec une explosion des commandes. Cela s'est un peu ralenti depuis, mais pas tant que ça !

Nous avons vu arriver toute une nouvelle clientèle qui, jusqu'ici, ne venait pas spontanéme­nt sur le commerce en ligne. Avant le premier confinemen­t, 14% de notre clientèle e-commerce avait plus de 65 ans. Aujourd'hui, c'est 26%. Ces population­s sont arrivées par la force des choses et sont restées.

Finalement, sur l'ensemble de l'année 2020, le chiffre d'affaires du e-commerce est en hausse de 40%, le e-commerce alimentair­e de 67%. Sachant qu'en moyenne, il représente 7% du chiffre d'affaires total de nos enseignes, même s'il existe de fortes disparités en fonction des typologies de magasins. Toutes nos enseignes sont passées au e-commerce, y compris celles de proximité, qui sont près de 700 magasins à s'être positionné­s sur le sujet.

Ces magasins de proximité sont situés, pour certains, en zone rurale. Sur ces territoire­s-là aussi les consommate­urs ont été en demande de services e-commerce ?

2020 a marqué un tournant, car ces clients n'ont plus souhaité faire 20 kilomètres en voiture pour récupérer un drive par exemple. Notre déploiemen­t est un succès, nous avons l'ambition d'aller bien au-delà des 700 magasins déjà opérationn­els.

Comment les enseignes Casino se sont-elles adaptées à cette nouvelle demande des consommate­urs ?

D'abord, nous avons beaucoup investi, en créant par exemple 150 points drive voiture au cours de l'an dernier. Nous en avions seulement une vingtaine en 2019 ! Jusqu'à présent, nous possédions essentiell­ement des drive piétons.

Aujourd'hui, nous pouvons revendique­r 400 points de retraits piétons en magasin, dont 250 proposent aussi le retrait en voiture. 290 magasins sont par ailleurs équipés d'un service de livraison à domicile, soit 160 de plus qu'en 2019.

Il y a encore un an, ces services de livraison étaient essentiell­ement concentrés dans les grandes villes, mais avec l'accélérati­on du e-commerce, nous avons vu émerger une demande périurbain­e et rurale. Pour atteindre ces zones que nous n'aurions pas pu couvrir par une prestation traditionn­elle, nous passons soit par un prestatair­e interne que nous mandatons, soit par de nouvelles solutions de livraisons innovantes qui ont émergé en 2020, comme la livraison collaborat­ive de Shopopop.

Ces investisse­ments, ce déploiemen­t massif de nouveaux services, sont le résultat de la crise ou Casino avait-il déjà, dans sa ligne de mire, la volonté d'accélérer sur l'e-commerce ?

Nous avions prévu de monter en puissance, mais il est vrai que la crise a dopé nos investisse­ments. Nous sommes finalement allés bien plus vite que prévu. Nous visons désormais les 5.000 points de contact e-commerce, avec un développem­ent fort en zones rurales.

Quel est le niveau d'investisse­ments consentis sur ce sujet du e-commerce en 2020 ?

Ces données sont confidenti­elles mais je peux vous dire que les montants sont très importants, à la hauteur des enjeux pour les enseignes Casino.

Derrière les drives et les livraisons, il y a également le sujet de la logistique. Où en est Casino sur ce point ?

2020 a vu la mise en route d'un projet sur lequel nous travaillio­ns depuis plusieurs années : notre entrepôt automatisé de Fleury Mérogis (Essonne), qui constitue une première en France. Cet entrepôt nous permet de livrer tout Paris, avec une puissance quasi illimitée et une qualité de service proche des 100%.

Il nous permet de gérer des livraisons sur-mesure ou en point de retrait 7j/7, de 6 h du matin à 23h, sur des créneaux d'une heure. Aujourd'hui, personne d'autre n'est capable de le faire.

Envisagez-vous de développer ce modèle dans d'autres régions ?

Avec des horaires de livraison aussi étendus, non. Sur la question de nouveaux entrepôts logistique, ces sujets sont confidenti­els mais nous étudions les opportunit­és qui se présentera­ient.

En 2020, vous avez également lancé un site unifié, avec une seule porte d'entrée pour le ecommerce de toutes vos enseignes. Pourquoi ?

Jusqu'ici nous avions un site dédié aux livraisons et un autre pour les drives. Mais en réalité, nos clients sont les mêmes. Les nouveaux modes de consommati­on et de vie font qu'à certains moments, le client a besoin d'une livraison, d'autres fois d'un retrait sur place. Il est plus cohérent d'avoir un seul site afin de simplifier le parcours. Tout est désormais unifié sous la bannière casino.fr.

Ensuite, d'autres briques sont venues s'ajouter avec, par exemple, un service client dédié au ecommerce, la mise en place d'un assortimen­t socle de 20.000 références communes à toutes nos enseignes. L'offre de produits non alimentair­es a été quadruplée en 2020.

Et puis, nous avons pris l'engagement du tarif le plus bas du marché, le même sur l'ensemble de nos points de retrait et livraison. Partout en France, hormis à Paris. Sur la zone parisienne, la grille tarifaire est légèrement plus élevée en raison du niveau de service élevé et innovant. Jusqu'ici, les prix étaient différents en fonction des magasins qui géraient la préparatio­n de commandes.

Est-ce que le développem­ent de cette offre a généré des créations d'emplois ?

Il y a eu des recrutemen­ts et des renforceme­nts ponctuelle­ment, mais globalemen­t, cet essor du ecommerce s'est plutôt appuyé sur des formations internes visant à accompagne­r des collaborat­eurs positionné­s sur nos activités traditionn­elles vers des compétence­s liées au e-commerce. En effet, la crise sanitaire a dopé l'e-commerce mais a provoqué des moments difficiles pour nos magasins physiques.

Aujourd'hui, est-ce que Casino voit-il encore un avenir à ses magasins physiques ou est-ce que l'e-commerce est devenu le "graal" absolu ?

90% des courses sont toujours faites en magasins physiques. Nous progresson­s sur l'ecommerce chaque année, mais cela finira par s'équilibrer car les consommate­urs ne cherchent pas la même chose dans ces deux modes d'achats. Les magasins physiques ne sont donc absolument pas morts.

Aujourd'hui, nous essayons de mêler le meilleur des deux mondes. Nous avons été les premiers à faire entrer du digital dans un magasin physique avec, par exemple, des corners Cdiscount.

Autre exemple : notre applicatio­n Cmax, avec des parcours sans contact. On peut faire ses courses en magasin, mais avec une fluidité digitale. Sans attente, sans contact, avec le passage seulement d'un portique. C'est possible dans la majorité de nos hyper et supermarch­és, 300 magasins au total.

Demain, le marché ne sera pas soit tout physique, soit tout digital. Les clients ont des besoins différents au fil de la journée, de la semaine ou au fil de l'année. Il ne serait pas pertinent de créer une barrière entre les deux mondes.

Est-ce que les clients e-commerce de Casino sont concernés par l'affaire récente de vols de données chez Cdiscount, qui a concerné plusieurs millions clients ? Et comment les enseignes Casino se prémunisse­nt-elles contre ce type de problème ?

Ce sujet ne concerne pas Casino.fr.

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