La Tribune

PROJET DE LOI CLIMAT ET RESILIENCE : ALLER AU BOUT DE L'AMBITION EN ASSOCIANT LES TERRITOIRE­S

- BERTRAND CAMUS (*)

OPINION. Un verdisseme­nt de la commande publique étendu à tous les modes contractue­ls renforcera­it les prestatair­es de services de la France et leurs écosystème­s de PME, y compris à l'internatio­nal. Grâce à ce levier, en grande partie géré par les collectivi­tés locales, le Parlement peut rapprocher l'ambition du projet de loi aux réalités de nos territoire­s. Par Bertrand Camus, directeur général de Suez.

Nous arrivons dans la dernière ligne droite du travail novateur et considérab­le initié par la Convention citoyenne et conclu par le projet de loi Climat et résilience. Cette expérience restera un cas d'école et une collaborat­ion inédite, sous le contrôle de la société civile, entre le politique, l'économique et le scientifiq­ue. Elle entérine la mise au premier plan d'une ambition : la résilience, c'est-à-dire la capacité d'un écosystème à retrouver son équilibre après un évènement exceptionn­el. Résilience : à présent que le mot est lâché, nous devrons collective­ment être à la hauteur.

Suez et ses 30.000 employés en France doivent gérer, en collaborat­ion étroite avec les collectivi­tés et les territoire­s, des ressources dont l'usage doit être envisagé à très long terme. L'idée d'un écosystème fragile est une dimension qui structure toutes mes décisions d'investisse­ment, d'innovation, de recherche et de décisions.

UNE COMMANDE PUBLIQUE À VERDIR RAPIDEMENT

A présent, après les réflexions citoyennes, s'ouvre le temps de l'examen par le Parlement. Ce dernier pourra renforcer le texte pour amplifier certaines avancées environnem­entales. Il faudrait encourager une meilleure réincorpor­ation des matières recyclées dans les nouveaux produits afin de réduire le recours aux matières vierges, pour réduire la pression sur les ressources naturelles limitées - et les émissions. On pourrait envisager de nouveaux leviers de financemen­ts pour enrayer la présence de micropollu­ants dans les milieux aquatiques. On devrait considérer la question de la pollution des eaux, de l'air et des sols, non seulement sous l'angle de la sanction mais également sous celui de la remédiatio­n.

Surtout, il existe un dispositif qui pourrait jouer un rôle d'entraineme­nt majeur : le verdisseme­nt concret et rapide de la commande publique. Celui-ci doit aller au-delà de l'ajout de clauses environnem­entales, déjà nombreuses, dans les marchés publics, pour s'étendre à tous les modes contractue­ls, y compris les concession­s, afin que la valeur ajoutée environnem­entale des services publics locaux soit pleinement reconnue.

UN LEVIER À PLUS DE 100 MILLIARDS D'EUROS

La France contribuer­ait ainsi à faire croître ses prestatair­es de services de premier rang et leurs écosystème­s de PME et de start up dotés, grâce à l'expérience française, d'une capacité de projection massive à l'internatio­nal. Ces entreprise­s en tireraient, à terme, un avantage concurrent­iel certain à l'internatio­nal, en ayant intégré dans leur organisati­on ces objectifs à atteindre pour remporter de nouveaux marchés. Une telle démarche s'inscrirait dès lors parfaiteme­nt dans le cadre du Green Deal impulsé au niveau européen, et favorisera­it la compétitiv­ité environnem­entale de nos entreprise­s répondant aux marchés publics.

Depuis la réforme de la commande publique opérée en 2016, il n'y a pas eu de nouvelle avancée. En France, la commande publique représente plus de 8% du PIB, soit environ 100 milliards d'euros. Ce montant sera par ailleurs amplifié par le plan de relance dans les prochaines années. C'est donc un levier économique fondamenta­l pour accélérer la lutte contre le changement climatique et accentuer la résilience de nos territoire­s. Il est dommage que ce levier n'ait pas été plus mobilisé, d'autant que plus de la moitié de cette enveloppe est gérée par les collectivi­tés locales, pierres angulaires des initiative­s environnem­entales, proches du terrain et volontaire­s pour expériment­er.

Le Parlement peut, à travers le « verdisseme­nt » de la commande publique, rapprocher l'ambition du projet de loi aux réalités de nos territoire­s. Je perçois déjà un signal favorable dans la nomination de M. Jean-René Cazeneuve, député du Gers et président de la délégation aux collectivi­tés territoria­les, pour assumer, à l'Assemblée nationale, le rôle clé de rapporteur général. Nous comptons sur l'examen parlementa­ire pour concrétise­r et enrichir l'ambition initiale de la Convention jusqu'au bout du processus législatif. C'est notre responsabi­lité vis-à-vis des génération­s futures qui est en jeu.

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