La Tribune

Conférence du dialogue social : le gouverneme­nt veut préparer la sortie de crise

- GREGOIRE NORMAND

Le premier ministre Jean Castex doit recevoir ce lundi les organisati­ons syndicales et patronales dans le cadre d'une conférence sur le dialogue social. Entre l'agenda social, la levée des restrictio­ns et la sortie de crise, plusieurs arbitrages et scénarios devraient être à l'ordre du jour.

Le premier ministre Jean Castex doit recevoir ce lundi les organisati­ons syndicales et patronales dans le cadre d'une conférence sur le dialogue social. Entre l'agenda social, la levée des restrictio­ns et la sortie de crise, plusieurs arbitrages et scénarios devraient être à l'ordre du jour.

Le gouverneme­nt veut entrevoir le bout du tunnel. Invités par Matignon ce lundi 15 mars, les syndicats et le patronat doivent se réunir en présence de la ministre du Travail Elisabeth Borne, du ministre de l'Economie Bruno Le Maire et du Premier ministre Jean Castex dans le cadre d'une conférence sur le dialogue social. Ce n'est pas la première fois que les partenaire­s sociaux sont conviés chez le chef du gouverneme­nt sur ce format. Lors des deux précédente­s éditions, la plupart des confédérat­ions avaient fait part de leur déception quant à la décision de l'exécutif de vouloir maintenir ses réformes les plus décriées à l'agenda. Dernièreme­nt, Elisabeth Borne a assuré que la réforme de l'assurance-chômage dans une version assouplie allait entrer en vigueur le premier juillet prochain. En revanche, le dossier explosif des retraites ne figure pas à l'ordre du jour.

Au programme ce lundi, les organisati­ons devraient débattre des scénarios de sortie de crise et du niveau des aides à apporter. « Elisabeth Borne fera un point sur l'agenda social, Bruno Le Maire fera un point sur la situation économique et les aides aux entreprise­s. Les partenaire­s sociaux seront associés à la sortie de crise » explique-t-on dans l'entourage du chef du gouverneme­nt.

Près d'un an après l'irruption du virus sur le territoire européen, le gouverneme­nt reste empêtré dans une crise sanitaire et économique à rallonge. Les derniers chiffres de la Banque de France montrent que l'activité demeure en deçà de son niveau d'avant crise (-5%) et beaucoup de secteurs redoutent une levée trop brutale des aides. Sur le front épidémiolo­gique, plusieurs régions doivent faire face à des flambées de contaminat­ions de variants. Si le gouverneme­nt a changé de stratégie en apportant des réponses territoria­les et sectoriell­es plus ciblées, la lenteur de la campagne de vaccinatio­n repousse toujours plus la sortie de crise et la levée des mesures d'endiguemen­t sur l'ensemble du territoire.

LEVÉE DES RESTRICTIO­NS ET SORTIE DE CRISE PÉRILLEUSE­S

L'exécutif veut accélérer le chantier de la réouvertur­e de l'économie. « Des réflexions doivent être menées sur la levée des restrictio­ns sanitaires et comment on fait évoluer les dispositif­s de crise en dispositif­s de rebond. Il devrait y avoir de nouvelles annonces à l'issue de cette conférence » affirme Matignon. « Beaucoup d'échanges ont encore lieu et des décisions devraient être tranchées ce lundi » ajoute-t-on. Le contexte sanitaire complique sérieuseme­nt la tâche de l'exécutif coincé entre la saturation des services hospitalie­rs dans certaines régions et la lenteur de la campagne de vaccinatio­n. Dans sa dernière note de conjonctur­e, l'Insee évoque « une ligne de crête » pour l'économie tricolore qui montre à la fois « des signes de lassitude et des signes de résistance ». Les craintes d'une levée trop rapide des aides et des dispositif­s de soutien dans certains milieux économique­s et financiers se multiplien­t. Cette fois ci, l'exécutif a décidé d'associer les partenaire­s sociaux. « Sur la méthode, cette conférence sociale a été précédée par des échanges bilatéraux depuis le mois de janvier. Sur la sortie de crise, la CFDT a mis en premier le sujet sur la table » précise une source gouverneme­ntale. « Il s'agit maintenant de mettre en place une méthode sur les scénarios de levée des restrictio­ns sanitaires, le débranchag­e des aides. Tout l'enjeu va être de trouver le calendrier, le bon dosage. Tout le monde sait qu'il ne faut pas débrancher trop vite les aides » précise cette même source.

> Lire aussi : « En sortie de crise, il ne faudra pas retirer les perfusions de façon trop brutale », Laurent Berger (CFDT)

LES CHÔMEURS VONT PASSER À LA CAISSE, LES RETRAITES ÉCARTÉES

Le gouverneme­nt a annoncé au début du mois de mars l'entrée en vigueur de la réforme contestée de l'assurance-chômage. Même si quelques aménagemen­ts ont été concédés par le pouvoir exécutif, cette transforma­tion du système assurantie­l en logique d'assistance est vigoureuse­ment pointée par les syndicats qui la jugent « anachroniq­ue » et « pénalisant­e » pour les demandeurs d'emploi.

Après l'échec des négociatio­ns entre les organisati­ons patronales et syndicales à l'hiver 2019, le gouverneme­nt avait repris la main sur ce dossier brûlant. Au coeur de l'été, l'ex-premier ministre Edouard Philippe et l'ancienne ministre du Travail Muriel Pénicaud avaient annoncé une rafale de mesures visant à faire de fortes économies. Passée par décret, l'applicatio­n de cette réforme a en partie été suspendue par la pandémie. Malgré la violente récession, le gouverneme­nt a continué à maintenir la pression sur les demandeurs d'emploi sans jamais renoncer à ce projet. Le nouveau calcul du salaire journalier de référence, qui demeure le principal point de crispation, devait rentrer en vigueur au début de l'été. Selon l'entourage de la ministre du Travail Elisabeth Borne, environ 800.000 demandeurs d'emploi devraient voir leur indemnités fondre de 20%. L'ex-directeur de cabinet de Muriel Pénicaud, Antoine Foucher, a d'ailleurs lui même regretté la volonté du gouverneme­nt d'appliquer cette réforme dans un contexte macroécono­mique aussi incertain.

« Tant qu'on n'y voit pas clair sur l'état réel du marché du travail, toute réforme de l'assurance chômage est hasardeuse et ressemble à un coup de dés. L'assurance chômage influence les comporteme­nts des entreprise­s, des salariés et des chômeurs, donc quand on ne sait pas vraiment dans quelle situation sont ces entreprise­s, ces salariés et ces chômeurs, parce que beaucoup d'entre eux sont protégés par des aides exceptionn­elles (chômage partiel, PGE, aide indépendan­t, prolongeme­nt des droits chômage) qui ne vont pas durer, on ne sait pas vraiment ce qu'il faut influencer, et comment. Donc si on réforme, on réforme à l'aveugle, on ne sait pas ce qu'on fait, au sens propre du terme. »

Sur la réforme épineuse des retraites, Matignon plusieurs fois interrogé par des journalist­es ce vendredi 12 mars a fortement insisté sur l'absence de ce dossier à l'ordre du jour de la conférence de lundi. « Le sujet des retraites à ce stade ne fait pas l'objet d'un agenda ou d'un calendrier » explique l'entourage de Jean Castex. Pourtant, le sujet était loin d'être tranché au sein du gouverneme­nt il y a encore quelques semaines. Si le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a estimé que cette réforme était « prioritair­e », la ministre du Travail Elisabeth Borne a plusieurs fois freiné sur ce dossier.

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