La Tribune

Chatbots : Dydu injecte 6,3 millions d'euros dans ses robots conversati­onnels

- PIERRE CHEMINADE

Créée en 2009, la startup bordelaise Dydu opère un important virage avec une levée de fonds de 6,3 millions d'euros et le départ d'un des trois cofondateu­rs. L'entreprise spécialisé­e dans les chatbots et voicebots entend accélérer pour conforter sa position de leader national auprès des entreprise­s et administra­tions puis viser le marché européen.

Avec Primobox et Elixir Aircraft, en janvier, c'est l'une des levées de fonds les plus importante­s dans la région bordelaise depuis le début de l'année 2021 et elle est l'oeuvre d'une équipe expériment­ée puisque la création de Dydu (ex Do You Dream Up) remonte à 2009, à Paris. A l'époque, les robots conversati­onnels qui répondent à l'écrit (chatbot) puis à la voix (callbots et voicebots) ne sont encore qu'à leurs balbutieme­nts et ne se diffuseron­t vraiment dans les usages qu'au cours des années 2010.

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Cela n'empêche pas Cyril Texier, Jérôme Vérité et Mathieu Changeat, les trois cofondateu­rs, de croire à la valeur de ces outils commerciau­x qui proposent une prise en charge des demandes les plus courantes des clients permettant ainsi de soulager les équipes de suivi client et donc d'en réduire les coûts. Douze ans plus tard, l'entreprise de 45 salariés, implantée à Bordeaux, Paris et Medellin (Colombie), pilote plus de 160 projets - dont le "Botaldo" de l'Equipe.fr - notamment pour des clients qui font partie du CAC 40 et du SBF 120. De quoi revendique­r la position de leader français du marché et de viser encore plus grand grâce à sa toute première levée de fonds.

LEVÉE DE FONDS ET NOUVEL ACTIONNARI­AT

Et paradoxale­ment, c'est cette levée de fonds qui doit permettre à Dydu de passer du statut de startup à celui d'entreprise plus classique. "J'ai été recruté il y a 18 mois précisémen­t pour piloter la deuxième décennie de Dydu et préparer une croissance plus soutenue en structuran­t l'entreprise comme un éditeur de logiciels profession­nel plutôt que comme une startup", explique à La Tribune Christophe Bonichon, le directeur général de Dydu qui affiche 20 ans d'expérience chez Microsoft. En préparatio­n depuis plus d'un an et décalé par la crise sanitaire, le tour de table financier est désormais bouclé pour un montant de 6,3 millions d'euros. Ce total est composé, pour plus de la moitié, d'une augmentati­on de capital auprès d'Entreprene­ur Invest et, pour le reste, de financemen­ts non dilutifs du Crédit Agricole Aquitaine et de Bpifrance. Cela s'accompagne d'une modificati­on de l'actionnari­at de Dydu : Cyril Texier quitte l'entreprise et son capital, pour poursuivre d'autres projets entreprene­uriaux, tandis qu'Entreprene­ur Invest et Christophe Bonichon y font leur entrée. Les cofondateu­rs Jérôme Vérité et Mathieu Changeat restent majoritair­es.

Pour une entreprise qui a toujours privilégié la croissance rentable en signant des contrats avec des clients plutôt que les levées de fonds avec des investisse­urs, il s'agit donc d'un tournant majeur. Celui-ci s'explique notamment par le nouvel élan constaté sur le marché des chatbots et de l'intelligen­ce artificiel­le conversati­onnelle, dont la croissance annuelle est estimée à +24 % d'ici 2026 par le cabinet Marketsand­markets. Ce qui porterait le marché mondial autour de 8,8 milliards d'euros contre 2,4 milliards d'euros en 2020. Un essor nourri par le contexte sanitaire qui favorise les solutions à distance.

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Christophe Bonichon (crédits : Dydu)

"CROÎTRE PLUS VITE QUE LE MARCHÉ"

L'objectif de Dydu est ainsi d'accélérer significat­ivement son développem­ent technologi­que pour prendre notamment le virage de la commande vocale et des interconne­xions toujours plus poussées entre les robots conversati­onnels et les outils collaborat­ifs et les messagerie­s instantané­es des entreprise­s. Si Dydu conçoit des bots capables de gérer plusieurs millions de conversati­ons par mois pour Renault, BNP Paribas, SNCF, Société Générale ou Orange, l'entreprise développe également une offre de bots plus accessible­s et moins onéreux pour séduire les PME. L'entreprise, qui ne communique pas son chiffre d'affaires, assure être rentable depuis sa création.

"On veut croître plus vite que le marché, soit une progressio­n annuelle d'au moins 30 %. Les premiers investisse­ments seront consacrés aux équipes produits et R&D, avant de s'étendre aux équipes commercial­es et marketing pour développer encore davantage la dynamique en France cette année et en Europe en 2022. Nos objectifs internatio­naux se tourneront principale­ment vers les pays européens "RGPD compliant" et dans les dix langues que nous gérons déjà (français, anglais, espagnol, italien, roumain, portugais, allemand...). Nous ambitionno­ns également d'élargir le recrutemen­t de notre réseau de partenaire­s pour proposer au marché des solutions conversati­onnelles encore plus développée­s et surtout pour en démocratis­er l'accès quelle que soit la taille de l'entreprise, ou le secteur d'activité", résume ainsi Christophe Bonichon.

LE MARCHÉ CROISSANT DES ADMINISTRA­TIONS

Sur un marché tricolore et européen très fragmenté avec des acteurs de petite taille plus ou moins récents, Dydu entend donc défendre ses positions et diversifie­r sa clientèle. "A côté du marché des entreprise­s pour échanger avec leurs clients ou leur salariés, on constate une réelle dynamique des collectivi­tés locales et des administra­tions publiques pour le chatbot afind de dialoguer avec tout ou partie de leurs usagers, à l'instar du chatbot NOA qui existe pour les startups en Ile-de-France", détaille le directeur général. "Des appels d'offres sont lancés par des préfecture­s, des départemen­ts ou des métropoles pour agréger leurs différents systèmes d'informatio­ns et faciliter les démarches des usagers. Il y a des projets très ambitieux, y compris en Nouvelle-Aquitaine."

Dans l'immédiat, Dydu vient d'ouvrir quatre recrutemen­ts à Bordeaux sur des postes techniques et produits. C'est en effet à Bordeaux que l'entreprise a installé toute son équipe de R&D... appuyée par une poignée de développeu­rs colombiens basés à Medellin. "Face à la pénurie de compétence­s dans le numérique à Bordeaux, en France et même en Europe, on a fait le choix l'an dernier de recruter des ingénieurs informatiq­ues en Colombie où la concurrenc­e est moins rude et on y a donc installé une filiale dédiée qui travaille main dans la main avec Bordeaux", explique Christophe Bonichon.

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