La Tribune

Une hausse de la TVA accroît les inégalités et la pauvreté

- GREGOIRE NORMAND

Les 10% des personnes les plus modestes consacrent une part près de deux plus importante de leur revenu à la TVA que les 10% les plus riches, selon l'Insee. Une hausse de cette taxe indirecte aurait des effets plus marqués sur leur niveau de vie.

La hausse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) frappe d'abord les familles les plus modestes et renforce les inégalités. C'est ce qui ressort d'un article de recherche de la revue Économie et Statistiqu­es dévoilée ce mardi 6 avril. Avec l'explosion de l'endettemen­t et la perspectiv­e de la présidenti­elle en 2022, les débats et propositio­ns relatives à la fiscalité se multiplien­t. En Allemagne, le gouverneme­nt a baissé la TVA en 2020 pour relancer la demande domestique et le pouvoir d'achat après le choc de la pandémie. Depuis janvier dernier, le taux de TVA a enregistré une nouvelle hausse outre-Rhin pour retrouver ses niveaux usuels. Dans leurs travaux, les statistici­ens ont étudié les effets d'une hausse de cette taxe sur la consommati­on en fonction de la catégorie des ménages. Sans surprise, comme pour la plupart des impôts indirects, cette fiscalité pèse bien plus, en proportion, sur le budget des foyers les plus pauvres.

"La TVA, rapportée aux revenus, est anti?redistribu­tive : le taux d'effort en TVA décroît avec le niveau de vie. Si les estimation­s des taux d'effort en TVA selon le niveau de vie diffèrent légèrement en fonction des données mobilisées, des méthodes de calcul et des années considérée­s, le constat est toujours le même : les individus les plus modestes consacrent une part plus importante de leurs revenus à la TVA que les individus les plus aisés."

> Lire aussi : "La fiscalité indirecte devrait amputer le pouvoir d'achat de 5 milliards"

UN IMPÔT PARTICULIÈ­REMENT RÉGRESSIF

Depuis sa mise en place en 1954, la taxe sur la valeur ajoutée a subi différente­s réformes et hausses de taux. La dernière en date remonte à 2014 sous le mandat de François Hollande. Le taux intermédia­ire est passé de 7% à 10% et le taux normal a légèrement augmenté pour passer de 19,6% à 20%. Les recettes fiscales issues de la TVA représente­nt environ 6,9% du produit intérieur brut (PIB) en France comme en Allemagne. Il s'agit d'un ratio très proche de la moyenne des pays de l'OCDE (6,8%).

En moyenne, une hausse de cette fiscalité peut entraîner une baisse du niveau de vie de 0,6% par unité de consommati­on (un adulte par foyer et 0,5 U.C pour un enfant de plus de 14 ans). Cela représente en moyenne 114 euros en moins chaque année.

Sans surprise, cet impôt, qui frappe l'ensemble des ménages, est particuliè­rement régressif. D'après les simulation­s opérées par l'organisme de statistiqu­es, la baisse "est plus prononcée pour les 10% des personnes les plus modestes : leur niveau de vie corrigé diminue de 1,8 % contre au plus 0,7 % pour le reste de la population".

En outre, la plupart des indicateur­s d'inégalité et de pauvreté se détérioren­t dès l'instaurati­on de la hausse de la TVA: l'indice de Gini, les rapports interdécil­es, le taux de pauvreté et l'intensité de la pauvreté... tous augmentent. Ce phénomène s'explique en partie par une proportion plus importante du budget des foyers modestes consacrée aux produits de consommati­on soumis à une TVA à 20%.

UNE BAISSE DE LA TVA PAS TOUJOURS EFFICACE POUR RELANCER LA CONSOMMATI­ON

Mais la baisse de cette taxe sur la valeur ajoutée n'est pas toujours une bonne solution pour relancer la consommati­on. En effet, plusieurs travaux ont montré par exemple que la diminution de cette taxe dans le secteur de la restaurati­on à la fin des années 2000 n'avait pas forcément profité à l'ensemble des consommate­urs. Compte tenu de leur budget serré, les ménages les plus modestes ne peuvent pas se rendre aussi souvent au restaurant que les ménages les plus aisés.

> Lire aussi : TVA restaurati­on : les profession­nels ont eu gain de cause

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