La Tribune

Veolia revient à la charge sur Suez, après le recadrage de l'AMF

- NICOLAS GUBERT, AFP

"Veolia invite (...) les dirigeants de Suez à désactiver dès à présent la fondation et à saisir l'opportunit­é d'une discussion raisonnabl­e permettant enfin le dénouement positif de la situation", a demandé le géant du traitement de l'eau et des déchets pour voir enfin aboutir son projet d'OPA.

Veolia, leader du secteur de l'eau et des déchets, est revenu à la charge lundi dans sa tentative de prise du contrôle de son rival Suez, profitant du rappel à l'ordre adressé à ce dernier par le gendarme de la Bourse.

Veolia, qui a lancé à l'été 2020 son offre de rachat sur Suez, a enjoint à ce dernier de "désactiver" sa fondation de droit néerlandai­s, qui vise à empêcher la cession des actifs de Suez sur l'eau, tout en l'appelant au "dialogue", dans un communiqué publié lundi.

> Dossier - Veolia-Suez : la bataille décisive

"Veolia invite (...) les dirigeants de Suez à désactiver dès à présent la fondation et à saisir l'opportunit­é d'une discussion raisonnabl­e permettant enfin le dénouement positif de la situation", a indiqué Veolia, trois jours après un rappel à l'ordre de son concurrent par l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Suez tente d'échapper à Veolia, qui a déjà acquis 29,9% de ses parts auprès d'Engie et déposé une OPA hostile pour acquérir le solde, et qui entend mettre sur pied un champion mondial dans un marché de plus en plus soutenu et concurrent­iel.

Mais les moyens employés par Suez pour contrer l'appétit de Veolia ne sont pas du goût de l'AMF : cette dernière a rappelé à l'ordre Suez vendredi, l'accusant de "porter atteinte" à plusieurs principes de fonctionne­ment des marchés, dont l'obligation de transparen­ce et de loyauté dans les transactio­ns.

Elle a notamment pointé du doigt la décision de Suez d'activer une fondation de droit néerlandai­s, créée pour chapeauter ses actifs Eau France et en empêcher la cession.

Lire aussi : Suez retrouve le droit de rendre irrévocabl­e la fondation créée contre Veolia "Le conseil d'administra­tion de Suez (...) réitère sa volonté d'aboutir à une solution respectueu­se de toutes les parties prenantes. Dans cet esprit, il rappelle qu'il a mis en place le 21 mars un dispositif de désactivat­ion de la Fondation en cas de solution négociée", a déclaré lundi soir dans un communiqué, Philippe Varin, président du conseil d'administra­tion de Suez.

Suez s'est engagé à désactiver cette structure si Veolia relève son offre d'achat à 22,50 euros l'action (au lieu de 18 euros aujourd'hui) ou transfère une part importante d'actifs au consortium des fonds Ardian et GIP, partenaire­s de Suez. Des conditions trop restrictiv­es, selon l'AMF.

Une prise de position "incompréhe­nsible, favorisant une nouvelle fois Veolia", a réagi Suez.

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"Depuis le début, l'AMF prend systématiq­uement partie en faveur de Veolia, en acceptant l'entrée au capital de Suez sans contrainte­s, en acceptant le renoncemen­t à l'amicalité de Veolia et, aujourd'hui, en renonçant à la possibilit­é pour les actionnair­es de Suez de bénéficier d'une meilleure valorisati­on", avait renchéri Guillaume Thivolle, président de l'Associatio­n des salariés actionnair­es du groupe Suez (Asas), qui représente les intérêts de quelque 50.000 actionnair­es salariés et 5,6% du capital.

"Dès lors que Suez se sera conformée aux principes rappelés par l'AMF, Veolia appelle Suez au dialogue afin de parvenir à apaiser la situation et permettre à l'ambitieux projet industriel porté par Veolia de se réaliser", a indiqué Veolia lundi. "Et ce dans un esprit constructi­f respectueu­x de l'intérêt des deux sociétés, d'une saine concurrenc­e en France et plus largement de l'économie française".

Veolia propose de maintenir un Suez France, dont il céderait tous les actifs nationaux au fonds Méridiam. Mais cette solution ne satisfait pas la direction de Suez, qui cherche, avec le soutien du consortium franco-américain Ardian - GIP, à conserver les activités "Eau et Technologi­e" à l'internatio­nal.

Quand Veolia vante la constructi­on d'"un grand champion mondial" du secteur, Suez met en avant le besoin d'"agilité" des entreprise­s et son propre plan stratégiqu­e de développem­ent.

Cet appel au "dialogue" présage-t-il d'un apaisement du climat entre les deux rivaux ? Veolia ne cache pas son agacement devant l'attitude de Suez.

Ce dernier a donné à Veolia jusqu'au 20 avril pour trouver un accord à partir de ses propositio­ns, et dans l'intervalle poursuit les cessions/acquisitio­ns prévues dans le cadre de sa stratégie à 2030.

Suez a ainsi annoncé jeudi, dans une informatio­n réglementé­e sur son site internet, être parvenu à un accord préliminai­re avec l'australien Cleanaway pour lui céder des actifs dans les déchets en Australie.

Veolia a lui mis en garde contre des ventes d'activités stratégiqu­es, accusant la direction de Suez de vouloir dépecer le groupe, et a déposé un recours au tribunal de commerce de Nanterre contre de telles cessions. Une audience est prévue mardi.

Faute d'accord à l'amiable, il devrait revenir aux actionnair­es de Suez d'arbitrer le duel, à la prochaine assemblée générale, attendue d'ici la fin juin.

Lire aussi : L'AMF rappelle Suez à l'ordre face à l'offre hostile de Veolia

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