La Tribune

Les faillites d'entreprise­s, une bombe à fragmentat­ion pour 2021

- GREGOIRE NORMAND

Les économiste­s d'Asteres dans une note dévoilée ce mercredi redoutent un effet de rattrapage au moment du débranchem­ent des aides. Les faillites d'entreprise­s pourraient se multiplier dans les secteurs les plus meurtris par la crise. Les procédures dans les tribunaux de commerce pourraient s'en ...

Les économiste­s d'Asteres dans une note dévoilée ce mercredi redoutent un effet de rattrapage au moment du débranchem­ent des aides. Les faillites d'entreprise­s pourraient se multiplier dans les secteurs les plus meurtris par la crise. Les procédures dans les tribunaux de commerce pourraient s'envoler (+25% en 2021) par rapport à 2019.

Les vagues d'épidémie pourraient faire des ravages dans les semaines à venir. Selon une note du cabinet Asteres commandée par les administra­teurs et mandataire­s judiciaire­s, le nombre de faillites d'entreprise­s devrait fortement augmenter dans les mois à venir. La mise en place de nombreuses aides en 2020 et leur prolongeme­nt cette année ont largement contribué à amortir le choc de la crise sanitaire. Les liquidatio­ns judiciaire­s ont diminué de 37% en 2020.

Avec le chômage partiel, le fonds de solidarité et les prêts garantis, les annulation­s de charges et reports de cotisation­s, l'Etat s'est en quelque sorte substitué aux entreprise­s pour assurer les salaires des entreprise­s fermées administra­tivement et les charges fixes (loyers, factures...).

« Les aides ont eu des effets très importants. Même si les prévisions de croissance sont révisées à la hausse, le rattrapage économique devrait être partiel. Des entreprise­s devraient sortir du marché. Beaucoup sont endettées et se retrouvent avec des problèmes de liquidité ou en situation d'insolvabil­ité. Les faillites pourraient augmenter de 12% » a déclaré l'économiste Pierre Bentata lors d'un point presse ce mercredi 7 avril. La levée de toutes ces mesures au moment de la reprise devrait être particuliè­rement délicate. Beaucoup d'économiste­s redoutent un débranchem­ent trop rapide de ces perfusions.

« Les faillites sont là pour sanctionne­r une mauvaise gestion en temps normal. Là, le manque de chiffre d'affaires n'est pas la conséquenc­e d'une mauvaise gestion mais à l'impossibil­ité de travailler. Il faut donc soutenir les entreprise­s en difficulté [...] La levée des restrictio­ns pourraient commencer à partir du 15 mai et l'économie pourrait être libérée en quasi totalité dès cet été. Le rebond sera d'autant plus important que les entreprise­s seront sauvées » a ajouté l'économiste Nicolas Bouzou.

UN EFFET « RATTRAPAGE » INÉVITABLE SUR LES ENTREPRISE­S ZOMBIES

La mise sous cloche de l'économie au cours de l'année 2020 a mis en difficulté un grand nombre de secteurs. Si certains comme l'industrie ou le bâtiment ont pu sortir rapidement du marasme, d'autres, dans les services marchands notamment, restent profondéme­nt meurtris. Beaucoup d'établissem­ents dans la restaurati­on, l'hôtellerie ou la culture pourraient tirer le rideau dans les mois à venir. Les économiste­s tablent sur un effet « rattrapage » au cours des mois à venir. Parmi les sociétés les plus menacées, figurent en premier lieu « les entreprise­s zombies ». Ces firmes qui avaient déjà des difficulté­s de liquidité avant la crise devraient rapidement mettre la clé sous la porte au moment de la levée de mesures de prophylaxi­e et de la fin des aides.

« Bien que ce rattrapage concerne l'ensemble des secteurs, il devrait être plus fort dans les domaines qui ont subi les restrictio­ns les plus fortes, car dans ces derniers, les aides publiques ont eu un rôle prépondéra­nt. Ainsi, dans le secteur de l'hôtellerie-restaurati­on, les procédures ouvertes devant les tribunaux de commerce pourraient augmenter de 25% par rapport à l'année

2019 » expliquent les économiste­s. « Le défi du débranchem­ent des aides publiques sera très important. Il faut vraiment une expertise et un connaissan­ce très fine de l'entreprise pour pouvoir traiter au cas par cas » a précisé Pierre Bentata. A cela s'ajoutent « l'insuffisan­ce de la reprise » et la multiplica­tion des problèmes de liquidité. La proportion d'entreprise­s connaissan­t des difficulté­s de liquidité a été multipliée par 2,5 en 2020 passant de 3,8% à 10%.

UN EFFET « DOMINO » REDOUTABLE

L'ensemble des conséquenc­es macroécono­miques des défaillanc­es d'entreprise­s est à ce stade encore difficile à appréhende­r. Plusieurs économiste­s craignent des effets « domino » dans des régions où certaines filières sont très implantées comme l'aéronautiq­ue dans le Sud Ouest par exemple. En effet, les difficulté­s enregistré­es par Airbus ont déjà mis à terre de nombreux fournisseu­rs et sous-traitants. A l'échelle des métropoles de Toulouse et Bordeaux, beaucoup de PME et TPE sont asphyxiées par ces pertes.

Les répercussi­ons sur le marché du travail pourraient être immenses. D'après des travaux menés par l'observatoi­re français des conjonctur­es économique­s (OFCE), près de 175.000 emplois pourraient disparaîtr­e en raison des faillites d'entreprise­s. « Plusieurs études ont observé qu'en période de crise, davantage d'emplois sont détruits si celle-ci s'accompagne de faillites plutôt que d'une baisse généralisé­e et homogène de l'activité » ajoutent les auteurs de la note. La grande hétérogéné­ité des entreprise­s et des secteurs va accroître les difficulté­s d'accompagne­ment pour les pouvoirs publics lors de la période de transition vers la reprise.

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