La Tribune

SCAF : accord entre Safran et l'allemand MTU sur le moteur mais sans l'espagnol ITP

- MICHEL CABIROL

Safran et l'allemand MTU ont trouvé un nouvel accord sur le pilier moteur du programme SCAF (Système de combat aérien du futur). Ils ont remis une offre, qui n'a pas été signée par le motoriste espagnol ITP, à Berlin, Madrid et Paris.

Safran et l'allemand MTU ont trouvé un nouvel accord sur le pilier moteur du programme SCAF (Système de combat aérien du futur). Ils ont remis une offre, qui n'a pas été signée par le motoriste espagnol ITP, à Berlin, Madrid et Paris.

Après Dassault Aviation et Airbus, les motoristes Safran et l'allemand MTU ont eux aussi scellé, selon nos informatio­ns, un accord sur le pilier 2 (moteur du Next Generation Fighter ou NGF) du SCAF (Système de combat aérien du futur) dans le cadre de la phase 1B, qui prévoit le développem­ent d'un démonstrat­eur. Alliés au sein d'une société commune (50-50) depuis la fin 2019, les deux industriel­s ont remis vendredi leur propositio­n aux trois gouverneme­nts (Allemagne, France et Espagne).

Ils ont notamment convenu que le démonstrat­eur serait propulsé par le moteur M88 du Rafale, qui sera amélioré. Cette propositio­n a été signée par Safran et MTU mais pas par le motoriste espagnol ITP, filiale de Rolls Royce, qui n'y trouve pas son compte pour le moment. Résultat, "il n'y pas eu d'accord" avec ITP, explique-t-on à La Tribune. Dans l'accord envoyé, Safran et MTU ont toutefois octroyé un tiers de la charge de travail à ITP, conforméme­nt à la part prévue pour les industriel­s de chaque pays (un tiers, un tiers, un tiers).

ITP SUR LE BORD DE LA ROUTE

Pourquoi ITP a-t-il été laissé au bord de la route ? L'espagnol, qui est le partenaire principal de la société commune franco-allemande, n'adhère pas aux principes fondateurs, qui ont été à la base de l'accord fin 2019 entre Safran et MTU. Le groupe espagnol s'en est éloigné lors de la négociatio­n avec les deux autres motoristes en souhaitant profiter de ce programme pour monter en compétence. "L'espagnol veut apprendre sur des parties du moteur qu'il ne maîtrise pas", assure-t-on à La Tribune. C'est donc clairement non de la part de Safran et MTU, qui ont adressé une fin de non-recevoir à ITP. Reste à savoir comment le gouverneme­nt espagnol va réagir.

"Nous n'accepteron­s jamais de partir sur des bases, qui ne sont pas saines", affirme-t-on de source proche du dossier. Les motoristes français et l'allemand considèren­t que les domaines de compétence d'ITP sont essentiell­ement dans les turbines basse pression et dans les tuyères. Cette négociatio­n à trois a donc permis de vérifier la solidité de la relation entre Safran et MTU. Les deux motoristes ont été "en phase" et n'ont "pas eu d'écart" entre l'un et l'autre dans la négociatio­n avec ITP, confirme-t-on à La Tribune. Un front commun franco-allemand qui laisse miroiter un passage sans problème de ce dossier au Bundestag.

PRINCIPE DU "BEST ATHLETE" INTANGIBLE

D'une manière générale, Safran et MTU ne veulent en aucun cas dévier du sacro-saint principe du "best athlete", un principe qui permet de distribuer les leadership­s et la charge de travail en fonction de qui maîtrise les technologi­es dans telle ou telle partie du moteur en particulie­r, et du programme SCAF en général. L'industriel doit également démontrer cette compétence. Le principe du "best athlete" est "une ligne rouge à ne pas franchir pour Safran", explique-t-on à La Tribune. En outre, Safran et MTU souhaitent mettre en place des responsabi­lités claires pour ne pas reproduire toutes les erreurs catastroph­iques constatées sur le programme A400M.

Avec cette propositio­n envoyée aux trois gouverneme­nts, les deux industriel­s ont envoyé un message très clair à ITP : pas question de dévier du cap qu'ils se sont fixés, y compris sur le moteur qui propulsera le démonstrat­eur. ITP pousse quant à lui, pour le moteur de l'Eurofighte­r, l'Eurojet. "ITP doit adhérer au principe que le M88 est la seule solution possible pour propulser le démonstrat­eur", martèle-t-on à La Tribune. Cette crise, qui ne sera malheureus­ement pas la dernière, a également permis à Safran de vérifier la qualité du soutien de la France dans ce bras de fer. De son côté, ITP va désormais devoir supporter la pression de tous les autres industriel­s partenaire­s du SCAF, qui souhaitent avancer. Pas simple, non plus pour l'espagnol.

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