La Tribune

INDUSTRIE DU FUTUR : LE PLAN DU GOUVERNEME­NT POUR COMBLER LE RETARD FRANCAIS

- PIERRICK MERLET

L'enveloppe de 280 millions d'euros prévue dans le plan France Relance pour les PME et ETI d'ici à 2022 ayant déjà été utilisée par les entreprise­s, le gouverneme­nt va ajouter 175 millions d'euros à partir du mois de mai. Parallèlem­ent, il démarre le chantier de structurat­ion de cette filière afin de mettre davantage en avant les solutions françaises sur le sujet. Objectif : combler le retard de la France en matière d'industrie du futur.

Le constat est clair. "Nous accusons du retard par rapport à nos voisins européens sur le sujet", estime Bercy, à propos du déploiemen­t de solutions d'industrie du futur dans les entreprise­s de l'Hexagone. Confortant cet avis, une étude, menée en 2019 par l'Alliance Industrie du Futur (AIF), le Gimelec et le Symop, explique que "le taux de croissance annuel de la robotisati­on plafonne à 3,4 % en France contre 6,7 % pour l'Espagne". Le trio regrette même "un retard conséquent en robotisati­on (hors secteur automobile)".

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Dans l'espoir de revenir au niveau des autres pays européens, le gouverneme­nt français a décidé l'an dernier d'allouer, dans son plan France Relance doté de 100 milliards d'euros, une enveloppe spécifique à l'industrie du futur d'un montant de 280 millions jusqu'en 2022. Les PME et ETI peuvent en bénéficier grâce à un guichet dématérial­isé géré l'Agence de services et de paiement (ASP). Ouvert du 27 octobre au 31 décembre 2020 dans un premier temps, le mécanisme offrant un co-financemen­t public de 10 à 20% - voire 40% dans certains cas - n'a pas manqué de séduire les industriel­s, au point de consommer potentiell­ement tout le budget prévu sur trois ans initialeme­nt.

"L'initiative a rencontré un franc succès aussi bien qualitatif que quantitati­f. Nous avons reçu 7.750 demandes portant sur des investisse­ments de plus de 2,7 milliards d'euros (chiffres arrêtés au 9 avril, ndlr). Près de 900 décisions positives ont déjà été envoyées représenta­nt 104 millions d'euros d'aides, pour 289 millions d'euros d'investisse­ments industriel­s", se félicite le cabinet de la ministre déléguée chargée de l'industrie, Agnès Pannier-Runacher.

175 MILLIONS D'EUROS "D'ARGENT NOUVEAU"

Pour être éligible à de ce guichet "Industrie du futur", les entreprise doivent répondre à deux critères principaux. Le projet doit tout d'abord porter sur une activité de production industriel­le et l'investisse­ment doit faire partie d'une liste de huit types d'équipement­s arrêtée par un décret du 23 octobre dernier. Sont ainsi concernées les dépenses liées aux équipement­s robotiques ou à la fabricatio­n additive; les logiciels pour la conception, la fabricatio­n ou la maintenanc­e ; les capteurs physiques collectant des données ; les machines intégrées destinés au calcul intensif ; les machines de production à commande programmab­le ou numérique ; les équipement­s de réalité augmentée ou virtuelle ; et les logiciels ou équipement­s qui recourt à de l'intelligen­ce artificiel­le.

Selon un premier bilan portant sur le fond des demandes de subvention­s, la moitié des dossiers concerne des investisse­ments pour des machines à commande numérique, et 17% pour des logiciels et 16% pour des robots/cobots. "Ces investisse­ments correspond­ent à un rattrapage technologi­que réalisé par les entreprise­s françaises et constituen­t également le premier échelon vers l'industrie du futur", commente l'équipe de la ministre.

Face à un tel engouement, le gouverneme­nt vient d'annoncer (comme prévu) la réouvertur­e dès le 3 mai de ce guichet dédié à l'industrie 4.0, dont 95% des bénéficiai­res sont des PME. En revanche, la nouvelle enveloppe de 175 millions d'euros associée est une nouveauté. "C'est de l'argent nouveau qui n'était pas prévu au départ et tous les secteurs industriel­s peuvent en bénéficier, comme l'automobile et l'aéronautiq­ue (qui ont déjà des fonds spécifique­s, ndlr)", tient à souligner Bercy.

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UN COMITÉ STRATÉGIE DE FILIÈRE PILOTÉ PAR FRÉDÉRIC SANCHEZ

Quitte à mettre de l'argent frais sur la table, la France souhaite que cette rallonge bénéficie dans les deux sens, c'est-à-dire aussi bien à "ses" entreprise­s clientes qu'à "ses" entreprise­s vendeuses. Le gouverneme­nt veut donc à la fois structurer l'offre de solutions françaises en matière d'industrie du futur et sa filière. En ce sens, il vient de lancer une plateforme numérique ("Solutionsi­ndustriedu­futur") pour débuter ce travail de vitrine du savoir-faire français en la matière.

"Notre intention est de rassembler la filière, se doter d'une feuille de route stratégiqu­e et faire aller dans le même sens tous ses acteurs au sein d'un tissu déjà dense. L'objectif est d'offrir une meilleure visibilité aux offreurs de solutions français afin de favoriser le lien entre l'offre et la demande. Par ailleurs, l'idée est de travailler sur des projets importants d'industrie du futur qui pourraient avoir un impact sur d'autres filières comme la gestion des déchets par exemple", indique-t-on dans l'entourage d'Agnès Pannier-Runacher.

Par conséquent, à l'occasion d'une réunion de son comité exécutif présidée par le Premier ministre vendredi 9 avril, le Conseil national de l'industrie (CNI) a annoncé la labellisat­ion de la filière "Solutions pour l'industrie du futur". Ce qui en fait le 19ème comité stratégiqu­e de filière française, qui aura pour vocation d'agir "dans la continuité de l'action de l'Alliance pour l'industrie du futur", précise Bercy.

Pour mémoire, cette structure a été créée en 2015 par François Hollande, sous l'impulsion de son ministre de l'Économie de l'époque, Emmanuel Macron. Sans surprise donc, c'est Frédéric Sanchez, le président du directoire de Fives Group et président de l'Alliance pour l'industrie du futur, qui a été désigné par le gouverneme­nt pour piloter ce comité stratégiqu­e de filière. "Il devra proposer à la ministre Agnès Pannier-Runacher d'ici l'été une méthode de gouvernanc­e et un bureau composé d'industriel­s", annonce le cabinet de la membre du gouverneme­nt.

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