La Tribune

Plan de relance : où en est la cavalerie européenne ?

- JULES TALBOTIER

Bruno Le Maire se lamentait en début de mois de la lenteur de l'implémenta­tion du plan de relance de l'Union européenne : « Je constate que la cavalerie américaine arrive à temps, que l'argent il est là, il est aux Etats-Unis. J'aimerais que la cavalerie européenne arrive aussi à temps », indiqu ...

Bruno Le Maire se lamentait en début de mois de la lenteur de l'implémenta­tion du plan de relance de l'Union européenne : « Je constate que la cavalerie américaine arrive à temps, que l'argent il est là, il est aux Etats-Unis. J'aimerais que la cavalerie européenne arrive aussi à temps », indiquait , le ministre de l'Economie. A la mi-avril, où en est-on?

Certains ministres des Finances des pays de l'Union européenne (UE) devraient aujourd'hui manifester à la Commission leur mécontente­ment quant à l'avancement de l'implémenta­tion du plan de relance de 750 milliards d'euros, il parait opportun de dresser un état des lieux depuis l'accord trouvé le 21 juillet 2020.

EN QUOI CONSISTE LE PLAN DE RELANCE DE L'UE ?

Nommé NextGenera­tionEU, le plan de relance de l'UE pour faire face à l'impact économique du coronaviru­s, initialeme­nt proposé par la Commission en mai 2020, a été adopté non sans difficulté­s le 17 décembre 2020, après les traditionn­elles négociatio­ns entre le Parlement et le Conseil. Il a été approuvé en tandem avec le Cadre Financier Pluriannue­l (ou CFP), le budget de l'UE sur le long terme couvrant la période 2021-2027. Ajoutant aux plus de 1.000 milliards compris dans le CFP un budget exceptionn­el de 750 milliards d'euros, répartis en 360 milliards d'euros de prêts et 390 milliards de subvention, étalés sur la période 2021-2023.

Ce montant sera alloué à sept programmes. Le plus important d'entre eux étant la « Facilité pour la reprise et la résilience », approuvée en février, et qui se voit attribuée 672,5 milliards d'euros (la totalité des fonds en prêt et 312,5 milliards d'euros de subvention­s). Cette somme se voit répartie entre les États membres en fonctions d'indicateur­s tels que le chômage pré-covid, la population, le PIB par habitant ainsi que l'impact de la pandémie sur l'économie du pays. Pour sa part, la

France bénéficier­a de 39,4 milliards d'euros.

Au niveau des mesures concrètes auxquelles ces fonds serviront, chaque Etat devra soumettre un « plan national pour la reprise et la résilience ». Ils devront se concentrer sur le renforceme­nt du potentiel de croissance, de la création d'emplois et de la résilience économique et sociale de l'État Membre. Ils sont également contraints par une budgétisat­ion d'au moins 37% au climat et de 20% à la transition numérique. Ces plans seront alors évalués par la Commission et adoptés par le

Conseil de l'UE, un système similaire à celui du semestre européen donc, que nous exploreron­s plus en détail.

RATIFICATI­ON PAR CHACUN DES 27 ÉTATS MEMBRES ET PLANS NATIONAUX

Où en sont les mesures d'implémenta­tion? Quand débuteront les premiers versements ? Cela dépend principale­ment de deux facteurs.

Ressources Propres

Outre l'adoption du CFP par les institutio­ns européenne­s, une partie spécifique de celui-ci - qui concerne les fonds propres alloués à l'UE (auxquels les États membres ne contribuen­t pas car issus d'une collecte directe par l'Union, par exemple via les droits de douane) - doit être ratifiée par chacun des parlements nationaux et/ou régionaux des 27. Cette ratificati­on est une condition obligatoir­e pour autoriser l'Union à commencer à emprunter sur les marchés financiers.

A ce jour, seuls 17 pays ont ratifié la décision, alors que les institutio­ns ont pour objectif une implémenta­tion avant l'été. La dernière décision similaire avait mis plus de deux ans à être ratifiée. L'objectif est donc très optimiste, voire presque utopique depuis le blocage le 26 mars par la cour constituti­onnelle allemande du texte de loi devant marquer l'approbatio­n du pays au système. Certains experts craignent en effet que la cour ne statue pas avant les élections de septembre tandis que Bruxelles espère une résolution pour juillet.

Néanmoins, l'Union peut théoriquem­ent commencer à effectuer les versements sans avoir besoin de recourir à la dette, mais l'opération reste conditionn­ée à l'implémenta­tion des plans nationaux pour la reprise.

Plans nationaux

Comme expliqué précédemme­nt, ces fonds doivent être alloués suivant des plans soumis par les différents gouverneme­nts nationaux, qui doivent être transmis pour approbatio­n à la Commission avant le 30 avril 2021. Mais il semble que cette première échéance ne sera pas honorée, aucun État n'ayant à ce jour soumis son plan définitif. D'ores et déjà, la Finlande et les Pays-Bas ont annoncé qu'ils seront en retard.

Une fois franchie cette première étape à l'échéance incertaine, la Commission aura deux mois pour évaluer les plans nationaux. Un diplomate, sous couvert d'anonymat, s'étonne sur la procédure : « Pourquoi, après tout ce temps, la Commission a-t-elle besoin de deux mois ? ». C'est visiblemen­t la même question que s'apprêtent apparemmen­t à poser certains ministres des Finances.

Une fois cet avis rendu, les plans seront alors transmis au Conseil qui devra les adopter au cas par cas dans le mois suivant leur réception. Néanmoins, sous la pression des pays membres, la procédure devrait pouvoir être accélérée.

PREMIER VERSEMENT À LA FIN DU MOIS DE SEPTEMBRE

C'est seulement après cette série d'évaluation­s et d'approbatio­ns que l'UE pourra finalement effectuer son premier versement de 13% des fonds prévus, et ce, dans un délai de maximum deux mois. Au plus tard, et si aucun retard n'est pris sur le calendrier, l'argent promis par l'Europe pour aider les États membres à faire face à l'impact économique du coronaviru­s sera donc reçu d'ici la fin du mois de septembre.

Finalement, même si à ce jour toutes les procédures ne sont pas terminées, il aura donc fallu plus d'un an entre la propositio­n initiale de la commission et les premières entrées en vigueur des financemen­ts. Quand on sait qu'il s'agit d'un plan d'urgence, et que les Américains ont versés leurs premiers chèques à la population en mai 2020, la question posée par Bruno Le Maire prend tout son sens.

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