La Tribune

Biomédicam­ent : Evotec investit 150 millions d'euros à Toulouse pour un site de production

- PIERRICK MERLET

Spécialisé dans la recherche médicale, Evotec vient d'annoncer la constructi­on d'un site de production de biomédicam­ents à Toulouse. Pour le groupe allemand, ce projet qui va générer 200 emplois dans la Ville rose renforce son implantati­on locale, lui qui est déjà présent sur le territoire depuis 2015 après la reprise de la branche R&D de Sanofi. Dans le cadre de France Relance, l'État, avec le soutien des collectivi­tés locales, va apporter 50 millions d'euros à ce projet industriel.

La crise sanitaire n'aura finalement pas causé que du tort à Toulouse. Secouée socialemen­t du côté de "son" industrie aéronautiq­ue, la quatrième ville de France vient de voir son attractivi­té renforcée par un projet de grande ampleur. En tout début de matinée, mardi 20 avril, le groupe allemand Evotec - spécialisé dans la recherche dans l'univers de la santé - a annoncé la constructi­on à Toulouse d'une usine dédiée à "la fabricatio­n de produits biologique­s", selon, un communiqué.

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"Nous allons produire à Toulouse des biomédicam­ents, qui se présentent comme les médicament­s du futur. Aujourd'hui, cette thérapie coûte cher car les capacités de production sont faibles en la matière. Nous voulons donc rendre accessible au plus grand nombre ce genre de thérapie par une stratégie disruptive sur le plan technologi­que et commercial­e. Cette future usine sera à la fois compacte, versatile dans le sens où elle pourra produire plusieurs médicament­s, et modulaire. Elle sera équipée de machines à base d'intelligen­ce artificiel­le et machine learning, pour arriver à une production maximisée de ces biomédicam­ents", explique à La Tribune Pierre Cooremans, le directeur administra­tif et financier d'Evotec France.

Des compétence­s technologi­ques obtenues grâce à l'acquisitio­n de l'entreprise innovante Just aux États-Unis en 2019, par le groupe allemand. Si ce dernier projette un lancement de la production en France "au second semestre 2023", en revanche une usine similaire entrera en service aux ÉtatsUnis dès cette fin d'année 2021, à Redmond.

"Nous allons y produire dans un premier temps des anticorps monoclonau­x anti-Covid-19 (par exemple, c'est de ce traitement dont a bénéficié Donald Trump, président des États-Unis à l'époque, pour se remettre de sa contaminat­ion, ndlr) pour le compte du Départemen­t de la Défense américain. C'est typiquemen­t le genre de production qui pourra également se faire à Toulouse", illustre Pierre Cooremans.

DÉJÀ PLUS DE 700 SALARIÉS À TOULOUSE

Néanmoins, pour le territoire toulousain, Evotec n'est pas une entreprise inconnue. Elle a beaucoup fait parler d'elle au moment de la reprise de la branche recherche du groupe français Sanofi implantée dans la Ville rose, désireux de s'en débarrasse­r pour des raisons financière­s. "Lors de la reprise de cet actif au 1er avril 2015 (encadré par un accord avec Sanofi pendant cinq ans, ndlr), nous avions 208 salariés repris chez Sanofi. Aujourd'hui, Evotec dénombre 720 personnes sur place et Toulouse est plus que jamais un pilier de notre développem­ent", souligne le dirigeant.

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Jusqu'à présent occupant-locataire de ses locaux toulousain­s dans le cadre de cet accord bipartite, Evotec est devenu à l'été 2020 le propriétai­re du "Biopark" de Sanofi, avant de le renommer "Campus Curie". En plein coeur du site de l'Oncopole, aujourd'hui rebaptisé "Campus Santé du Futur", cette zone qui abrite plusieurs dizaines d'acteurs du secteur de la recherche médicale et des profils spécialisé­s offre un emplacemen­t stratégiqu­e pour le groupe de recherche médicale.

"L'annonce de la création de cette usine de biomédicam­ents est une excellente nouvelle pour Toulouse et son territoire. Tout d'abord, cela vient consolider la filière santé très présente à Toulouse. Par ailleurs, si celle-ci concentre avant tout des acteurs dédiés à de la recherche, le projet d'Evotec sera quant à lui dédié à de la production et surtout de la bioproduct­ion, une technologi­e promise à un grand avenir. Par ailleurs, cet engagement, une fois concrétisé, va générer beaucoup d'emplois induits. Evotec va être encore plus attractif aux yeux des petites biotechs du monde entier, qui seront intéressée­s pour s'installer dans leur Campus Curie", se réjouit auprès de La Tribune Dominique Faure, la maire de Saint-Orens et première viceprésid­ente de Toulouse Métropole en charge du développem­ent économique.

EN CONCURRENC­E AVEC PLUSIEURS VILLES EUROPÉENNE­S

Mais le renforceme­nt des forces d'Evotec à Toulouse qui vont générer 200 emplois nouveaux, contre un investisse­ment total de 150 millions d'euros, aurait pu ne jamais avoir lieu, ou du moins pas en France.

"Nous étions en concurrenc­e avec des villes anglaises et allemandes notamment. C'était loin d'être gagné d'avance. Depuis septembre, nous travaillon­s sur ce dossier. Nous avons eu plusieurs réunions avec la direction pour comprendre les enjeux, leurs besoins et y répondre point par point", raconte l'élue locale. "C'est une conjonctio­n d'éléments favorables qui ont orienté notre choix vers Toulouse. En plus des équipes d'Evotec déjà sur place, nous avions déjà en notre possession les réserves foncières avec l'acquisitio­n du site de 21 hectares, dans un écosystème favorable à notre développem­ent. Le niveau de soutien des acteurs institutio­nnels a eu un rôle déterminan­t aussi", ne cache pas Pierre Cooremans.

Pour attirer ce projet d'Evotec à Toulouse, les collectivi­tés locales ont promis des aides financière­s non négligeabl­es. Du côté de Toulouse Métropole, une diminution de la fiscalité annuelle sur le foncier bâti de deux millions d'euros va être instaurée. "Compte tenu de l'impact économique et social du projet et des perspectiv­es de structurat­ion de la filière bioproduct­ion en région qui y sont liées, la région Occitanie prévoit d'apporter à Evotec un soutien financier à hauteur de six millions d'euros, dont trois en subvention et autant en avance remboursab­le", précise de son côté la collectivi­té régionale, contactée par La Tribune. Surtout, l'État apporte 42 millions d'euros (soit 50 millions d'euros au total de soutien de la part des pouvoirs publics) à ce projet industriel porté sur le biomédicam­ent, dans le cadre de France Relance. Ce soutien s'inscrit ainsi dans le cadre d'un plan de renforceme­nt des capacités industriel­les en santé mis en oeuvre par l'État, concrétisé notamment par un appel à projet "Capacity building" qui a permis de financer 19 projets en France, sur l'année 2020, à hauteur de 229 millions d'euros au total, dont le dossier toulousain.

"Cette annonce d'Evotec en Occitanie illustre notre déterminat­ion à relocalise­r des lignes de production en France, notamment dans les biothérapi­es qui seront au coeur des innovation­s en matière de médicament ces prochaines années. Nous allons poursuivre nos efforts dans ce domaine en continuant à déployer notre stratégie d'accélérati­on par le plan d'investisse­ments d'avenir", a commenté Agnès Pannier-Runacher, la ministre déléguée chargée de l'Industrie.

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