La France lance enfin un plan d’urgence pour sauver les abeilles
Les ministères de la Transition écologique et de l’Agriculture lancent un plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation pour la période 2021-2026 et ont publié un arrêté renforçant la protection des abeilles. Ce plan “met les agriculteurs français en situation de distorsion de concurrence pour la protection de leurs cultures”, ont estimé la FNSEA et les Jeunes agriculteurs.
SOS urgence abeilles ! Constatant le déclin des pollinisateurs, notamment des abeilles, observé en France - une espèce d’abeille et de papillon sur dix est au bord de l’extinction, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature -, les ministères de la Transition écologique et de l’Agriculture ont annoncé dimanche le lancement d’un plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation pour la période 2021-2026 ainsi que la publication d’un arrêté renforçant la protection des abeilles.
Ce plan avait été promis en 2020 au moment où le gouvernement avait annoncé la réintroduction temporaire des insecticides néonicotinoïdes pour la culture de betteraves, des insecticides extrêmement nocifs pour les abeilles. Il est le fruit d’un équilibre entre sauver les insectes pollinisateurs et limiter les contraintes et les risques pour les activités agricoles. Un exercice difficile qui pourrait in fine ne satisfaire ni les agriculteurs, ni les défenseurs de la biodiversité. Mais le juge de paix pourrait être la publication de de listes rouges d’espèces particulièrement menacées en vue d’assurer une protection renforcée des insectes pollinisateurs sauvages. ”Il est essentiel d’objectiver leur déclin avec la publication” d’une telle liste, estiment les deux ministères.
La France lance enfin un plan d’urgence pour sauver les abeilles
”Les résultats de l’établissement des listes rouges sur le territoire national doivent en particulier conduire à une meilleure protection, y compris d’ordre réglementaire, à la fois des espèces d’insectes pollinisateurs et des habitats naturels qui leur sont favorables”.
Un arrêté réglementant l’utilisation des pesticides
Un plan qui comprend huit actions phares, dont l’une sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques (pesticides, biocides et antiparasitaires) en période de floraison en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs. ”Une telle révision doit permettre de renforcer et d’améliorer la protection des pollinisateurs lors de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, conformément aux recommandations de l’Anses et aux objectifs du plan national, tout en limitant les contraintes et les risques pour les activités agricoles”, ont expliqué les deux ministères. Selon l’arrêté publié dimanche au Journal officiel, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques autorisés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, (ANSES), doit être effectuée ”dans les deux heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les trois heures qui suivent le coucher du soleil”. L’arrêté prévoit des mesures transitoires et un calendrier de mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions.
Ce décret ne satisfait pas les apiculteurs, qui dénoncent la possibilité de traiter les cultures à des moments où les abeilles butinent. ”Deux heures avant le coucher du soleil, sans autre critère, pour nous ce n’est pas acceptable”, a déclaré à l’AFP Eric Lelong, président de l’Interprofession des apiculteurs (Interapi). L’organisation voulait que soit également pris en compte le critère de la température. Ainsi, en juillet, deux heures avant le coucher de soleil, ”il fait 25 degrés” et “les abeilles sont encore en train de butiner”. Il semble pourtant que ce point ait été pris en compte par l’arrêté : “cette période peut être adaptée ou supprimée, selon des modalités apportant des garanties équivalentes en matière d’exposition des abeilles et autres pollinisateurs. Ces modalités seront définies en annexe après avis de l’Anses, notamment en vue de permettre des traitements le matin ou sous un seuil de température”.
Surtransposition des règles communautaires
Les organisation agricoles (FNSEA et Jeunes agriculteurs) ”dénoncent” dans un communiqué ”la voie réglementaire” suivie par le gouvernement, qui ”une fois de plus, est celle de la surtransposition des règles communautaires”. ”L’instauration d’un processus franco-français d’évaluation des produits phytosanitaires, en anticipation par rapport au cadre européen, met les agriculteurs français en situation de distorsion de concurrence pour la protection de leurs cultures”, estiment-ils.
Les agriculteurs, qui ”partagent l’ambition de la préservation des pollinisateurs”, entendent “réaffirmer leur attachement à des réponses européennes et leur refus d’une logique de surtranspositions dangereuse pour l’agriculture française et sa souveraineté alimentaire”.
Ce plan prévoit notamment d’évaluer le risque de tous les pesticides, dont les herbicides et fongicides, pour les pollinisateurs en vue d’une possible restriction, voire interdiction de traitement sur les cultures attractives en floraison, aujourd’hui applicable uniquement aux insecticides. En outre, le plan de réduction des produits phytosanitaires et de sortie du glyphosate Écophyto II+ matérialise les engagements pris par le gouvernement et donne une nouvelle impulsion pour atteindre l’objectif de réduction de 50 % des usages de produits phytopharmaceutiques d’ici 2025. Un objectif étroitement lié à la préservation des insectes pollinisateurs.