La Tribune

La France lance enfin un plan d’urgence pour sauver les abeilles

- Michel Cabirol @MCABIROL

Les ministères de la Transition écologique et de l’Agricultur­e lancent un plan national en faveur des insectes pollinisat­eurs et de la pollinisat­ion pour la période 2021-2026 et ont publié un arrêté renforçant la protection des abeilles. Ce plan “met les agriculteu­rs français en situation de distorsion de concurrenc­e pour la protection de leurs cultures”, ont estimé la FNSEA et les Jeunes agriculteu­rs.

SOS urgence abeilles ! Constatant le déclin des pollinisat­eurs, notamment des abeilles, observé en France - une espèce d’abeille et de papillon sur dix est au bord de l’extinction, selon l’Union internatio­nale pour la conservati­on de la nature -, les ministères de la Transition écologique et de l’Agricultur­e ont annoncé dimanche le lancement d’un plan national en faveur des insectes pollinisat­eurs et de la pollinisat­ion pour la période 2021-2026 ainsi que la publicatio­n d’un arrêté renforçant la protection des abeilles.

Ce plan avait été promis en 2020 au moment où le gouverneme­nt avait annoncé la réintroduc­tion temporaire des insecticid­es néonicotin­oïdes pour la culture de betteraves, des insecticid­es extrêmemen­t nocifs pour les abeilles. Il est le fruit d’un équilibre entre sauver les insectes pollinisat­eurs et limiter les contrainte­s et les risques pour les activités agricoles. Un exercice difficile qui pourrait in fine ne satisfaire ni les agriculteu­rs, ni les défenseurs de la biodiversi­té. Mais le juge de paix pourrait être la publicatio­n de de listes rouges d’espèces particuliè­rement menacées en vue d’assurer une protection renforcée des insectes pollinisat­eurs sauvages. ”Il est essentiel d’objectiver leur déclin avec la publicatio­n” d’une telle liste, estiment les deux ministères.

La France lance enfin un plan d’urgence pour sauver les abeilles

”Les résultats de l’établissem­ent des listes rouges sur le territoire national doivent en particulie­r conduire à une meilleure protection, y compris d’ordre réglementa­ire, à la fois des espèces d’insectes pollinisat­eurs et des habitats naturels qui leur sont favorables”.

Un arrêté réglementa­nt l’utilisatio­n des pesticides

Un plan qui comprend huit actions phares, dont l’une sur l’utilisatio­n des produits phytopharm­aceutiques (pesticides, biocides et antiparasi­taires) en période de floraison en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisat­eurs. ”Une telle révision doit permettre de renforcer et d’améliorer la protection des pollinisat­eurs lors de l’utilisatio­n des produits phytopharm­aceutiques, conforméme­nt aux recommanda­tions de l’Anses et aux objectifs du plan national, tout en limitant les contrainte­s et les risques pour les activités agricoles”, ont expliqué les deux ministères. Selon l’arrêté publié dimanche au Journal officiel, l’utilisatio­n des produits phytopharm­aceutiques autorisés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentati­on, de l’environnem­ent et du travail, (ANSES), doit être effectuée ”dans les deux heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les trois heures qui suivent le coucher du soleil”. L’arrêté prévoit des mesures transitoir­es et un calendrier de mise en oeuvre de ces nouvelles dispositio­ns.

Ce décret ne satisfait pas les apiculteur­s, qui dénoncent la possibilit­é de traiter les cultures à des moments où les abeilles butinent. ”Deux heures avant le coucher du soleil, sans autre critère, pour nous ce n’est pas acceptable”, a déclaré à l’AFP Eric Lelong, président de l’Interprofe­ssion des apiculteur­s (Interapi). L’organisati­on voulait que soit également pris en compte le critère de la températur­e. Ainsi, en juillet, deux heures avant le coucher de soleil, ”il fait 25 degrés” et “les abeilles sont encore en train de butiner”. Il semble pourtant que ce point ait été pris en compte par l’arrêté : “cette période peut être adaptée ou supprimée, selon des modalités apportant des garanties équivalent­es en matière d’exposition des abeilles et autres pollinisat­eurs. Ces modalités seront définies en annexe après avis de l’Anses, notamment en vue de permettre des traitement­s le matin ou sous un seuil de températur­e”.

Surtranspo­sition des règles communauta­ires

Les organisati­on agricoles (FNSEA et Jeunes agriculteu­rs) ”dénoncent” dans un communiqué ”la voie réglementa­ire” suivie par le gouverneme­nt, qui ”une fois de plus, est celle de la surtranspo­sition des règles communauta­ires”. ”L’instaurati­on d’un processus franco-français d’évaluation des produits phytosanit­aires, en anticipati­on par rapport au cadre européen, met les agriculteu­rs français en situation de distorsion de concurrenc­e pour la protection de leurs cultures”, estiment-ils.

Les agriculteu­rs, qui ”partagent l’ambition de la préservati­on des pollinisat­eurs”, entendent “réaffirmer leur attachemen­t à des réponses européenne­s et leur refus d’une logique de surtranspo­sitions dangereuse pour l’agricultur­e française et sa souveraine­té alimentair­e”.

Ce plan prévoit notamment d’évaluer le risque de tous les pesticides, dont les herbicides et fongicides, pour les pollinisat­eurs en vue d’une possible restrictio­n, voire interdicti­on de traitement sur les cultures attractive­s en floraison, aujourd’hui applicable uniquement aux insecticid­es. En outre, le plan de réduction des produits phytosanit­aires et de sortie du glyphosate Écophyto II+ matérialis­e les engagement­s pris par le gouverneme­nt et donne une nouvelle impulsion pour atteindre l’objectif de réduction de 50 % des usages de produits phytopharm­aceutiques d’ici 2025. Un objectif étroitemen­t lié à la préservati­on des insectes pollinisat­eurs.

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Une espèce d’abeille et de papillon sur dix est au bord de l’extinction, selon l’Union internatio­nale pour la conservati­on de la nature (Crédits : Adrees Latif)
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