La Tribune

Studi lance l’Institut des SavoirFair­e et imagine une offre Netflix du digital-learning

- Marie-France Réveillard

En février, le leader français du e-learning choisissai­t le Sénégal pour s’implanter en Afrique grâce à son partenaria­t avec l’école de Commerce ISM. Studi, la petite entreprise; qui ne connaît pas la crise; voit grand et arrive avec une nouvelle offre de digital-learning sur un continent qui devra relever le défi de la formation pour atteindre le dividende démographi­que escompté.

Le continent africain est le plus jeune au monde. Selon les Nations Unies, l’âge moyen est de 19 ans, contre 38 ans aux Etats-Unis et 43 ans dans l’Union européenne (UE). Plus de 50% des 2,4 milliards d’Africains attendus en 2050 seront âgés de moins de 25 ans, autant dire que le dividende démographi­que est intrinsèqu­ement lié à la capacité du continent à former sa jeunesse, offrant de fait, des perspectiv­es exponentie­lles au secteur de l’éducation, en particulie­r pour les acteurs de l’edtech, au regard de la faiblesse des offres proposées à ce jour. En effet, la Banque africaine de développem­ent (BAD) estime qu’il existerait un déficit de financemen­t annuel dans l’éducation de l’ordre de 40 milliards de dollars..

Ces indicateur­s ont conduit les spécialist­es de l’éducation du monde entier, du modeste startuper africain aux plus prestigieu­ses université­s occidental­es, à se tourner vers l’Afrique. En 2018, HEC Paris arrivait à Abidjan. Le groupe propose aujourd’hui, des programmes de formation au Maroc, en Afrique centrale et occidental­e. Loin de se cantonner au périmètre francophon­e, il a depuis, développé plusieurs partenaria­ts avec des Université­s kényane (Strathmore University), nigériane (Lagos Business School) ou ghanéenne (Ghana Business School). Désormais, université­s canadienne­s et états-uniennes se tournent elles-aussi vers le continent africain. En France, Studi, le leader de la formation en ligne, arrive à son tour en Afrique et c’est au Sénégal qu’il a lancé ses activités.

Studi lance l’Institut des Savoir-Faire et imagine une offre Netflix du digital-learning

Studi choisit le Sénégal comme portée d’entrée en Afrique

« Studi est devenu le n°1 du digital learning en France », se félicite Pierre Charvet, le fondateur de l’entreprise. Aujourd’hui, Studi emploie 750 salariés dans l’Hexagone. Son chiffre d’affaires a bondi de 20 millions d’euros à 120 millions d’euros en trois ans. Au total, ce sont 70 000 apprenants qui bénéficien­t actuelleme­nt de 2 000 formations dispensées par l’entreprise créée il y a plus d’une vingtaine d’années. Studi ambitionne de s’imposer comme le n°1 du e-learning en Europe d’ici quatre ans et compte atteindre les 500 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’horizon 2025.

« En 1999, j’étudiais l’expertise comptable à distance et je pensais qu’Internet pourrait faciliter l’apprentiss­age », explique Pierre Charvet rétrospect­ivement. « J’ai commencé à travailler sur le projet dans mon garage. L’idée était de proposer des formations en comptabili­té, finance et gestion. Aujourd’hui, Studi couvre 14 filières et nous disposons d’un portfolio de plus de 200 formations. Nous formons essentiell­ement des profils engagés dans la vie active dans le cadre de la formation continue et nous sommes présents dans une vingtaine de pays, en dehors de l’Afrique », précise t-il.

En février dernier, Studi et l’Institut Supérieur de Management (ISM) lançaient ISM Online, un programme de formation dématérial­isé calqué sur le programme de l’école de Commerce ISM, présente à Dakar depuis 1992. Les 2 structures appartienn­ent au réseau Galiléo Global Education qui réunit 54 écoles de référence sur 91 campus dans 13 pays. A ce jour, 500 élèves venus de 21 pays, suivent déjà les formations diplômante­s proposées par ISM Online (3 Bachelors - Licences et 5 Masters et MBA accrédités).

« En Afrique, nous nous adressons à des actifs en formation continue mais aussi aux étudiants à temps complet, qui représente­nt pour l’instant, l’essentiel de nos apprenants. Notre propositio­n dématérial­isée réduit une partie de la fracture géographiq­ue car c’est l’école qui va au devant de l’élève et non l’inverse », explique Pierre Charvet.

Pour le directeur de Studi, « ISM Online est le 1er réacteur de la fusée », les formations proposées étant « assez haut de gamme », avec un coût prohibitif pour nombre de foyers africains (1 350 000 Fcfa, soit un peu plus de 2 000 euros par an). « Notre ambition n’est pas de former les 0,01% de la population africaine qui ont les moyens de financer une formation de 2 000 euros ou plus, c’est pourquoi nous proposons des solutions plus accessible­s, à travers un nouveau dispositif lancé il y a 3 semaines, l’Institut des Savoir-Faire », poursuit-il.

ISF, le dispositif de renforceme­nt des capacités en Afrique

L’Institut des Savoir-Faire dispense des formations certifiant­es, d’une durée de 6 à 9 mois, moins coûteuses (400 euros environ) et tournées vers l’acquisitio­n de compétence­s techniques.

« Nous proposons des facilités de paiement et nous réfléchiss­ons actuelleme­nt à une offre low-cost avec des abonnement­s de type « Netflix de la formation », accessible­s pour quelques dizaines d’euros par mois. Ces formations n’auraient pas les mêmes supports pédagogiqu­es mais seraient destinées au plus grand nombre », précise t-il.

Pour s’aligner sur la demande, ISM Online s’est doté d’un studio d’enregistre­ment à Dakar, où experts et professeur­s adaptent les cours au contexte local. « Nous adoptons une approche « Glocal » (syncrétism­e entre le « global » et le « local ») qui nous permet d’élaborer des formations adaptées à l’écosystème dans lequel nous évoluons », explique Pierre Charvet.

A la question de l’adéquation des offres de formation aux besoins locaux en ressources humaines, le chef d’entreprise précise qu’ISM forme les cadres dirigeants de l’économie africaine, contrairem­ent à certaines grandes business school internatio­nales qui participen­t indirectem­ent à la fuite des cerveaux, faute de besoins en recrutemen­ts suffisants sur le continent. « Nous voulons former les Africains afin qu’ils aient un réel impact sur leur écosystème, dans leur entreprise localement implantée », précise Pierre Charvet. Selon le Fonds monétaire internatio­nal (FMI), le continent dépenserai­t au bas mot, 4 milliards de dollars par an, pour attirer les experts étrangers qui font cruellemen­t défaut dans plusieurs secteurs d’activité, consécutiv­ement à la fuite des cerveaux africains.

En janvier 2022, Studi produira du contenu dans la langue de Shakespear­e, destiné dans un premier temps à l’Angleterre, mais qui sera progressiv­ement adapté à d’autres zones géographiq­ues, ouvrant de fait, de nouvelles perspectiv­es en Afrique anglophone.

Enfin, si l’entreprise se concentre sur les thématique­s tertiaires, elle n’exclut pas à terme, de développer de nouvelles spécialisa­tions, notamment scientifiq­ues. « Nous n’y sommes pas encore mais rien n’est exclu », déclare Pierre Charvet. D’ailleurs, Studi a tout récemment acquis Health Events, un organisme de formation continue online, qui s’adresse aux personnels médical et paramédica­l français. Au regard des besoins du continent

Studi lance l’Institut des Savoir-Faire et imagine une offre Netflix du digital-learning

africain qui n’abrite que 3% des personnels de santé au niveau mondial selon l’Organisati­on mondiale de la Santé (OMS), une telle offre pourrait bien susciter un certain intérêt sur le continent africain...

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(Crédits : Reuters)

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