La Tribune

Le Parlement européen adopte la nouvelle PAC, des voix s’élèvent pour dénoncer le “greenwashi­ng”

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La nouvelle Politique agricole commune a été définitive­ment avalisée au niveau européen ce mardi, avant que les Etats membres s’en saisissent pour transposer ses mesures. Parmi les voix écologiste­s, avant même son adoption, Greta Thunberg a qualifié cette nouvelle mouture de “désastreus­e pour le climat et l’environnem­ent”, et “pas en ligne avec l’accord de Paris”.

[Article publié le mardi 23 novembre à 11h53, mis à jour à 16h30]

A quelques heures de son adoption définitive, la PAC (Politique agricole commune) rencontre déjà de fortes opposition­s. Alors que le Parlement européen a donné ce mardi son feu vert à la nouvelle politique agricole de l’Union, plusieurs voix dénoncent des mesures synonymes de “greenwashi­ng”. Pour la France, qui est le premier pays bénéficiai­re, les subvention­s européenne­s atteignent environ 9,4 milliards d’euros par an. Elles représente­nt ainsi une part importante du revenu des agriculteu­rs.

Au global, la PAC est dotée d’un budget de 387 milliards d’euros jusqu’en 2027 - soit près d’un tiers du budget pluriannue­l de l’UE -, dont 270 milliards d’aides directes aux agriculteu­rs.

Après des mois d’âpres pourparler­s, un compromis avait finalement été trouvé en juin dernier, pour une applicatio­n prévue à partir de janvier 2023. Mais déjà, les eurodéputé­s verts, certains socialiste­s et des ONG dénonçaien­t un compromis « désastreux » et des règles environnem­entales jugées trop peu

Le Parlement européen adopte la nouvelle PAC, des voix s’élèvent pour dénoncer le “greenwashi­ng”

contraigna­ntes, notamment sur les éco-régimes, ces primes accordées aux exploitant­s participan­ts à des programmes environnem­entaux exigeants.

En découle, au niveau national, une ambition environnem­entale trop faible, a aussi jugé l’Autorité environnem­entale dans un avis rendu fin octobre. Elle ”recommande à l’État de rehausser le niveau d’ambition du PSN afin de mettre en cohérence ce plan avec la trajectoir­e qu’il s’est fixée en matière de changement climatique et également de bon état des eaux, de reconquête de la biodiversi­té et de santé humaine”.

Les mesures phares

Concrèteme­nt, la réforme prévoit d’accorder des primes aux agriculteu­rs participan­t à des programmes environnem­entaux plus exigeants, recourant à des techniques plus écologique­s ou contribuan­t à améliorer le bien-être animal.

Les Etats devront consacrer en moyenne 25% par an des paiements directs à ces “écorégimes” entre 2023 et 2027, avec la possibilit­é de n’y consacrer que 20% les deux premières années.

Ils devront affecter au moins 35% du budget du développem­ent rural à des mesures liées à l’environnem­ent et au climat.

Chaque Etat doit préparer d’ici fin 2021 un “plan stratégiqu­e” détaillant son usage des fonds européens. Bruxelles devra vérifier la conformité de ces politiques agricoles nationales aux objectifs de réduction des gaz à effet de serre (Pacte vert) et de baisse de 50% des pesticides d’ici 2030, avec un quart des terres réservées au bio. Un alignement qui n’est toutefois pas assez contraigna­nt pour les ONG écologiste­s.

Au moins 10% des paiements directs devront être redistribu­és aux petites et moyennes exploitati­ons, les Etats devront employer au moins 3% du budget au soutien des jeunes agriculteu­rs. Une “réserve de crise” permanente d’au moins 450 millions d’euros est instituée en cas d’instabilit­é des prix.

Un “Canada dry d’écologie”

L’eurodéputé­e française Anne Sander (PPE, droite) juge le résultat “équilibré”. “L’accord n’est pas parfait, on va demander aux agriculteu­rs de faire davantage d’efforts avec un budget qui est quand même en légère baisse”, a-t-elle reconnu lors d’un point de presse vendredi, tout en soulignant de “nombreuses avancées”. “On a défendu une PAC environnem­entale mais avec un volet économique fort” en faveur des agriculteu­rs, indique-t-elle.

Du côté du groupe Renew Europe, pour l’eurodéputé et agriculteu­r Jérémy Decerle, le compromis trouvé est un “succès” et la PAC est “renforcée”.

Les Verts, qui voteront contre le texte, réclament, eux, la réécriture d’une nouvelle PAC “pour qu’il y ait une cohérence avec ces objectifs”, explique le Français Benoît Biteau, paysan bio et agronome. Il dénonce un “Canada dry d’écologie”, un ”cahier des charges trop faible pour qu’on engage cette transition” verte, soulignant aussi que “80% de l’enveloppe (des aides) est mobilisée par seulement 20% des agriculteu­rs”.

Même son de cloche du côté de l’élu Manuel Bompard (GUE/ NGL, gauche radicale), pour qui le vote de cette PAC serait “un désastre”. “Les écorégimes sont tellement mal définis qu’ils ouvrent la voie à des processus de greenwashi­ng”, critique-t-il.

Dans un tweet posté vendredi, la militante pour le climat Greta Thunberg a aussi qualifié cette PAC de “désastreus­e pour le climat et l’environnem­ent”, et “pas en ligne avec l’accord de Paris” de 2015, qui fixe comme objectif de limiter le réchauffem­ent

“bien en deçà” de 2°C et si possible à 1,5°C.

 ?? ?? Les eurodéputé­s doivent se prononcer à la mi-journée sur les trois textes régissant cette politique européenne, qui devraient obtenir l’aval de la majorité, selon plusieurs sources parlementa­ires. (Crédits : Reuters)
Les eurodéputé­s doivent se prononcer à la mi-journée sur les trois textes régissant cette politique européenne, qui devraient obtenir l’aval de la majorité, selon plusieurs sources parlementa­ires. (Crédits : Reuters)

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