Déréférencement de Wish, le “Amazon du discount” : un coup dur à la veille du Black Friday
En raison de la non-conformité et même de la dangerosité de nombreux produits vendus sur le site discount américain, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de Bercy (DGCCRF) a carrément ordonné aux moteurs de recherche et aux magasins applicatifs de déréférencer Wish. Une première en France, et le signe d’un durcissement des régulateurs vis-à-vis des pratiques de certains acteurs sur Internet.
Wish a joué avec le feu et a fini par se brûler. Depuis le mois de juillet, le site américain de vente en ligne de produits discount Wish, connu pour ses produits à bas prix mais de qualité souvent discutable, ignorait les relances de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui lui demandait de retirer certains produits jugés défectueux voire dangereux suite à une enquête interne.
Lassée, l’administration - qui dépend de Bercy - a fini par sortir l’artillerie lourde. Alors que se profile le “Black Friday”, semaine exceptionnelle de soldes en ligne dont profitent tous les champions du e-commerce, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a ”ordonné” ce mercredi 24 novembre aux moteurs de recherche en ligne (Google, Bing, Qwant, Ecosia, Lilo...) et aux magasins d’application mobiles (Apple Store, Google
Play Store...) de déréférencer Wish et son application mobile. Traduction : pour trouver le site, il faudra inscrire soi-même directement l’URL dans la barre de navigation, car Wish n’apparaîtra plus dans les résultats des moteurs de recherche. Les utilisateurs ne pourront non plus télécharger l’application via les magasins applicatifs.
Déréférencement de Wish, le “Amazon du discount” : un coup dur à la veille du Black Friday
Produits cancérigènes dans les jouets, 90% des appareils électroniques dangereux
Créée en 2010 à San Francisco par Peter Szulczewski, un ancien de Google, et entrée en Bourse en décembre 2020 à Wall Street, la pépite californienne a trouvé le succès en vendant en ligne des produits à des prix défiant toute concurrence. Son secret : recourir à des marques discount, principalement chinoises, qui souvent imitent des produits populaires de grandes marques plus chères.
On peut ainsi trouver sur le site de nombreux produits électroniques, des vêtements, objets de décoration et d’électroménager qui ressemblent à ceux vendus par des grandes marques, mais à tout petit prix : montres à moins de 30 euros, réveils électroniques à 7 euros, chargeurs USB à 2 euros, blousons en cuir à 30 euros...
Autre étrangeté : on trouve même sur Wish des produits de marques prestigieuses à très bas prix, comme des parfums Jean-Paul Gauthier à... 14 euros. Comme les autres acteurs du e-commerce, la plateforme de vente en ligne a vu son activité exploser avec la pandémie de Covid-19 : l’entreprise détenue par le groupe ContextLogic revendique quelque 100 millions d’utilisateurs actifs.
Depuis 2018, et dans le cadre d’une initiale globale concernant la sécurité des produits vendus sur les places de marché en ligne, la DGCCRF a mené deux enquêtes sur Wish, dont la dernière en 2020. Celle-ci portait sur 140 produits proposés à la vente sur le site, principalement originaires de Chine, et a révélé la mise en vente d’un grand nombre de produits “non-conformes et dangereux”, avec “des taux de dangerosité particulièrement élevés pour certaines familles de produits” comme les jouets (95% d’objets non conformes, dont 45% dangereux avec par exemple des produits cancérigènes), les appareils électroniques (95% non conformes dont 90% dangereux à l’image d’adaptateurs risquant de provoquer une électrocution), et les bijoux fantaisie (62% sont dangereux).
”Il n’y a pas de raison de tolérer en ligne ce que nous n’accepterions pas dans les commerces physiques”
Après avoir notifié la plateforme de la présence de ces produits illicites, la DGCCRF a constaté que, même une fois retirés, ils réapparaissaient souvent sous un autre nom. Elle a donc sommé Wish de se mettre en conformité et estime n’avoir depuis pas reçu de “réponse satisfaisante”, d’où sa décision. La sanction devrait durer jusqu’à ce que Wish se remette en conformité avec la loi.
”Il n’y a pas de raison de tolérer en ligne ce que nous n’acceptons pas dans les commerces physiques”, a dit Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, au Parisien.
”Nous lui laissons quelques semaines”, indique Bruno Le Maire. Après cela, Bercy se réserve la possibilité de bannir complètement le site américain du web français.