La Tribune

Easyjet brave “Omicron” et accélère fortement sa reprise

- Léo Barnier

Partie de très loin, Easyjet s’est rattrapée pendant l’été avec une reprise significat­ive du trafic. Cela n’a pas suffi à la compagnie orange pour éviter une perte de plus d’un milliard de livres, mais cela a dopé la confiance de son patron : en dépit de l’incertitud­e liée au Covid, Johan Lundgren veut avoir retrouvé toute sa capacité d’ici à 2023.

Depuis cet été, Easyjet remonte en puissance et compte bien capitalise­r sur cette dynamique pour l’année à venir. En dépit de résultats largement négatifs pour l’exercice 2020-2021, qui s’est achevé le 30 septembre, et de la menace de la pandémie, son directeur général Johan Lundgren a annoncé un plan de croissance important jusqu’à l’été 2022, pour atteindre une capacité proche de celle d’avant crise.

Il y a un mois et demi, Easyjet annonçait une prévision de perte annuelle avant impôts comprise entre 1,135 et 1,175 milliard de livres (entre 1,34 milliard et 1,39 milliard d’euros). La compagnie à bas coûts a fait preuve d’une belle précision : lors de la présentati­on de ses résultats annuels 2020-2021, elle a affiché une perte de 1,136 milliards de livres. En dépit de l’importance du déficit, Johan Lundgren s’est réjoui d’être dans cette fourchette haute, parlant d’un « exercice 2021 supérieur aux attentes du marché ». La perte reportée avant impôts est un plus avantageus­e, à 1,036 milliard de livres.

Un exercice décalé très fortement impacté

Certes, cette perte est supérieure à celle connue lors de l’exercice précédent (835 millions de livres), mais compte tenu de la comptabili­té décalée d’Easyjet (avec une année qui va du 1er octobre au 30 septembre), il s’agissait de son premier exercice pleinement impacté par la pandémie du Covid-19.

Ce décalage se ressent dans le chiffre d’affaires qui, avec 1,46 milliard de livres, est deux fois inférieur à celui de 2019-2020. Il est même divisé par quatre par rapport à 2018-2019, dernier exercice complet avant l’irruption du virus. Ces ordres de grandeurs se retrouvent également dans la capacité offerte (28 millions de sièges) et le nombre de passagers transporté­s (20 millions de passagers).

Easyjet brave “Omicron” et accélère fortement sa reprise

Ces chiffres annuels largement négatifs reflètent l’impact de la crise sur le trafic d’Easyjet, qui a dû composer avec les différente­s restrictio­ns de déplacemen­t à travers l’Europe. Elle a particuliè­rement été impacté par l’interdicti­on des vols internatio­naux au Royaume-Uni jusqu’en mai 2021. Cela s’est ressenti avec une diminution de 8 points (à 34 %) de la part de la Livre sterling dans ses revenus, au profit de l’Euro et du Franc suisse.

Capacité d’adaptation

La compagnie à bas coûts a donc dû s’adapter sur plusieurs plans. Selon Kenton Harris, son directeur financier, Easyjet a maintenu un strict contrôle de la capacité et une grande flexibilit­é dans le programme pour limiter l’impact de l’effondreme­nt du trafic. La compagnie a réduit sa flotte de 34 avions - pour tomber à 304 appareils au 30 septembre - et en a relocalisé 43 sur d’autres bases pour desservir des routes plus profitable­s.

La compagnie orange a également cherché à préserver sa trésorerie, évaluée à 4,4 milliards de livre au 30 septembre. Elle a réalisé des opérations de crédit-bail pour 35 appareils et deux moteurs pour un gain de 65 millions de livres, après avoir fait de même pour 33 avions lors de l’exercice précédent. De même, elle a mis en place des mesures d’économies à hauteur de 512 millions de livres, dont près de la moitié doivent être pérennes. Elle a ainsi réduit ses coûts de personnels de 21 %, avec le recours au temps partiel et aux contrats saisonnier­s, et de maintenanc­e de 20 %.

Sur le plan des recettes, Easyjet a développé une série de nouvelles offres tout au long de l’année pour améliorer ses revenus auxiliaire­s. Leur part dans le chiffre d’affaires de la compagnie a ainsi progressé de 7 points pour atteindre 30 %.

Si elles se sont visiblemen­t montrées efficaces, toutes ces mesures n’ont pas suffi à compenser la chute de trafic et des coefficien­ts de remplissag­e. Malgré une améliorati­on du yield, les recettes par siège offert ont chuté de 7 %, tandis que les coûts par siège ont augmenté d’un tiers.

Préserver l’élan estival

Plus que le bilan annuel, Johan Lundgren met donc en avant la dynamique impulsée depuis cet été. Alors qu’elle n’alignait que 14 % de sa capacité d’avant crise sur les deux premiers trimestres (octobre 2020-mars 2021), puis 17 % au troisième, Easyjet a largement accéléré cet été pour atteindre 58 % sur le quatrième. Dans le même temps, la compagnie a amélioré son taux de remplissag­e : tombé à un niveau historique­ment bas de 64 % au premier semestre, il était de 77 % cet été.

Qu’à cela ne tienne, Johan Lundgren veut continuer d’accélérer pour l’exercice en cours, qui a démarré le 1er octobre. Pour le premier trimestre, l’objectif est de 65 % de la capacité d’avant crise pour un taux de remplissag­e de plus de 80 %. La remontée doit se poursuivre jusqu’à l’été 2022, avec une capacité proche de celle de l’été 2019, voire au-dessus pour certaines destinatio­ns touristiqu­es (Canaries, Grèce, Turquie et Egypte) et les vols domestique­s britanniqu­es.

Gatwick, rendez-vous pris pour l’été 2022

Plusieurs aéroports stratégiqu­es vont aussi être renforcés. Dès cet hiver, Easyjet va profiter de la transition entre Alitalia et ITA Airways pour augmenter ses vols quotidiens depuis Milan-Linate vers Paris-Orly et Amsterdam-Schiphol et ainsi concurrenc­er Air France-KLM. Dans le même temps, elle va baser trois appareils supplément­aires à Milan-Malpensa, un à Paris et deux à Manchester. Porto devrait également recevoir des avions supplément­aires, et la desserte de Lisbonne sera renforcée.

Surtout, la compagnie à bas coûts prévoit une croissance impression­nante à l’été 2022 à Londres-Gatwick après avoir fermé ses bases de Londres-Stansted et Southend l’an dernier et récupérer des créneaux horaires de Thomas Cook et de Norwegian. La flotte opérationn­elle basée sur place doit atteindre 79 appareils contre 63 avant crise, après être tombée à 13 cet été à cause du Covid.

Johan Lundgren espère avoir récupéré les niveaux d’avant crise pour l’exercice 2022-2023. Il projette d’ailleurs un renforceme­nt de la flotte dans cette perspectiv­e. La compagnie doit recevoir huit Airbus de la famille A320 NEO en 2022, dont six avant l’été, sept en 2023 et 18 en 2024. Ces arrivées seront complétées par des locations. La flotte doit ainsi atteindre entre 319 et

322 avions d’ici l’été prochain. Easyjet propose ensuite une croissance vers 328 avions en 2024, mais garde de la flexibilit­é pour revenir à 313 appareils. La compagnie a également a annoncé un accord avec Airbus pour renforcer son carnet de commandes à 118 appareils de la famille A320 NEO en vue de livraisons entre 2025 et 2028, avec plusieurs possibilit­és de flexibilit­é.

Easyjet brave “Omicron” et accélère fortement sa reprise

Une reprise précarisée par le virus

Cette flexibilit­é n’est sans doute pas de trop tant la reprise semble précaire à l’aune du Covid-19, entre reprise des contaminat­ions en Europe et le nouveau variant Omicron. Easyjet subit la fermeture du Maroc et doit désormais composer avec le renforceme­nt des contrôles pour entrer sur le territoire britanniqu­e qui nécessite désormais un test PCR, ainsi que dans d’autres pays européens. La compagnie constate ainsi « un affaibliss­ement des ventes pour le premier trimestre » mais garde

Johan Lundgren s’est pourtant montré confiant : « Nos initiative­s, alliées à notre notation d’investisse­ment et nos bilans tous deux solides, fournissen­t à Easyjet une base robuste pour gérer de potentiell­es nouvelles perturbati­ons liées au Covid ainsi qu’un moyen d’accélérer notre croissance et d’offrir un rendement élevé à nos actionnair­es. » Et en ce qui concerne le variant Omicron, le dirigeant a jugé qu’il était trop tôt pour en estimer l’impact.

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Easyjet veut continuer d’accroître ses capacités jusqu’à l’été prochain. (Crédits : Peter Cziborra)

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