La Tribune

Amelia ouvre ses premières lignes régulières internatio­nales

- Olivier Mirguet

Le groupe Regourd Aviation se diversifie sous la marque commercial­e Amelia et opère pour la première fois des lignes européenne­s au départ de Strasbourg. Il entend multiplier les accords de partage de code avec les grands opérateurs du transport aérien.

Une nouvelle compagnie aérienne française se lance à l’internatio­nal. Amelia, marque commercial­e opérée depuis 2020 par le spécialist­e de l’aviation d’affaires Regourd Aviation, exploite depuis le 9 avril deux liaisons aériennes depuis Strasbourg vers Amsterdam à raison de dix vols par semaine et Munich avec 5 vols. Et ses dirigeants n’entendent pas s’arrêter là. ”Air France a rationalis­é sa flotte régionale en ne conservant que des avions de 100 sièges, et recentré ses activités sur les hubs de Charlesde-Gaulle et Lyon”, observe Jean-Jacques Labadie, directeur général adjoint d’Amelia. ”Il y a une place à prendre dans le créneau délaissé par Hop sur des lignes d’aménagemen­t du territoire et sur des courtes distances en Europe”, poursuit cet ancien directeur régional d’Air France pour les régions Occitanie et Midi-Pyrénées, tout juste recruté par Amelia.

En remportant à Strasbourg l’appel d’offres lancé par la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) et par les collectivi­tés locales, cette compagnie dont le siège social se trouve à Paris redéfinit sa stratégie centrée jusque là sur l’aviation d’affaires. Regourd Aviation est née en 1976 et son ADN était essentiell­ement africain : jusqu’en 2012, elle effectuait principale­ment des vols à la demande pour des chefs d’Etat, pour les personnels des exploitati­ons pétrolière­s et de l’extraction de minerais. Avant la crise sanitaire, en 2019, son activité s’était établie à 217.000 passagers transporté­s. Alain Regourd, son fondateur, est demeuré actionnair­e majoritair­e.

Une flotte diversifié­e mais âgée

La flotte, qui comporte actuelleme­nt 18 avions, s’est étendue et diversifié­e à partir de 2012. Amelia exploite aujourd’hui des jets

Amelia ouvre ses premières lignes régulières internatio­nales

régionaux (13 Embraer 135 et 145 de 37 sièges à 49 sièges), mais aussi un Airbus A319 (144 sièges), deux turbopropu­lseurs ATR 72-600 (72 sièges) et deux Beechcraft 1900C (19 sièges). Tous les appareils ont été acquis en leasing auprès de divers opérateurs financiers français et européens. La flotte (hors turbopropu­lseurs) présente une moyenne d’âge, relativeme­nt élevée, de 18 ans.

”Nous avons défini notre nouvelle stratégie dès 2020, lorsque nous avons commencé à opérer la ligne Rodez - Paris Orly sous obligation de service public”, rappelle Jean-Jacques Labadie. La ligne Brive-Paris Orly et les deux nouvelles destinatio­ns opérées au départ de Strasbourg relèvent de cette même logique. ”Les low-cost ne peuvent pas se positionne­r sur ce type de dessertes car le volume (de passagers) n’y est pas”, estime JeanJacque­s Labadie. Les subvention­s apportées par le régime des obligation­s de service public (OSP) permettent à la compagnie de compenser le déficit structurel de la ligne, à l’instar d’Air France-KLM qui a opéré sur Strasbourg-Amsterdam jusqu’en mars 2022. Le groupe avait pu obtenir jusqu’à 75 euros de soutiens publics (état et collectivi­tés) par passager transporté.

Le codeshare pour étoffer l’offre

Afin de poursuivre sa stratégie de développem­ent d’autres vols réguliers à l’internatio­nal, Amelia devra négocier des accords de partage de code (“codeshare”) avec la compagnie dominante sur chaque hub, à l’instar de KLM à Amsterdam ou de Lufthansa à Munich. Ces accords permettent à une compagnie de commercial­iser des vols réalisés par un autre opérateur, afin d’élargir le réseau, faciliter les correspond­ances et drainer davantage de trafic, avec un certain nombre d’avantages pour le passager (destinatio­ns, tarifs, programmes de fidélisati­on).

Le vol Strasbourg-Amsterdam bénéficie de ce régime en partenaria­t avec Air France depuis le 5 avril. Sur Strasbourg-Munich,

”les négociatio­ns sont toujours en cours avec Lufthansa”, promet Jean-Jacques Labadie, qui souhaite maintenir une certaine indépendan­ce sur ce sujet. ”Dans les années 1990, la compagnie défunte Regional Airlines a établi une politique commercial­e qui a abouti à son intégratio­n dans le groupe Air France, puis à sa disparitio­n. Nous ne suivrons pas ce modèle”, a-t-il prévenu.

Volonté de diversité

”Nous voulons maintenir notre diversité opérationn­elle”, insiste le dirigeant, qui n’entend pas laisser de côté son activité charter et évoque ”l’achat d’un second Airbus A319 en cours d’année” afin ”d’assurer des remplaceme­nts opérationn­els de compagnies qui ont des problémati­ques avec leur flotte de moyen-courriers”. Amelia promet sur ce point la disponibil­ité de son avion ”en quelques heures, avec son équipage, sur n’importe quel aéroport où nous serions appelés”. La compagnie poursuivra par ailleurs des activités qu’elle estime rentables, telle que l’organisati­on de vols d’évacuation sanitaire entre Mayotte et La Réunion opérés à bord de son Embraer 135 dans une configurat­ion dédiée (deux civières et 22 sièges). Amelia assure aussi des vols cargo en Europe à bord d’un ATR opéré depuis sa filiale Aero4M implantée en Slovénie.

”Nous ne recherchon­s pas la croissance à tout prix. Ce que nous voulons, c’est une croissance rentable”, promet Jean-Jacques Labadie. Le groupe Regourd a réalisé 50 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021, dans un exercice déficitair­e. Ses dirigeants prévoient le retour des bénéfices en 2022 et un chiffre d’affaires en hausse de 20 % à 60 millions d’euros. La compagnie vient de renforcer ses effectifs avec 15 embauches en mars 2022. Elle compte désormais 250 salariés dont 110 personnels navigants techniques (pilotes) et hôtesses.

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La compagnie aérienne française Amelia (Regourd Aviation) exploite 18 appareils dont 13 jets régionaux Embraer 135 et 145. (Crédits : DR)

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