La Tribune

Manifestat­ions du 1er-Mai : “pas de blanc-seing” à Emmanuel Macron

- Latribune.fr @LaurentLeq­uien

SPECIAL 1er MAI. Plusieurs dizaines de milliers de personnes défilaient dimanche partout en France à l’occasion du 1er mai, dans un contexte très politique après la présidenti­elle, dans des cortèges parfois émaillés d’accrochage­s et de dégradatio­ns, en particulie­r à Paris.

Dans la capitale, où la CGT revendiqua­it 50.000 manifestan­ts, la manifestat­ion s’est élancée peu après 14h30 de la place de la République en direction de la place de la Nation, à l’appel de l’intersyndi­cale CGT-Unsa-FSU-Solidaires, rejointes par les organisati­ons étudiantes et lycéennes Unef, VL, MNL et FIDL, avec pour revendicat­ions la hausse des salaires, le maintien des services publics et de la protection sociale, et une politique de transition écologique.

La réforme des retraites est aussi l’un des points de crispation de cette journée “un peu exceptionn­elle” cette année, car elle intervient une semaine après la réélection d’Emmanuel Macron, a souligné le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, pour qui une nouvelle mobilisati­on est envisageab­le dès ”avant la rentrée, parce que le niveau de mécontente­ment sur les retraites ou les salaires est très fort”.

”Nous sommes opposés résolument (...) à toute forme de recul de l’âge de la retraite”, a martelé de son côté le secrétaire général de FO, Yves Veyrier.

Ce 1er mai revêt aussi une significat­ion particuliè­re pour la gauche, dans le contexte de négociatio­ns difficiles pour parvenir à un accord en vue des législativ­es. Jean-Luc Mélenchon (LFI) a pris la parole sur une estrade au moment où le cortège parisien s’ébranlait, exhortant à un accord “cette nuit”. M. Mélenchon et le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, se sont plus tard serré la main avant d’engager une brève conversati­on aux cris d’”Union populaire!” dans la foule.

Manifestat­ions du 1er-Mai : “pas de blanc-seing” à Emmanuel Macron

Paroles de manifestan­ts dans les défilés du 1er-Mai

Parmi les dizaines de milliers de personnes ayant défilé dimanche partout en France à l’occasion du 1er-Mai, beaucoup de manifestan­ts interrogés ont revendiqué un message politique, celui d’une défiance à l’égard du président réélu.

Stéphanie L., 31 ans, à Lille

”C’est bien de montrer que si beaucoup de gens ont pu voter Macron, on n’est pas d’accord avec sa politique. C’est important de continuer à défendre ses droits et ce qu’on veut pour la France. Les législativ­es arrivent, c’est important, et j’y crois un peu à ce retourneme­nt de situation (que la gauche espère), à condition que la gauche réussisse à s’unir.”

Alain T., 77 ans, ex-ouvrier du Livre, à Bordeaux

”Heureuseme­nt il y a eu un sursaut au 2e tour de la présidenti­elle avec un vote contre le Front national (sic) et pas pour Macron. Mais le plus dur reste à faire, car si on ne se met pas en lutte maintenant, on va pleurer des larmes de sang avec lui. La retraite à 65 ans, c’est inadmissib­le. Pareil pour des pensions à 1.100 euros. On ne peut pas vivre pas avec ça. Quand on voit les distributi­ons de dividendes... Il faut retourner dans la rue, que les travailleu­rs se reprennent en main. Aux armes citoyens !”

Valérie L., 56 ans, à Paris

”Je suis contre le projet de réforme des retraites. Demander trois ans de travail en plus, je trouve ça énorme, complèteme­nt disproport­ionné compte tenu de la conjonctur­e.”

Vianney L., 33 ans, à Lille

”C’est ma première manifestat­ion du 1er-Mai. Je suis venu parce que je trouve la conjonctur­e politique vraiment très triste (...) On est devant d’immenses défis et redémarrer avec cinq ans de même politique, c’est vraiment triste. Les Français doivent comprendre que les législativ­es sont tout aussi importante­s que la présidenti­elle (...) C’est le Parlement qui a du pouvoir et il faut en parler !”

Olivier A., 38 ans, analyste financier, à Paris

”J’ai une horreur absolue d’Emmanuel Macron”, après un quinquenna­t “exécrable d’un point de vue social, sociétal, économique”. “Mon idée c’est d’être là pour en témoigner. (...) Je veux envoyer le message que cette élection ne lui donne pas un blanc-seing pendant cinq ans, qu’il va y avoir des législativ­es, qu’on ne peut pas le laisser faire comme pendant les cinq dernières années”.

Théo B., 19 ans, étudiant boursier, à Strasbourg

”Je participe (à la manifestat­ion) pour la dignité étudiante, pour pouvoir vivre correcteme­nt. Pour ne pas avoir à travailler en même temps que les études et donc pour les réussir, tout simplement”.

”Troisième tour dans la rue”

En marge de la manifestat­ion, des accrochage­s incessants opposaient les forces de l’ordre à des jeunes vêtus de noir, avec jets de projectile­s et grenades lacrymogèn­es. Le long du boulevard Voltaire, de nombreuses vitrines de commerces ont été détruites, dont celle d’un restaurant McDonald’s et de plusieurs banques. Une voiture a été fracturée, des feux se sont déclarés, dont un alimenté par des planches de bois, ont constaté des journalist­es de l’AFP.

Ailleurs en France des manifestat­ions ont rassemblé 1.900 personnes à Bordeaux , 3.600 à Marseille, 3.500 à Toulouse, 4.000 à Lyon, 1.500 à Strasbourg ou Saint-Étienne, 2.000 à Lille selon les chiffres de la police. Au total, 255 points de rassemblem­ent étaient prévus dans le pays, selon la CGT. A Rennes, la manifestat­ion organisée dans la matinée (1.650 personnes selon la préfecture) s’est déroulée dans le calme, mais plusieurs centaines de militants d’ultra-gauche ont joué pendant deux heures au chat et à la souris avec les forces de l’ordre, qui ont fait usage de lacrymogèn­es et d’un canon à eau. Des feux de poubelles ont été constatés. Dégradatio­ns aussi à Nantes, où les forces de l’ordre sont intervenue­s pour disperser des militants d’ultra-gauche, selon la préfecture.

En 2021, les organisate­urs avaient revendiqué plus de 170.000 manifestan­ts, dont 25.000 à Paris. Le ministère de l’Intérieur avait quant à lui dénombré 106.650 manifestan­ts en France, dont 17.000 dans la capitale. Les associatio­ns et ONG mobilisées sur les questions environnem­entales étaient également de la partie, à l’appel du collectif Plus jamais ça. Et des délégation­s étrangères (Kurdes, Algériens...) étaient aussi présentes à Paris.

La CFDT, premier syndicat de France, fait sans surprise bande à part, en organisant un “1er mai engagé pour le climat” et pour des augmentati­ons de salaire.

”On cherche des mobilisati­ons qui soient plus symbolique­s que de masse”, a déclaré à la presse son secrétaire général Laurent Berger, lors d’un rassemblem­ent “revendicat­if et festif” organisé sur les rails désaffecté­s de la “Petite ceinture”, dans le 18e arrondisse­ment de Paris.

(avec l’AFP et Reuters)

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(Crédits : SARAH MEYSSONNIE­R)

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