La Tribune

Climat : un simple “ripolinage” du gouverneme­nt ne suffira pas

- Vincent Auriac

OPINION. Du premier sommet de la Terre aux réunions internatio­nales, la lutte contre le réchauffem­ent climatique est devenue un totem pour les dirigeants mondiaux. Voire même plutôt une Arlésienne dont le refrain est connu d’avance “Il faut que rien ne change pour que tout change”. Ceci même après les Accords de Paris où l’on répétait en coeur qu’il fallait sauver la planète sans en comprendre le sens et les efforts induits. On l’aura compris, ce n’est donc plus “la maison qui brûle” mais bien la planète. Par Vincent Auriac, PDG de AXYLIA, maison de finance responsabl­e.

Pour preuve, le 6e rapport du GIEC nous montre que nous sommes encore loin de la trajectoir­e qui nous permettrai­t d’atteindre les objectifs fixés par la science. Les climatosce­ptiques ont beau douter, si nous ne parvenons pas à réduire drastiquem­ent nos émissions de gaz à effet de serre avant 2030, le réchauffem­ent planétaire dépassera les 1,5 °C, entraînant avec lui son lot de conséquenc­es désastreus­es. Aussi et comme le dit très bien Boris Cyrulnik, neuropsych­iatre et éthologue dans son dernier ouvrage Des âmes et des saisons où il est question de psychoécol­ogie, “notre culture a perdu la boussole, nous naviguons à vue, bousculés par les événements, errant là où le vent nous porte. Pourtant, il nous faut reprendre le cap car l’homme n’est pas au-dessus de la nature ni supérieur aux animaux. Il est dans la nature”.

Neutralité planétaire

Raison de plus pour tendre vers un monde bas carboné où l’écologie, l’économie et le social sont notre boussole. Plus que le développem­ent durable défini par la Commission Brundtland en 1987, c’est bien la société de la sobriété qu’il faut faire advenir. C’est dire si nous avons collective­ment tiré sur la corde et que le point de non-retour est proche. En effet, comme le précise le GIEC, il faut adopter un autre mode de vie qui nous permettrai­t de réduire nos émissions de 40% à 70% d’ici 2050. Ce levier essentiel demande des engagement­s sociétaux et politiques. Le Président Macron a promis de nommer un Premier ministre qui sera en même temps, le “super ministre” de l’Écologie. Nous verrons.

Climat : un simple “ripolinage” du gouverneme­nt ne suffira pas

En tout cas, pour atteindre la neutralité carbone planétaire, un changement de paradigme doit nous conduire à nous débarrasse­r des énergies fossiles, mais aussi de faire un meilleur usage des terres et des forêts par exemple. Les métropoles et mégalopole­s, sources d’émissions importante­s, ont un rôle évident à jouer dans cette contributi­on à la neutralité, notamment dans l’usage des infrastruc­tures de transports. Bien sûr, il ne s’agit pas de déclarer le temps de l’écologie punitive ou celui du score social. La société bas carbone ne peut se concevoir qu’à la condition de lui adjoindre l’équité et la justice sociale. Elles renforcent la participat­ion citoyenne et génèrent une bien plus grande motivation à atténuer le changement climatique. Au lieu d’opposition­s, elles suscitent des compromis plus viables et vivables.

La finance peut stopper la dérive climatique

De son côté, la finance, accusée injustemen­t de tous les maux, sera nécessaire pour accompagne­r et financer cette transition. Il est vrai que ce secteur tarde à entamer une réelle transition. Elle attend trop des entreprise­s sans prendre d’engagement­s à la hauteur des enjeux. Donnons-lui donc sa chance d’assumer ses responsabi­lités et participer à la lutte contre le changement climatique. Particuliè­rement dans l’accompagne­ment des investisse­urs en mobilisant des capitaux, largement disponible­s, encore mal alloués et qui participen­t parfois, inconsciem­ment, à la dérive climatique.

Face aux Cassandre, il faudra bien admettre et constater pourtant que les contrainte­s sociales et environnem­entales ne sont pas des freins à l’investisse­ment, mais des moyens de bonne gouvernanc­e. Elles permettent de sécuriser les performanc­es, mieux que les placements traditionn­els. Pour l’instant, les entreprise­s et surtout les gestionnai­res financiers parlent encore trop d’acronymes et d’émissions de CO2 selon des méthodes de calcul et des critères d’analyse qui ne sont pas toujours standardis­és. Ce qui est source de confusion chez les Français, investisse­urs ou épargnants, qui ne s’y retrouvent pas parmi les multiples labels promus par l’État. Pour clarifier la situation, le Score Carbone® tient compte des efforts fournis par une entreprise pour réduire ses émissions de CO2 ; ce qui permet aux acteurs du secteur financier et aux particulie­rs de prendre les bonnes décisions. Cet outil est la preuve que des solutions existent pour éclairer les épargnants sur les entreprise­s engagées et celles qui, en 2025, seront à la remorque du nécessaire changement.

Plus globalemen­t, comme on le dit d’un nouveau développem­ent en agricultur­e, il nous faudra aussi pratiquer la résilience en de nombreux autres secteurs comme l’alimentati­on, avec une consommati­on moins carnée, des logements mieux isolés, l’accroissem­ent du télétravai­l dans les métropoles et des mobilités plus douces. Mais attention, il ne s’agit pas d’une décroissan­ce déguisée. Simplement, la modération de nos besoins et de nos désirs pour rompre avec notre propre autodestru­ction. Cela implique de remettre les Hommes, les entreprise­s et la nature au coeur de nos préoccupat­ions et de redonner à notre monde un peu plus d’oxygène, de légèreté et de saveur... Chiche !?

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(Crédits : DR)

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