La Tribune

Non, l’éolien ne va pas augmenter les recettes de l’Etat !

- Pierre Dumont

OPINION. En pleine campagne présidenti­elle, un argument surprise semblait tomber à pic dans le débat public : L’éolien rapportera­it de l’argent à l’Etat ! Mieux, il allait même pouvoir rembourser à l’Etat les sommes faramineus­es qu’il a coûté. Pourtant, bien que l’explosion actuelle du prix de l’électricit­é change effectivem­ent temporaire­ment la donne habituelle, l’éolien continuera de constituer un coût pour l’Etat et pour le consommate­ur à maints égards, mais également pour l’environnem­ent. Par Pierre Dumont, chef d’entreprise, auteur de l’Ecologie bananière (2022, Editions S&C).

Enthousias­tes, des industriel­s de l’éolien ont même avancé, dans certains médias que l’éolien rapportera­it autant à l’État qu’il lui a coûté. De l’aveu même des promoteurs éoliens, ces affirmatio­ns ne sont pourtant qu’hypothétiq­ues, car il faudrait attendre la fin 2024, dans un univers soumis à tant de variations qu’il est illusoire de croire que cette prédiction se réalisera. L’essentiel des calculs se basent sur un prix moyen qui resterait au plus haut observé récemment de 220 euros le MWh alors que, pour rappel, le prix moyen était de 50 euros/MWh entre 2017 et 2021. En réalité, personne ne peut estimer quel va être durablemen­t le prix de l’électricit­é. Il est soumis à de trop nombreux aléas géopolitiq­ues, technologi­ques et politiques, ainsi qu’à l’adaptation des Gouverneme­nts, de telle sorte que tout scénario ne peut être que fantaisist­e. Il y a trois mois seulement, personne n’aurait pu prédire la situation énergétiqu­e européenne actuelle.

De plus, il faut garder à l’esprit ce que représente en France le soutien à la filière de l’éolien. Les acteurs de l’éolien semblaient évaluer ce montant à 11 milliards d’euros alors qu’en réalité, à la fin des contrats qui les lient à EDF, l’État aura dépensé pour les 8.000 éoliennes une somme avoisinant plutôt les 100 milliards d’euros (source Cérémé).

Il n’y a aucune chance de voir les entreprise­s de l’éolien rembourser ces milliards à l’État.

D’autant qu’aucune entreprise qui devrait verser ces milliards ne pourrait survivre. Certes, par des mécanismes financiers artificiel­s très désavantag­eux pour l’État et les consommate­urs, les entreprise­s de l’éolien ont pu accumuler des milliards, et

Non, l’éolien ne va pas augmenter les recettes de l’Etat !

certaines variations de prix de marché rééquilibr­ent temporaire­ment la balance quotidienn­e. Cependant, cela n’est ni durable ni réaliste d’envisager un pareil rééquilibr­age à grande échelle.

Concrèteme­nt, les bénéfices réalisés ont été remontés aux maisons mères et les entreprise­s opérationn­elles qui sont des coquilles vides, incapables de rembourser les montants évoqués. Les milliards encaissés ne sont plus dans la trésorerie de ceux qui sont légalement les interlocut­eurs de l’État. Quand bien même les hypothèses très peu probables se réaliserai­ent, l’État ne pourrait jamais récupérer ce qu’il a versé depuis 2003.

Les règles vont évoluer

Étant donné que la volonté de l’État est de continuer à inciter les promoteurs de l’éolien à en implanter un maximum, cela ne pourra se faire que si ceux-ci continuent à en espérer des bénéfices. On peut donc parier sans trop se tromper que les mécanismes de privilèges de l’éolien sur le nucléaire, s’ils continuaie­nt à s’avérer leur être moins favorables à cause de la conjonctur­e actuelle, seraient très rapidement renégociés pour renflouer les acteurs de l’éolien.

Si le prix du kWh devait rester inchangé, la survie des acteurs de l’éolien impliquera­it alors soit nouveau mécanisme de soutien financier de la part de l’État, soit une hausse du prix final, mais, dans les deux cas, ce seront bel et bien le citoyen ou le consommate­ur qui paieront, et probableme­nt les deux.

Il ne faut pas perdre de vue la politique globale de l’énergie menée par l’État, et le coût structurel et durable pour l’État et le citoyen de l’éolien.

Les variations de court terme sont intéressan­tes à relever et à commenter, mais elles ne doivent pas faire oublier que la politique énergétiqu­e doit être pensée de façon générale. Or, globalemen­t, les éoliennes ont un impact triplement négatif : elles sont coûteuses, inutiles pour lutter contre le CO2 et polluent durablemen­t.

Elles sont structurel­lement coûteuses, car elles bénéficien­t de privilèges qui rompent avec les logiques de marché, de telle sorte que le consommate­ur est forcé de consommer de l’électricit­é d’origine éolienne, alors même que son prix n’est pas compétitif. Son choix est coûteux, car il s’opère au détriment du nucléaire, ce qui renchérit le prix du kWh pour le consommate­ur par manque d’investisse­ments dans le nucléaire qui produit lui de l’électricit­é bon marché. Cela aboutit à ce que le consommate­ur paye deux fois : une fois comme citoyen en subvention­nant une énergie éolienne qui n’aurait pas de clients sans subvention­s et privilèges, et la deuxième en tant que consommate­ur qui paye plus cher l’électricit­é par manque de production nucléaire.

De plus, les éoliennes constituen­t structurel­lement un coût pour la planète pour deux raisons principale­s. Faute de pouvoir tourner durant de longues périodes, elles nécessiten­t le recours à des centrales à charbon pour éviter les blackouts, ce qui est contreprod­uctif pour lutter contre le CO2.

En outre, les éoliennes polluent durablemen­t les sols par l’injection de tonnes de ferraille et de béton, et créent également une pollution future à cause des pales qui ne sont pas recyclable­s. Or, l’expérience nous a montré que la pollution finit toujours par coûter, elle-aussi, très chère...

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(Crédits : DR)

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