La Tribune

Les Bourses européenne­s capitulent face à la menace de l’inflation…ou de la récession

- Eric Benhamou

Les marchés actions et obligatair­es restent particuliè­rement nerveux. La menace d’une accélérati­on du resserreme­nt monétaire de la Fed est écartée mais les investisse­urs doutent de la capacité de la banque centrale américaine de gérer la lutte contre l’inflation sans casser la croissance. Dans ce sillage, les Bourses européenne­s terminent nettement dans le rouge et CAC 40 cède plus 4% sur la semaine pour enfoncer le seuil des 6.300 points.

Les marchés actions ont finalement décroché, et une fois de plus, la tempête est venue des Etats-Unis. Certes, la Fédérale Réserve s’est montrée moins agressive que prévu, à l’issue des deux jours de réunion de son comité de politique monétaire, en écartant le scénario d’une accélérati­on de son resserreme­nt monétaire, malgré une très forte inflation. Au final, la banque centrale américaine s’est contentée, comme prévu, d’augmenter ses taux de référence de 50 points de base, et non de 75 points de base comme certains le redoutaien­t.

« Les banques centrales tiennent un discours très ferme mais laisse finalement les marchés agir à leur place », estime un gérant obligatair­e. « Elles ont beaucoup perdu en crédibilit­é et c’est pourquoi nous assistons à un krach obligatair­e depuis le début de l’année », ajoute-t-il.

Places européenne­s dans le rouge

C’est le point de crispation sur les marchés. Ces derniers doutent désormais de la capacité de la Fed à enrayer l’inflation sans casser la croissance. Le spectre de la récession en 2023 surgit même aux Etats-Unis, comme en témoigne l’aplatissem­ent de la courbe des taux. Un scénario encore impensable il y a un mois à peine.

Les Bourses européenne­s capitulent face à la menace de l’inflation…ou de la récession

Du coup, les valeurs de croissance (à cause des taux) et les valeurs cycliques (ralentisse­ment économique) plongent de concert, à l’exception du pétrole et des matières premières. Après un jeu de montagnes russes, les indices américains résistent cependant sur la semaine, avec le trou noir de jeudi, une séance plombée par les valeurs de technologi­e.

Plus surprenant est le décrochage des Bourses européenne­s, au terme d’une saison de publicatio­n de résultats trimestrie­ls plutôt de bonne facture. Ainsi, le CAC 40 cède plus de 4% sur les cinq dernières séances, pour enfoncer le seuil des 6.300 points. Idem pour l’Euro Stoxx 50 et les autres indices européens.

Comme rien n’est simple sur les marchés, c’est plutôt les bons chiffres de l’emploi aux Etats-Unis qui semblent avoir effrayé ce vendredi les investisse­urs. Pas de chance, la croissance est toujours forte outre-Atlantique, ce qui ouvre la porte à une succession de relèvement de taux aux Etats-Unis de 50 points de base en juin, juillet et peut-être même septembre (a priori exclu). Entre crainte de l’inflation ou peur d’une récession, les marchés ne savent plus vraiment à quel saint se vouer pour vendre. Tout cela entraîne beaucoup de volatilité, au plus grand profit des opérateurs de marché.

Toujours pas d’alternativ­e

Reste que, selon un responsabl­e des investisse­ments d’une société de gestion, « à 6.300 points, les actions commencent à redevenir attractive­s ». Les actions américaine­s ont fortement baissé depuis janvier, les actions européenne­s un peu moins, mais compte tenu des résultats publiés et même de révisions plutôt haussières sur les perspectiv­es de résultats 2022, le prix des actions est revenu à des niveaux de 2017, soit environ 18 fois les profits sur le S&P 500 et 13 fois sur le CAC 40.

Les investisse­urs pourraient alors revenir tactiqueme­nt sur les actions, d’autant que l’alternativ­e sur le crédit fait encore peur. La baisse a été en effet violente - plus de 10% sur les taux longs en trois mois - et beaucoup anticipent toujours une nouvelle poussée de fièvre sur les taux obligatair­es.

De quoi décourager les téméraires qui seraient tentés par des rendements devenus beaucoup plus intéressan­ts sur la dette senior de qualité. Mais il n’y a toujours pas beaucoup d’acheteurs, excepté les assureurs. Les fonds crédit étaient même en décollecte à la fin du mois d’avril. Il reste encore beaucoup de liquidités à placer et les actions apparaisse­nt toujours comme un refuge. Sous réserve bien sûr d’une forte dégradatio­n de la situation en Ukraine.

 ?? ?? Le CAC revient sur les 6.200 points, ce qui rend les actions plus attractive­s, faute d’alternativ­e. (Crédits : SARAH MEYSSONNIE­R)
Le CAC revient sur les 6.200 points, ce qui rend les actions plus attractive­s, faute d’alternativ­e. (Crédits : SARAH MEYSSONNIE­R)

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