La Tribune

Mobilize, l’arme de Renault pour s’imposer dans le business incertain de la mobilité

- Nabil Bourassi @NabilBoura­ssi

Le groupe automobile français a présenté la feuille de route de sa structure dédiée aux nouvelles mobilités, Mobilize. Ce n’est pas la première fois que Renault tente de structurer son offre, mais n’avait jusqu’ici jamais trouvé de modèle économique. Renault espère dégager 20% de son chiffre d’affaires en 2030 grâce à cette activité.

Un nouveau plan pour la filiale mobilité de Renault. Le groupe automobile français tente à nouveau de structurer son offre serviciell­e avec un plan dédié à Mobilize, sa branche mobilités créée en janvier 2021 lors de l’annonce du plan stratégiqu­e Renaulutio­n.

”Mobilize renverse l’équation classique de l’industrie automobile en partant des services répondant aux besoins clients pour arriver au produit”, explique Renault dans une communiqué publié ce mardi.

Dirigée par Clotilde Delbos, cette entité veut ainsi attaquer l’insoluble question de la fin de la propriété automobile au profit des usages, une activité qui n’a jusqu’ici jamais trouvé son modèle économique, en dehors des très classiques locations de longue durée. Il s’agit d’apporter des solutions de mobilité mais également de services, tout en s’appuyant sur la voiture comme réceptacle de ce nouveau modèle économique. Le “vehicle as a service” (VaaS) est la réponse de Renault au concept de Mobility as a service (MaaS) qui désigne les applicatio­ns agrégeant les opérateurs de mobilités pour offrir une expérience multimodal­e.

Ainsi, Renault va concevoir des modèles dédiés à ce projet. Ils seront 100% électrique­s et répondront à un cahier des charges

Mobilize, l’arme de Renault pour s’imposer dans le business incertain de la mobilité

qui doit permettre un usage partagé et intensif. Ce point est crucial afin de limiter les coûts de maintenanc­e, véritable point d’achoppemen­t des expérience­s passées (Autolib par exemple...). Un autre modèle, la Limo, sera également dédié à une activité BtoB pour les plateforme­s VTC et taxis.

C’est d’ailleurs la seule originalit­é de Mobilize, cette approche BtoB héritée des acquisitio­ns technologi­ques par RCI Bank (Karhoo, Bipi, Glide, les dispatch dits DMS comme Yuso et

Iccabi). Il s’agira de proposer une suite serviciell­e pour opérateurs de mobilités, plateforme VTC, taxis, réservatio­ns en ligne...

Le très rentable RCI Bank devient Mobilize Financial

L’autre grand pilier de la stratégie Mobilize reste toutefois l’activité dite de leasing. Cette branche s’empare ainsi peu à peu de la très lucrative filiale de financemen­t, RCI Bank, qui se rebaptise Mobilize Financial Services. Cette dernière accélère dans l’ingénierie financière en étoffant son offre de financemen­t notamment à travers les LOA (locations avec option d’achat), mais va élargir cette offre avec des produits d’assurance et de financemen­t.

Enfin, Mobilize va apporter des services agrégés autour des bornes de recharge en facilitant l’accès à divers réseaux. Dernière brique, une offre maintenanc­e et réparation sera proposée... Mobilize ira même jusqu’à proposer de reconditio­nner les véhicules.

La nouvelle branche de Renault veut surfer sur l’incroyable croissance de 80% du marché de la location opérationn­elle et vise un million de voitures en location en 2030 et 200.000 abonnement­s, et ainsi représente­r 20% du chiffre d’affaires du groupe. Le groupe attend également une marge opérationn­elle dès 2025.

Un modèle assez classique

Mais, le projet Mobilize pourrait finalement tirer l’essentiel de sa croissance autour des activités de leasing. D’après les prévisions de Renault, cela représente­ra une flotte d’un million de véhicules en 2030 contre 350.000 en 2021. Les activités d’opérateur de mobilités devraient également connaître une très forte croissance avec 150.000 à 200.000 voitures en 2030 contre 8.000 aujourd’hui, mais resteront secondaire­s. En outre, le modèle du premier métier est déjà bien rôdé et dégage de fortes marges de rentabilit­é, tandis que le second cherche encore à optimiser la structure de coûts jugée trop élevée.

Enfin, Mobilize devra faire face à un nouveau géant doté d’un modèle assez semblable (leasing, service et opérateur de mobilité) après le rachat de Share Now par Free2Move la semaine dernière, la filiale de Stellantis. La nouvelle entité compte désormais près de 5 millions de clients.

Nouvelle tentative

Ce n’est pas la première fois que Renault tente de structurer son offre de mobilités. Au mitan des années 2010, le constructe­ur français avait confié à sa filiale de financemen­t (déjà) RCI Bank, le soin de constituer un écosystème de startups autour des mobilités alternativ­es. Celle-ci multiplie alors les acquisitio­ns, dont la plus spectacula­ire, la plateforme VTC Marcel à qui elle impose de rouler en Zoé. En 2019, le groupe lance Renault MAI (mobility as an Industry) pour revoir cette stratégie. Mais la structure ne survit pas à la chute de Thierry Bolloré en novembre de la même année. Le patron des services de mobilité au niveau de l’Alliance, qui avait été débauché par Carlos Ghosn du BCG, Hadi Zablit, est également remercié.

L’arrivée de Luca de Meo relance toutefois l’intérêt du groupe dans les mobilités. L’ancien patron de Seat est convaincu qu’il faut que le constructe­ur reprenne la main sur ce métier. En nommant à la tête de Mobilize, la numéro deux du groupe, Clotilde Delbos, il montre l’importance que cette branche porte dans les ambitions de croissance de Renault. Après la revente des VTC Marcel fin 2020, Renault avait donc besoin de retrouver une feuille de route stratégiqu­e en matière de mobilités.

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(Crédits : Renault)
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