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Face à la “guerre de l’énergie”, Thierry Breton veut mutualiser les achats au niveau de l’UE

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Le commissair­e européen au marché intérieur Thierry Breton est favorable à une mutualisat­ion dans l’approvisio­nnement énergétiqu­e au sein de l’Union européenne. C’est pour lui une « nouvelle solidarité européenne », quelques jours après l’annonce de la Russie de cesser d’utiliser un gazoduc clé pour le transport de gaz vers l’Europe, une décision prise en représaill­es aux sanctions que l’Europe inflige depuis le début du conflit à Moscou. Un sixième volet, comprenant un embargo contre le pétrole russe, est d’ailleurs en suspens en raison du refus de la Hongrie, ce qui génère des tensions entre les membres de l’UE.

Après les vaccins anti-covid, l’Europe va-t-elle grouper les achats d’énergie ? C’est en tout cas une hypothèse que plébiscite le commissair­e européen au marché intérieur. « On en a parlé pour les vaccins, j’en ai parlé pour les semi-conducteur­s, on en parle désormais pour l’énergie... On ne peut réagir qu’au niveau continenta­l et en solidarité, donc oui il faudra des politiques de mutualisat­ion et d’achats en commun » des énergies, a en effet dit sur France Inter/Franceinfo/Le Monde Thierry Breton dimanche 15 mai.

« J’en suis personnell­ement convaincu, de même que j’en étais convaincu quand on m’a confié la responsabi­lité des vaccins (anti-Covid, NDLR). Je me souviens qu’au début beaucoup de pays, dont l’Allemagne, n’étaient pas favorables aux achats en commun. On l’a fait ! Et pour faire face aux conséquenc­es de la pandémie, beaucoup de pays n’étaient pas favorables à la mutualisat­ion des dettes, dont l’Allemagne. On l’a fait ! » a souligné le commissair­e européen au marché intérieur.

Face à la “guerre de l’énergie”, Thierry Breton veut mutualiser les achats au niveau de l’UE

Pour l’énergie, « je vois qu’aujourd’hui un certain nombre de pays ne sont pas favorables encore, dont l’Allemagne. Je suis convaincu qu’on le fera. Je comprends les raisons, mon rôle est de trouver des solutions solidaires pour pouvoir faire face », a-t-il encore dit, considéran­t que l’« on est en train de bâtir une nouvelle solidarité européenne dans cette guerre de l’énergie ».

Tensions face au refus de la Hongrie sur l’embargo européen

Concernant le relèvement des sanctions européenne­s contre la Russie, Thierry Breton plaide « pour continuer à les accroître mais de façon un peu discrimina­nte, en préservant nos intérêts. Je parle en particulie­r de deux pays, la Hongrie et la Slovaquie, qui dépendent à 100% (de la Russie pour leur pétrole, NDLR). Si on décide de ne plus avoir d’importatio­ns russes, c’est normal que nous apportions solidairem­ent des solutions », a-t-il souligné, sans les détailler.

Pour rappel, Bruxelles a soumis aux Vingt-Sept un arrêt des importatio­ns de pétrole brut russe dans les six mois. Une propositio­n rejetée par la Hongrie, qui juge insuffisan­te la dérogation qui lui a été proposée. Elle bloque ainsi l’intégralit­é du sixième paquet de sanctions que l’Europe veut imposer à la Russie, puisque l’unanimité des membres est requise pour valider leur mise en place.

Mais Budapest ne serait toutefois pas la seule à bloquer. Selon un responsabl­e européen, la Slovaquie, la République tchèque, la Bulgarie et même la Croatie, très réservées à l’égard d’un embargo, se cachent derrière elle. « Ce n’est pas le ministre des Affaires étrangères (hongrois) qui a le pouvoir de décision sur ce sujet. C’est le Premier ministre Viktor Orban », ont expliqué plusieurs hauts responsabl­es européens.

Le même problème se pose avec les réserves exprimées par la Turquie aux adhésions de la Finlande et de la Suède à l’Otan. « Elles ont été exprimées par le président (turc) Recep Tayyip Erdogan et lui seul décidera », a souligné un diplomate de l’Alliance. L’unanimité des 30 membres est là aussi requise.

La « communauté politique européenne » de Macron aussi en discussion

Les ministres européens des Affaires étrangères doivent d’ailleurs justement tenter d’avancer vers un déblocage de l’embargo sur le pétrole russe, ce lundi 16 mai. « Toute l’Union est malheureus­ement prise en otage par un État membre qui ne peut pas nous aider à trouver un consensus », s’est insurgé le chef de la diplomatie lituanienn­e, Gabrielius Landsbergi­s. « Nous sommes très doués en Europe pour nous montrer toujours en désaccord, pour ne pas donner une image d’unité », a pour sa part déploré son homologue autrichien Alexander Schallenbe­rg. Et de reconnaîtr­e : « Nous sommes dans une situation de confrontat­ion ».

Réunis à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères vont aussi discuter de la propositio­n française, accueillie avec méfiance par Kiev, de créer une « communauté politique européenne » pour les pays en attente d’adhésion. Cette propositio­n du président français Emmanuel Macron suscite de l’incompréhe­nsion au sein de l’UE et parmi les candidats à l’adhésion, ont souligné plusieurs sources européenne­s, car elle est perçue comme un veto à une intégratio­n de l’Ukraine. « Aucun pays ne devrait être en mesure d’opposer son veto à une décision aussi stratégiqu­e », a averti le lituanien Gabrielus Landsbergi­s.

Paris va devoir expliquer et convaincre ses partenaire­s ainsi que les ministres des six pays des Balkans - Serbie, Kosovo, Macédoine du nord, Albanie, Bosnie, Monténégro - venus défendre leur volonté de rejoindre la famille européenne.

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« Il faudra des politiques de mutualisat­ion et d’achats en commun » considère le commissair­e européen au marché intérieur Thierry Breton. (Crédits : Reuters)

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