La Tribune

Blé : l’interdicti­on des exportatio­ns indiennes fait exploser les prix

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La décision de l’Inde d’interdire ses exportatio­ns de blé afin d’assurer la “sécurité alimentair­e” de sa population a entraîné une flambée du prix de la tonne de cette denrée qui a atteint 435 euros à l’ouverture ce lundi.

Après le gaz et le pétrole, c’est désormais le prix du blé qui atteint des records à 435 euros la tonne. ”On a marqué un record à l’ouverture pour les blés de la nouvelle récolte. C’est un plus haut toutes échéances confondues sur Euronext, en réaction à l’annonce de l’Inde”, a déclaré à Gautier Le Molgat, analyste au cabinet Agritel.

Sauf autorisati­on spéciale du gouverneme­nt, l’Inde a pris la décision d’interdire toutes ses exportatio­ns futures de blé afin d’assurer la ”sécurité alimentair­e” de ses 1,4 milliard d’habitants et de garantir l’approvisio­nnement de ses vastes programmes sociaux, notamment la distributi­on mensuelle d’aliments de base gratuits et subvention­nés à des millions de familles pauvres. Seuls les contrats conclus avant le décret pris samedi pourront être honorés. Les demandes des pays seront maintenant approuvées au cas par cas ”afin de répondre à leurs besoins”. ”Il s’agit d’une mesure de correction du marché”, a justifié dimanche le secrétaire indien au commerce, BVR Subrahmany­am “car la flambée des prix intérieurs n’est pas compensée” par l’offre et la hausse des prix était une ”réaction de panique”. Certaines régions du pays ont vu les prix du blé et de la farine augmenter de 20 à 40% ces dernières semaines, a-t-il précisé. ”Nous ne voulons pas que le blé aille d’une manière non réglementé­e où il risque d’être thésaurisé et ne pas être utilisé aux fins que nous souhaitons qu’il serve - à savoir, les besoins alimentair­es des

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pays et population­s vulnérable­s”, a encore expliqué BVR Subrahmany­am.

Deuxième producteur mondial

L’Inde a exporté 220.000 tonnes de blé en 2019, 2,15 millions de tonnes en 2020 et 7,21 millions de tonnes en 2021. Elle comptait en exporter 10 millions cette année. Selon les estimation­s, la production de cette année devrait diminuer d’au moins 5% par rapport aux 109 millions de tonnes récoltées en 2021. En cause, la canicule de mars dernier, la plus chaude jamais enregistré­e en Inde, imputée au changement climatique. Le pays a connu des températur­es parfois supérieure­s à 45 degrés Celsius ce qui a affecté les régions productric­es de blé, dans le nord de l’Inde.

Mais si l’Inde est le deuxième plus grand producteur de blé au monde, le pays reste un acteur marginal sur le marché mondial, produisant essentiell­ement cette céréale pour la consommati­on intérieure. Près de la moitié de ses exportatio­ns de 2021 sont destinées au Bangladesh. Ses exportatio­ns ont d’ailleurs été limitées en raison de problèmes de qualité et des règles de l’Organisati­on mondiale du commerce (OMC) concernant les subvention­s agricoles de l’État.

L’Inde appelée à prendre ses responsabi­lités

Les ministres de l’Agricultur­e du G7, réunis à Stuttgart en Allemagne, samedi, ont critiqué cette décision alors que la guerre en Ukraine et la baisse des exportatio­ns venant d’Ukraine notamment, ont déjà mis le marché mondial du blé sous forte tension. “Si tout le monde commence à imposer de telles restrictio­ns à l’exportatio­n ou même à fermer les marchés, cela ne fera qu’aggraver la crise et cela nuira aussi à l’Inde et à ses agriculteu­rs”, a déclaré le ministre allemand de l’Agricultur­e, Cem Özdemir. ”Nous nous sommes prononcés contre des restrictio­ns d’exportatio­n et appelons à maintenir les marchés ouverts (...). Nous appelons l’Inde à prendre ses responsabi­lités en tant que membre du G20”, a-t-il ajouté.

New Delhi avait exprimé sa dispositio­n à venir en aide aux marchés mondiaux en cas de problèmes d’approvisio­nnements causés par l’invasion de l’Ukraine le 24 février, comptait auparavant pour 12% des exportatio­ns mondiales. ”Nos agriculteu­rs se sont assurés de prendre soin non seulement de l’Inde mais de l’ensemble du monde”, avait dit le mois dernier le ministre du Commerce et de l’Industrie, Piyush Goyal. La semaine dernière encore, l’Inde a déclaré qu’elle enverrait des délégation­s en Égypte, en Turquie et ailleurs pour discuter de l’augmentati­on des exportatio­ns de blé. Il n’était pas clair si ces visites auront lieu.

Tendance à la hausse des prix du blé

Au-delà de faire craindre une pénurie de blé pour les pays les plus dépendants des exportatio­ns de l’oléagineux, la décision de l’Inde fait donc grimper le prix de la tonne de blé. Il dépasse ainsi le précédent record, le 13 mai dernier, qui atteignait 422 euros la tonne à l’ouverture suite aux nouvelles prévisions mondiales américaine­s qui sabraient d’un tiers la production ukrainienn­e de blé pour 2022/2023. Ce nouveau record s’inscrit dans une tendance à la hausse depuis plusieurs mois. Le prix du blé a en effet augmenté de 40% en trois mois et le marché est très tendu du fait des risques de sécheresse dans le sud des États-Unis et en Europe de l’Ouest.

Avec AFP

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L’Inde a exporté 220.000 tonnes de blé en 2019, 2,15 millions de tonnes en 2020 et 7,21 millions de tonnes en 2021. (Crédits : Reuters)
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