La Tribune

Dans le Sud, malgré les crises, « l’économie est résistante » dit la Banque de France

- Laurence Bottero l_bottero

Alors que la crise géopolitiq­ue fait suite à la crise sanitaire et ses conséquenc­es – rajoutant même une couche en matière de difficulté­s d’approvisio­nnement –, en Provence-Alpes-Côte d’Azur le tissu économique confirme sa capacité à faire preuve de souplesse, d’adaptation et d’ingéniosit­é. Ce qui permet de ne pas freiner les projets même si certains secteurs consomment rapidement leurs carnets de commande, tandis que les TPE sont plus fragiles.

Ce sont les chiffres les plus attendus et scrutés. L’économie va-t-elle bien ? Souffre-t-elle, et à quel degré, des conséquenc­es du conflit en Ukraine ? Peut-on parier sur une croissance positive ou pas ? Autant de questionne­ments qui taraudent le monde économique. Engagée dans un mouvement de relance qui faisait espérer un taux de croissance de l’ordre de 3,6% en décembre 2021, l’Hexagone craint que le ressort de la reprise ne se casse.

Avec les conséquenc­es que l’on imagine, dont celle d’entreprise­s, jusqu’àlors résistante­s, qui défaillent.

Si la situation vue d’un point de vue national, préoccupe, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, le tissu économique montre une résistance certaine. « Moins de croissance et plus d’inflation créent davantage d’incertitud­e. Cependant, malgré un contexte difficile, il existe quelques raisons d’espérer », estime Jean-Christophe Ehrhardt, s’appuyant pour cela, sur les données collectées par la Banque de France. Mais aussi sur une lecture de ces mêmes données conjonctur­elles qui change avec les estimation­s ambiantes. Ainsi, si la croissance au premier trimestre s’élève à 0%, cela ne signifie pas de croissance du tout. « Zéro pourcent de croissance, c’est tout de même de la croissance », explique le directeur régional de la Banque de France, qui dit également ne pas craindre la déflation. Et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, « l’économie est plutôt résiliente ».

Dans le Sud, malgré les crises, « l’économie est résistante » dit la Banque de France

Pas de choc d’offre

Si la guerre en Ukraine a bouleversé les prévisions d’un monde à nouveau apaisé et d’une économie qui peut fleurir sereinemen­t, l’impact de celle-ci ne se fait pas véritablem­ent ressentir dans le Sud. « Nous nous attendions à des difficulté­s sur le plan de charge et une érosion de la demande, notamment pour ce qui concerne l’industrie. Or nous n’assistons pas à un choc de l’offre, pour le moment, les difficulté­s d’approvisio­nnement et de recrutemen­t ont des conséquenc­es limitées sur l’activité globale », souligne Jean-Christophe Ehrhardt.

Et cela grâce, notamment, à une capacité des industriel­s à faire autrement. « Nos industries font preuve d’agilité pour modifier leurs sourcings, pour prendre en compte les retards de livraison ». Si un bémol concerne cependant l’électroniq­ue ou le tourisme, les autres secteurs vont preuve de résilience, avec une agilité donc, qui permet aux entreprise­s alpines, provençale­s et azuréennes de se comporter mieux que l’ensemble au niveau national.

Et ce bon comporteme­nt vient du fait que les secteurs qui connaissen­t aujourd’hui une activité qui ne se dégrade pas, voire qui augmente, sont ceux qui ont souffert durant la crise liée au Covid.

« C’est un message qui demeure très prudent, mais en ce début mai, nous ne sommes pas dans la configurat­ion du printemps 2020 », fait remarquer Jean-Christophe Ehrhardt.

D’une résistance à l’autre

Ainsi, les services marchands - dont le secteur ECHR - regardent l’avenir avec un état d’esprit positif. Ce qui vient compenser la moins bonne tenue des services aux entreprise­s, hormis les services en ingénierie, ce qui signifie « que les industriel­s continuent de porter des projets et font appel, pour cela, aux bureaux d’études », indique Jean-Christophe Ehrhardt. L’informatiq­ue connaît également une activité positive, portée par le risque cyber. Côté carnet de commandes, celui inter-industrie, continue également de se maintenir, malgré un léger fléchissem­ent.

Activité positive également dans la constructi­on et le second oeuvre, qui bénéficie de ce contexte résilient, même si le directeur régional de la Banque de France pointe la problémati­que posée par le manque de permis de construire délivrés et par les difficulté­s d’approvisio­nnement de certains matériaux qui pourraient mettre à mal la poursuite des chantiers.

PME/ETI même combat, les TPE fragiles

Si le contexte est globalemen­t favorable, cela signifie-t-il que c’est - aussi - le cas pour les entreprise­s. Oui et non. Car Jean-Christophe Ehrhardt le dit, que l’on soit ETI, PME ou TPE, ce n’est pas tout à fait pareil. Et distinctio­n est faite entre les ETI et PME d’un côté, les TPE de l’autre.

Ainsi, les défaillanc­es, ce tsunami dont on a craint la déferlante post-covid, continuent de demeurer dans des proportion­s de hausse maîtrisée, de l’ordre de 11% sur une année glissante et de 10% depuis le début de l’année. Soit un effet rattrapage en douceur.

Des entreprise­s - 6/10 - majoritair­ement bien cotées et qui sont éligibles aux opérations de refinancem­ent de la Banque de France. « Ceci correspond à la même proportion qu’avant la crise », note Jean-Christophe Ehrhardt, précisant que le sujet remboursem­ent du PGE est lui aussi maîtrisé. « Certaines entreprise­s en ont fait un matelas de trésorerie », tandis que « plus de moitié a déjà commencé le remboursem­ent » du Prêt Garanti par l’Etat. Alors que les encours montrent en désendette­ment certain.

Des indicateur­s qui encouragen­t la confiance

L’optimisme est en revanche moindre du côté des TPE dont certains secteurs souffrent, particuliè­rement celui du commerce de proximité, l’événementi­el et le BTP. Des très petites entreprise­s qui voient les défaillanc­es augmenter de 20% et sont moins résistante­s. Mais sans que cela est, pour l’heure, de conséquenc­e sur la saisie de la médiation du crédit. Et Jean-Christophe Ehrhardt de préciser que la cotation des TPE n’est pas dégradée même en cas de restructur­ation bancaire, un point qui vise à réassurer. Cela n’est, en revanche, pas le cas pour les PME.

Si la conjonctur­e est secouée, les entreprise­s, globalemen­t, conservent leur force de résistance. « Nous en sommes pas béatement sereins, mais les entreprise­s ont été capables de rebondir et continuent à être résiliente­s malgré une nouvelle crise ». D’autant, qu’en forme de soutien, la consommati­on des ménages « est plus segmentée mais n’est pas en baisse », les touristes « de retour » devraient contribuer à soutenir « la demande et l’industrie de proximité », ajoute Jean-Christophe Ehrhardt. 2022, malgré les crises, année de la relance confirmée ?

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(Crédits : DR)

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