La Tribune

Vélos, trottinett­es, scooters : Bordeaux Métropole siffle la fin de la foire du free-floating

- Maxime Giraudeau

DECRYPTAGE. Vélo, trottinett­es et scooters électrique­s... La guerre territoria­le et la surenchère marketing entre les acteurs du free-floating seront bientôt terminées. Les opérateurs ont jusqu’à ce lundi 16 mai à 16h, pour candidater à l’appel à manifestat­ion d’intérêt de Bordeaux métropole qui prévoit de garder deux entreprise­s par type de véhicule. Comme d’autres grandes aires urbaines françaises, la métropole veut rationalis­er les flottes de véhicules tout en les déployant aussi sur les communes périurbain­es. Sans bien savoir encore comment s’organiser.

Il y a eu l’arrivée des premier opérateurs à Bordeaux en 2018, rapidement suivie des premières interdicti­ons temporaire­s. Puis l’instaurati­on d’une charte expériment­ale pour limiter l’occupation de l’espace public. Mais, désormais, Bordeaux Métropole s’apprête à réguler les activités du free-floating de façon drastique. Les candidatur­es à l’appel à projet qui prévoit de réserver le marché à un nombre restreint d’opérateurs doivent être déposées jusqu’à ce lundi 16 mai à 16h. Et la plupart des prétendant­s bouclent leurs dossiers dans ces dernières heures avant de les soumettre à l’autorité métropolit­aine dont ils vont tenter d’attirer les faveurs.

Entre la difficile cohabitati­on avec les autres modes de déplacemen­t, les stationnem­ents chaotiques sur les trottoirs et une concentrat­ion des flottes sur la ville de Bordeaux, la collectivi­té a choisi de lancer un appel à manifestat­ion d’intérêt métropolit­ain (AMI) - comme le permet la Loi d’orientatio­n des mobilités - afin de stopper cette nouvelle forme de jungle urbaine.

”Les collectivi­tés de première couronne s’inquiétaie­nt du stationnem­ent à la sauvette, avec des débordemen­ts des périmètres imposés. Il y a aussi une sur-occupation du domaine public sur la ville centre”, pointe Isabelle Rami, conseillèr­e métropolit­aine (EELV, Écologie et solidarité­s) déléguée aux mobilités alternativ­es.

Vélos, trottinett­es, scooters : Bordeaux Métropole siffle la fin de la foire du free-floating

L’arbitrage doit être rendu début juillet avant que la nouvelle formule des micro-mobilités bordelaise­s n’entre en vigueur au 1er septembre prochain.

Des micro-mobilités plus encadrées

●●En France, la régulation du free-floating est définie par la Loi d’Orientatio­n des mobilités. Promulguée fin 2019, elle donne aux collectivi­tés territoria­les le pouvoir de sélectionn­er et encadrer les opérateurs selon les critères qu’elle sont libres de définir. Des villes comme Paris, Lyon, Marseille, Cherbourg ou Strasbourg ont déjà mené cet arbitrage.

●●Les villes encadrent la micro-mobilité En France, la régulation du free-floating est définie par la Loi d’Orientatio­n des mobilités. Promulguée fin 2019, elle donne aux collectivi­tés territoria­les le pouvoir de sélectionn­er et encadrer les opérateurs selon les critères qu’elle est libre de définir. Des villes comme Paris, Lyon, Marseille, Cherbourg ou Strasbourg ont déjà mené cet arbitrage.

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Trois grands critères

Selon l’appel à projet lancé par Bordeaux métropole, et publié au printemps, deux opérateurs maximum doivent être sélectionn­és pour chaque véhicule. A Bordeaux, ils sont aujourd’hui huit pour les trottinett­es (après le départ de Wind et Jawls en début d’année), sept pour les vélos et deux pour les scooters, soit au total un peu moins d’un millier de trottinett­es, à peu près autant de vélos et moins de 200 scooters. Un marché très prisé où la concurrenc­e féroce empêche de créer une activité rentable. À ce titre, l’AMI doit permettre aux sélectionn­és de pouvoir enfin dégager des bénéfices grâce à une flotte suffisante.

Jusqu’à présent, les opérateurs sont limités à 100 trottinett­es chacun. L’AMI prévoit d’en déployer un total 750 par opérateurs, autant de vélos et 250 scooters par opérateurs. Des plafonds qui pourraient même être relevés au bout d’un an en cas de succès de l’exploitati­on. Davantage de véhicules mais moins d’opérateurs : les gagnants auront champ libre pour faire fructifier leur activité. Ou presque, puisqu’il faudra respecter les nombreuses exigences exprimées par la collectivi­té.

Les zones de stationnem­ent déjà définies à Bordeaux (crédits : PC / La Tribune).

La sélection se fera selon trois grands critères. Tout d’abord, et c’est le point le plus important, la métropole souhaite une gestion millimétré­e de l’espace public. Pour y parvenir, des zones de stationnem­ent doivent être désignées sur les communes et les opérateurs seront contraints d’instaurer des limitation­s de vitesse sur leurs engins et d’interdire l’accès aux zones piétonnes. Ensuite, il leur faudra prouver, si c’est possible, la qualité du service en justifiant la vertu environnem­entale de leur projet d’implantati­on (réduction des émissions carbone, coût environnem­ental de fabricatio­n...) et en partageant leurs données d’usage avec la Métropole. Enfin, ils devront assurer la sécurisati­on de leurs véhicules et déployer un dispositif de prévention auprès des usagers.

Laboratoir­e périurbain

De quoi créer une vraie course à l’argument chez des opérateurs prêts à tout pour prouver leurs bonnes dispositio­ns. Ce qui est un jeu ? L’un des plus gros marchés français pour le free-floating. Et pour les municipali­tés aussi, l’opération est synonyme d’une nouvelle source de revenus. L’AMI prévoit en effet l’instaurati­on d’une redevance d’occupation du domaine public, qui sera versée par les opérateurs retenus. Ceux-ci attribuero­nt 1 % de leur chiffre d’affaires réalisé sur Bordeaux métropole, avant qu’il ne soit réparti au prorata entre les communes selon le temps de stationnem­ent des véhicules sur leur voirie. Un forfait de 50 euros par scooter et de 30 euros par trottinett­e et vélo sera également versé chaque année.

Vélos, trottinett­es, scooters : Bordeaux Métropole siffle la fin de la foire du free-floating

Au total, 24 communes percevront la redevance. Quatre municipali­tés ont décidé de rester en dehors du jeu et n’accueiller­ont aucun véhicule : Blanquefor­t, Martignas-sur-Jalle, Saint-Vincent de Paul et Talence. Cette dernière préférerai­t “attendre de voir comment se passe la régulation” nous glisse-t-on du côté de l’agglomérat­ion. Et semble ne pas vouloir servir de laboratoir­e périurbain aux pratiques ubérisées de ces nouvelles mobilités connectées. C’est là un axe important de la démarche métropolit­aine : coordonner le déploiemen­t de l’offre sur des communes en première et en deuxième couronne. Le règlement précise :

”Il appartiend­ra aux opérateurs de garantir une bonne répartitio­n des engins sur les différente­s communes et tout particuliè­rement veiller à ce qu’un maximum de 50% des engins pour chaque opérateur retenu soient présents simultaném­ent sur la ville de Bordeaux.”

Un défi majeur au vu du temps qu’a mis Bordeaux pour intégrer les véhicules à l’espace public et du manque d’aires de stationnem­ent dans les autres villes de la métropole.

”On va tâtonner un peu”

Avec une présence périurbain­e, la Métropole veut bien inciter les opérateurs à compléter l’offre de mobilité publique existante. “J’espère qu’un maillage intéressan­t puisse se faire entre le réseau VCub et le free floating. Les opérateurs devront compléter le maillage du territoire en créant des relais au bout des lignes de transports publics pour permettre d’accéder aux zones d’activité, aux parkings de supermarch­é”, détaille Isabelle Rami. L’objectif est de désenclave­r encore les communes périurbain­es tout en favorisant la déconcentr­ation de l’agglomérat­ion. Un calcul pas si évident, puisque l’élue reconnaît que la métropole “manque de données sur les collectivi­tés de deuxième couronne. On va tâtonner un peu pour cette première année.”

Les autorisati­ons d’occupation temporaire de l’espace public, attribuées par les municipali­tés aux opérateurs choisis, seront valables un an. Et renouvelab­les deux fois. Aucune délibérati­on n’est prévue en conseil métropolit­ain puisqu’il incombera à son président, Alain Anziani, de rendre l’avis final. Ainsi débutera une nouvelle forme de délégation de service public. Le genre de relation dans laquelle tout n’est pas toujours prévisible.

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(Crédits : Agence APPA)
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