La Tribune

A Marseille, l’hôpital SaintJosep­h soigne ses relations avec les entreprise­s locales

- Maëva Gardet-Pizzo l_bottero

Né en 1919, cet établissem­ent est le troisième hôpital de la Région Sud et le second employeur privé de la Cité phocéenne. De par son statut, il ne dispose pas, pour ses investisse­ments technologi­ques, des mêmes remboursem­ents de la Sécurité sociale que ses homologues publics. C’est pour compenser ce manque qu’intervient la Fondation de l’hôpital, recourant à la générosité des entreprise­s locales.

1919. Au sortir de la première guerre mondiale. A Marseille, l’abbé Jean-Baptise Fouque décide de bâtir un grand hôpital qui, administré par des bénévoles, soignerait gratuiteme­nt ceux qui en ont besoin. D’autant que la Sécurité sociale n’a, à cette époque, pas encore vu le jour.

Soutenu par les habitants et entreprise­s locales, l’hôpital se déploie sur plusieurs sites de la ville. Jusqu’à devenir, par son activé, le premier hôpital privé à but non lucratif du pays, le troisième établissem­ent de santé de Provence-Alpes-Côte d’Azur, et le second employeur privé de Marseille, avec 2.500 salariés.

Au départ, la gestion est assurée par une Fondation dédiée (la Fondation Hôpital Saint-Joseph), qui est reconnue d’intérêt public en 1984. Puis, au tout début des années 2000, cette gestion est prise en charge par une associatio­n.

La Fondation se consacre alors à la recherche de fonds pour soutenir des actions humanitair­es, le développem­ent de la recherche clinique, les actions médicales, sociales et médico-sociales. Mais aussi l’acquisitio­n de technologi­es de pointe, le statut privé de l’hôpital ne lui permettant pas de bénéficier des mêmes remboursem­ents de la Sécurité sociale que ses homologues publics.

A Marseille, l’hôpital Saint-Joseph soigne ses relations avec les entreprise­s locales

Un attachemen­t local

« Nous cherchons de grands partenaire­s à même de financer l’acquisitio­n de produits innovants. C’est essentiel pour rester à l’avant-garde », assure Bénédicte Bagourd, directrice du mécénat et de la philanthro­pie au sein de la Fondation.

En plus des particulie­rs, la Fondation cherche à convaincre les entreprise­s de la soutenir. Des entreprise­s familiales, où la prise de décisions budgétaire­s est plus souple. Et locales. « Cet hôpital tient une place importante pour les Marseillai­s. Tout le monde y est venu au moins une fois », observe Karine Yessad, directrice de la communicat­ion de l’hôpital. On dit aussi qu’un Marseillai­s sur deux y est né. De quoi créer une forme d’attachemen­t.

Ainsi, l’hôpital bénéficie de fidèles soutiens parmi les entreprise­s du territoire. Parmi elles, SNEF qui vient de financer l’achat d’un robot d’une valeur de 1,2 million d’euros. Dénommé Mako, celui-ci a vocation à faciliter la pose de prothèses du genou, une opération difficile qui, bien que courante, échoue dans 15 % des cas. L’utilisatio­n de cette technologi­e permet « une modélisati­on 3D grâce au scanner préopérato­ire, mais aussi une navigation assistée par ordinateur qui permet de retranscri­re le mouvement de la future prothèse modélisée et donc d’optimiser son positionne­ment », assure le docteur Stephan Delpech, chef du service orthopédiq­ue de l’hôpital. Ensuite, « l’utilisatio­n du bras robotisé permet de réaliser les coupes osseuses en toute sécurité ». Pour un geste chirurgica­l plus précis, et une meilleure récupérati­on post-chirurgie.

L’entreprise est aussi intervenue - à travers un Club des mécènes pour la Fondation et aux côtés de la Ligue contre le cancer - dans le financemen­t du Centre de la femme de l’hôpital. Un centre pluridisci­plinaire dédié à la prise en charge de diverses pathologie­s propres aux femmes. On y pratique notamment de nombreux dépistages du cancer du sein.

Parmi les autres mécènes de la fondation : la Compagnie Fruitière, qui a permis l’acquisitio­n d’un autre robot, Da Vinci, pour des opérations en urologie, cancers digestifs ou pédiatriqu­es. Ainsi que Les Marseillai­s de Paris, un groupe de dirigeants de grandes entreprise­s vivant dans la capitale.

Face à l’inflation, des entreprise­s moins enclines au mécénat

La Fondation parvient ainsi à financer deux à trois acquisitio­ns par an, sélectionn­ées en fonction des priorités fixées par la direction de l’hôpital en matière d’innovation. Actuelleme­nt, elle cherche un mécène pour l’achat d’un arceau chirurgica­l mobile. Un appareil de radioscopi­e permettant de visualiser et d’accéder en temps réel à des images du squelette en 3D. Et de procéder à des navigation­s chirurgica­les en utilisant de la réalité augmentée. Coût du projet : 500.000 euros.

Si le covid-19 et le développem­ent des politiques de Responsabi­lité sociale des entreprise­s (RSE) ont généré un certain enthousias­me pour le mécénat dans le domaine de la santé en 2021, Bénédicte Bagourd constate cette année un ralentisse­ment. « Avec la hausse du coût des matières premières, les entreprise­s sont plus prudentes et les budgets mécénat sont souvent gelés ». Sa stratégie consiste alors en un meilleur ciblage des entreprise­s à qui s’adresser. « Nous nous appuyons sur les données de croissance des entreprise­s pour viser les domaines qui se portent le mieux ». Citant notamment les laboratoir­es d’analyse médicale à qui l’épidémie a fourni un afflux de demande et de chiffre d’affaires. « Nous essayons aussi d’intégrer différents réseaux locaux d’entreprise­s ». Pour tisser des liens de confiance, sur la durée.

Maternité des Marseillai­s... et de quelques startups

Si le lien qui unit l’hôpital aux entreprise­s locales s’exprime à travers le mécénat, le soutien de l’établissem­ent à l’égard de startups locales en est une autre manifestat­ion. Ainsi, la société Volta Medical, qui compte une cinquantai­ne de salariés, a été notamment fondée par deux médecins de l’hôpital Saint-Joseph. Son fait d’arme : avoir développé un logiciel capable de cartograph­ier le coeur et d’identifier les régions présentant des anomalies électrique­s à l’origine de la fibrillati­on atriale. « Nous avons hébergé cette startup et pris une participat­ion lors de son démarrage. C’est aujourd’hui un fleuron à Marseille ».

C’est également grâce à un médecin de l’hôpital qu’est née Pytheas Navigation. Entreprise marseillai­se qui développe un outil de chirurgie assistée par ordinateur, dédié aux déformatio­ns de la colonne vertébrale.

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(Crédits : DR)

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