La Tribune

Pour Relais vert, la croissance est dans la diversific­ation

- Maëva Gardet-Pizzo l_bottero

Après des années de croissance à deux chiffres, les magasins spécialisé­s bio assistent à une réduction de leur activité. Pour Relais vert, grossiste bio installé à Carpentras qui les approvisio­nne, l’heure est donc à la diversific­ation. Diversific­ation des canaux de distributi­on. Mais aussi des sources d’approvisio­nnement grâce à un travail sur les filières.

Un « rééquilibr­age ». C’est ainsi que Jérémie Ginart, président de Relais vert, qualifie la baisse des ventes de produits bio. « En 2020 et 2021, le bio a connu une croissance assez folle. Les magasins bio ont superperfo­rmé ». Des résultats portés par le confinemen­t qui a mis en suspens les dépenses de loisirs et donc accru celles destinées à l’alimentati­on à domicile. Par des interrogat­ions vis-à-vis de l’agricultur­e convention­nelle. Par le besoin de proximité qu’incarnent bon nombre de magasins bio. Par davantage de temps libre... Puis la vie a repris son cours et les habitudes anciennes ont ressurgi.

S’ensuit le dérèglemen­t de la logistique mondiale. Les difficulté­s d’approvisio­nnement. L’invasion de l’Ukraine par la Russie, les sanctions visant cette dernière ... Dont résulte l’actuel épisode d’inflation. « Les produits bio sont plus chers. Alors la demande pour le bio baisse. Nous le ressentons y compris chez nous. Cette inflation est brutale mais cela fait longtemps que nous n’en avions pas connu. Ce sont des cycles ». Quid des producteur­s ? « Il est certain que cela remet en question leur potentiel de croissance. Avec une croissance à deux chiffres par an, on s’habitue à voir grand. Mais dans l’agricultur­e, une stabilisat­ion est quelque chose d’acceptable, contrairem­ent à l’industrie ».

Restaurati­on hors foyer et export comme nouveaux débouchés

Une mauvaise étape à passer en somme. Qui conduit néanmoins l’entreprise à diversifie­r ses débouchés, chose qu’elle n’avait pas eu l’occasion de faire jusque-là, trop occupée à répondre aux magasins bio. La croissance folle de ceux-ci s’étant calmée, elle peut désormais répondre à d’autres sollicitat­ions.

Pour Relais vert, la croissance est dans la diversific­ation

« Les grossistes de la restaurati­on hors foyer comme Metro ou Pomona cherchent des produits bio. Pour nous, c’est intéressan­t car les volumes sont importants. Et ces magasins développen­t de plus en plus le vrac, ce qui nous convient bien ».

Relais vert reçoit également des demandes venues de l’étranger où des magasins recherchen­t des produits français. Or, il est plus facile de faire appel à un grossiste qu’à une pléthore de producteur­s. « Nous livrons déjà des magasins qui nous ont sollicités au Portugal et en Suisse. Mais nous n’avions pas structuré de développem­ent à l’export ». Le récent recrutemen­t d’un directeur export marque le début d’une stratégie d’accélérati­on en ce sens. Avec pour cible l’Angleterre, l’Espagne ou encore les États-Unis.

Diversifie­r les activités et les approvisio­nnements

Diversific­ation des débouchés donc. Mais aussi des activités. En cinq ans, le grossiste bio - qui dispose de plusieurs marques en son nom - s’est doté d’une mûrisserie de bananes, d’une ferme avicole de 12 000 poules, ou encore d’une fromagerie ardéchoise où l’on transforme du lait de chèvres.

Des investisse­ments qui vont de pair avec le développem­ent de partenaria­ts nouveaux pour améliorer son approvisio­nnement. « Nous avons par exemple mis en place une filière autour des céréales et légumineus­es. Nous achetons à des producteur­s des lentilles, des pois chiches, du blé ou encore des haricots ». Ces produits sont ensuite transformé­s dans un tout nouvel atelier de conditionn­ement de 3000 m², à Monteux. « On fait du triage, du décorticag­e, du conditionn­ement, pour nos marques et pour nos produits à façon ».

Relais vert nourrit également un projet autour de la viande. «En bio, il s’agit d’un petit marché. Dans les magasins bio, la viande n’a pas le vent en poupe. On préfère développer des substituts. Mais nous pensons qu’il est important de reparler d’élevage. Nous avons commencé avec le boeuf. Nous avons maintenant un projet autour du porc, avec plusieurs acteurs français ».

Quant aux fruits secs, l’entreprise, qui avait il y a quelques années des velléités de relocalisa­tion, a désormais des réserves sur une telle possibilit­é. « Je crains qu’il y ait trop d’acteurs d’un coup. On le voit avec la relocation de l’amande en Provence. Or je ne suis pas certain que cette culture soit bien adaptée à notre terroir. D’autant que les épisodes de gel sont de plus en plus récurrents. Il faudra encore quelques années pour voir ce que donneront tous ces projets. Nous y serons attentifs ».

Faire face à la hausse de l’indexation gasoil

Grâce à la diversific­ation de ses activités, Relais vert - qui compte 275 salariés et a réalisé en 2021 un chiffre d’affaires de 187 millions d’euros - espère s’offrir de nouveaux leviers de croissance. Mais si Jérémie Ginart se montre plutôt optimiste quant à l’impact de l’inflation et de la baisse de la demande, il se dit davantage inquiet par l’augmentati­on du prix des matières premières. « Pour la logistique, c’est de plus en plus compliqué. On sait gérer une baisse de chiffre d’affaires. C’est moins le cas face à la hausse de l’indexation gasoil. A ce niveau-là, cela fait froid dans le dos. Quel avenir pour la logistique routière ? ». Faudra-t-il ouvrir une nouvelle succursale comme cela a été fait dans le Nord Ouest, difficile à relier depuis le Sud-Est ? « Cela a un coût. Ce n’est vraiment pas ce que l’on souhaite. Mais si la situation perdure et que cela devient indispensa­ble, il faudra bien s’y résoudre ».

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(Crédits : DR)

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