La Tribune

Nucléaire : coup dur pour la Finlande avant l’hiver, le nouvel EPR d’Olkiluoto 3 a un énième problème

- Latribune.fr

Des dommages ont été détectés dans l’îlot de la turbine du réacteur Olkiluoto 3 pouvant « très probableme­nt » avoir une incidence sur la mise en service régulière du réacteur prévue pour décembre, a annoncé l’opérateur finlandais TVO.

Coup dur pour la Finlande. Alors que l’hiver s’annonce tendu sur le plan énergétiqu­e avec le chamboulem­ent du marché provoqué par la guerre en Ukraine, un nouveau pépin vient perturber le nouveau réacteur EPR Olkiluoto3, dont la mise en service régulière était prévue pour décembre. La poursuite de celle-ci risque en effet d’être décalée après la découverte de dommages été dans l’îlot de la turbine du réacteur. Ces dommages qui n’ont pas d’incidence sur la sécurité nucléaire selon l’opérateur finlandais TVO, risquent d’avoir « très probableme­nt une incidence sur la poursuite de la mise en service d’Olkiluoto 3 et le début de la production régulière d’électricit­é ». Une estimation du calendrier doit être faite dans les prochains jours. Pour rappel, la production régulière devait commencer cet été, mais elle avait été reportée à décembre, après l’observatio­n de « matières étrangères » dans le réchaud à vapeur de la turbine.

Arrêt des livraisons d’électricit­é russes

Le coup est d’autant plus rude pour la Finlande que le pays scandinave comptait sur son nouveau EPR, le plus puissant d’Europe avec une capacité de 1.600 mégawatts, pour compenser l’arrêt des livraisons d’électricit­é russes décidées par Moscou après l’annoncé de la candidatur­e de la Finlande à l’Otan en mai. Celles-ci représenta­ient environ 900 MW, soit 10% de la consommati­on finlandais­e. Pour pallier ce manque,

Nucléaire : coup dur pour la Finlande avant l’hiver, le nouvel EPR d’Olkiluoto 3 a un énième problème

l’Etat finlandais a déjà dû actionner des centrales de réserve au fioul le mois dernier. La Suède peut par ailleurs lui fournir jusqu’à 2.400 mégawatts mais guère plus car elle est est elle-même confrontée à des risques de pénurie et s’appuie régulièrem­ent sur des centrales au fioul de réserve.

Ce nouvel incident intervient alors que le réacteur avait atteint le 30 septembre sa pleine capacité pour la première fois depuis l’annonce de sa constructi­on en 2003. A ce moment-là, il produisait à lui seul environ 20% de l’électricit­é consommée en Finlande (40% en y ajoutant les deux réacteurs existants Olkiluoto 1 et 2). Début octobre, il restait une dizaine de tests à pleine puissance sur Olkiluoto 3, pendant lesquels le réacteur cessera périodique­ment de produire durant plusieurs jours, voire semaines.

Une longue liste de déconvenue­s

Ce nouveau problème s’ajoute à la longue liste de déconvenue­s rencontrée­s par ce réacteur construit par le consortium franco-allemand Areva-Siemens. Celui-ci avait démarré en mars dernier avec 12 ans de retard et une longue série d’échecs et de déboires qui ont en partie expliqué la lourde restructur­ation d’Areva. Dès 2006, trois ans après l’annonce du lancement du chantier, des retards dans la constructi­on de la principale conduite de refroidiss­ement avaient déjà reporté la mise en route du réacteur à 2010-2011. L’agence finlandais­e de sécurité nucléaire STUK avait ensuite demandé en 2009 plusieurs centaines améliorati­ons du fait de « problèmes liés à la constructi­on », ouvrant un conflit entre l’exploitant du futur réacteur, le finlandais TVO, et Areva-Siemens, avec également des critiques sur le gendarme finlandais. Après plusieurs années de litiges et de retards supplément­aires,

Areva avait finalement réglé son différend avec TVO en novembre 2018, en payant une compensati­on de 450 millions d’euros.

Malgré ce fiasco, le soutien au nucléaire civil a progressé ces dernières années en Finlande, stimulé par les préoccupat­ions climatique­s et les tensions énergétiqu­es mondiales. Selon un sondage paru en mai, 60% des Finlandais y sont désormais favorables, un record. Depuis l’annulation en mai du projet nucléaire d’Hanhikivi 1 du finlandais Fennovoima et du russe Rosatom, aucun nouveau projet de réacteur nucléaire n’a toutefois été lancé en dehors d’OL3.

Les déboires de l’EPR

Lancé en 1992 comme le nec plus ultra de la technologi­e nucléaire française, le réacteur pressurisé européen (EPR) a été conçu pour relancer l’énergie nucléaire en Europe, au lendemain de la catastroph­e de Tchernobyl de 1986. Le nouveau modèle était présenté comme offrant à la fois une puissance plus élevée et une meilleure sécurité, mais sa constructi­on s’avère un casse-tête, et pas uniquement en Finlande. En France, la constructi­on de l’EPR de Flamanvill­e, entamée en 2007, a, elle aussi, été affectée par des retards massifs, dus notamment à des anomalies dans le couvercle en acier et la cuve du réacteur. L’EPR a aussi été retenu pour une centrale à deux réacteurs à Hinkley Point, dans le sud-ouest de l’Angleterre, où le chantier a souffert de la pandémie de coronaviru­s. La production d’électricit­é est actuelleme­nt planifiée pour mi-2027, au lieu de 2025 au départ. En Chine, deux EPR ont été lancés à la centrale de Taishan dans le sud-est du pays en 2019. Un des réacteurs, arrêté pendant un an pour un problème d’étanchéité, a repris sa production en août.

 ?? ?? Le réacteur avait atteint le 30 septembre sa pleine capacité pour la première fois depuis l’annonce de sa constructi­on en 2003 (Crédits : Reuters Staff)
Le réacteur avait atteint le 30 septembre sa pleine capacité pour la première fois depuis l’annonce de sa constructi­on en 2003 (Crédits : Reuters Staff)

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