La Tribune

Faurecia : le plan qui voulait enfin séduire les investisse­urs fait flop en Bourse

- Nabil Bourassi @NabilBoura­ssi

En cours de fusion avec Hella, l’équipement­ier automobile français n’est pas parvenu à séduire les marchés de sa feuille de route pour retrouver une santé financière. Après la présentati­on d’un plan stratégiqu­e qui ambitionne de générer un chiffre d’affaires de 30 milliards en 2025 et un flux de trésorerie représenta­nt 4% de son activité, le titre a plongé de plus de 8% ce jeudi. Le groupe pâtit du poids de sa dette.

Patrick Koller a repris son bâton de pèlerin. Ce jeudi 3 novembre, le patron de Faurecia (qui devient Forvia après l’absorption de l’allemand Hella) a de nouveau tenté de convaincre les investisse­urs de la pertinence de sa stratégie de croissance mais surtout de profitabil­ité. Lors de cette journée investisse­urs longue de près de six heures, lui et son équipe ont détaillé et chiffré les différents leviers pour atteindre des objectifs extrêmemen­t ambitieux. Forvia Power 2025 est un plan express de trois ans qui doit permettre à l’équipement­ier, devenu septième mondial après le rachat d’Hella, de retrouver en 2025 ses ratios de profitabil­ité d’avant crise, et de les dépasser en termes de génération de cash.

Le chiffre d’affaires visé en 2025 déjà sécurisé en partie

Il a ainsi maintenu son objectif d’un chiffre d’affaires de 30 milliards d’euros en 2025... Soit deux fois plus qu’en 2021 (qui était une année encore marquée par la crise sanitaire, mais qui n’avait pas encore intégré Hella dans son périmètre. 80% du chiffre d’affaires escomptés au terme du plan Power2025 sont déjà sécurisés, à travers des prises de commandes.

Faurecia : le plan qui voulait enfin séduire les investisse­urs fait flop en Bourse

Pour Patrick Koller, l’essentiel de cette croissance proviendra de deux puissants leviers. Le premier sera l’Asie, dont la part dans le portefeuil­le de commandes doit passer de 30% en 2022 à 56% en 2025. L’autre levier doit être porté par la montée en gamme des ventes à travers les produits les plus innovants. Dans sa présentati­on, le patron de Forvia a rappelé qu’en 2022, 40% des prises de commandes concernaie­nt les modèles premium, et 20% les SUV et les utilitaire­s légers. Soit, deux segments à forte valeur ajoutée et surtout à fort taux de croissance moyen (+8% par an pour le premier, +7% pour le second). Enfin, 36% des commandes concernent des plateforme­s électrifié­es, là aussi, un segment dynamique et lucratif.

A la recherche du profit

Car tout l’enjeu pour Patrick Koller n’est pas seulement de faire la démonstrat­ion que Forvia dispose des leviers pour faire de la croissance organique, mais que cette croissance sera profitable. Dans un contexte de forte inflation et de hausse des taux d’intérêt, la marge semble étroite pour l’équipe de direction.

Patrick Koller veut poursuivre ses efforts de baisse des coûts fixes. Il promet une baisse de 300 millions d’euros en 2025 par rapport à 2022 (dont 150 millions dès 2023). Sur la facture énergétiqu­e, gros sujet d’inquiétude pour les industriel­s, Forvia estime être capable de limiter sa hausse à 1,8 fois, contre 3 fois prévue initialeme­nt.

Au final, Forvia vise une marge opérationn­elle supérieure à 7% et ainsi revenir à son niveau d’avant-crise. Mais Patrick Koller veut focaliser ses efforts sur les flux de trésorerie pour qu’ils atteignent 4% du chiffre d’affaires en 2025. Pour le PDG, c’est le meilleur moyen de juguler la dette du groupe qui pollue sa performanc­e boursière. L’objectif est de ramener la dette à 6 milliards d’euros en 2025 soit 2,4 milliards d’euros en moins.

Hella, le caillou dans la chaussure du désendette­ment

Annoncé à l’été 2021, le rachat d’Hella fait tousser les investisse­urs depuis le début de la guerre en Ukraine. Et pour cause : le secteur automobile et ses perspectiv­es se sont effondrés... Dès lors, le prix payé (6,7 milliards d’euros) est devenu trop cher. Mais pour Faurecia, impossible de faire marche arrière. Seule concession, Hella ne sera contrôlé qu’à 81,6% contre le 100% initialeme­nt prévu.

Toutefois, pour Patrick Koller, le rachat d’Hella ne change rien aux perspectiv­es de marché pour la nouvelle entité. Il juge que la complément­arité des produits sera créatrice de valeur et positionne­ra le groupe sur les segments les plus porteurs.

Le titre Faurecia dévisse en Bourse mais pas celui de Hella

Pour autant, Faurecia a encore beaucoup à faire pour convaincre les marchés. Alors qu’il dégringola­it de près de 64% depuis le début de l’année, le titre du groupe français (Hella dispose encore de sa propre cotation) le cours de Bourse a plongé de près de 8% ce jeudi. Et ce malgré l’annonce de la création d’une nouvelle filiale dédiée aux matériaux durables, Materi’Act, censée générer 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2030.

Faurecia est valorisé moins de 2,7 milliards d’euros à la Bourse de Paris. Cruel paradoxe : Hella grimpe de plus de 25% depuis le début de l’année, et est valorisé plus de 8,4 milliards d’euros. Les détenteurs du titre attendent probableme­nt une opération de rachat des titres restants. Pas certain toutefois que Faurecia s’endette davantage... Au moment où la Réserve Fédérale américaine annonce une nouvelle forte hausse de ses taux et déprime tous les marchés... Le momentum a également été défavorabl­e.

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(Crédits : Charles Platiau)
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