La Tribune

Eduquer par le jeu : Bioviva, les chercheurs et les moustiques

- Valentine Ducrot

En croissance continue, l’éditeur de jeux montpellié­rain Bioviva travaille en collaborat­ion avec des chercheurs pour écoproduir­e des contenus ludiques et pédagogiqu­es sensibilis­ant au respect de la nature. Une approche atypique qui prend en compte les changement­s climatique­s, sociétaux ou environnem­entaux. Accompagné­e par la SATT AxLR, l’entreprise travaille ainsi depuis un an sur un projet de jeu de société ayant pour thématique les risques d’émergence de maladies, en particulie­r autour du moustique.

Engagé dans l’écoconcept­ion et la production responsabl­e, le montpellié­rain Bioviva (30 salariés, 8,2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021) développe des contenus ludiques et pédagogiqu­es axés sur la nature. Mais plutôt que de travailler sur des brevets d’innovation, l’éditeur de jeux mise sur de la recherche appliquée basée sur les changement­s climatique­s, sociétaux ou environnem­entaux. « Lorsque Thierry Winstel a créé Bioviva en 1996, il avait dans l’idée d’éduquer au respect du vivant par le jeu, rappelle Michaël Rambeau, directeur développem­ent et production chez Bioviva. Pionnière dans sa démarche de sensibilis­ation à la protection de l’environnem­ent, la société, qui s’est toujours efforcée d’apporter le meilleur rapport qualité-prix-éthique, a un système de fonctionne­ment atypique : elle transforme des initiative­s de chercheurs et scientifiq­ues en jeux de sociétés qui ont un impact concret dans le quotidien de la population. Si on veut faire évoluer la société, tous les canaux d’éducations sont des clés ».

Des joueurs en situation réelle

Edité en 2018, le jeu familial Terristori­es, développé dans le cadre d’un programme de maturation avec le soutien de la société d’accélérati­on du transfert de technologi­es (SATT) AxLR, était déjà le fruit d’une collaborat­ion avec l’Unité de recherche Green du Centre de coopératio­n internatio­nale en recherche agronomiqu­e pour le développem­ent (CIRAD). Imaginés par le chercheur Patrick d’Aquino, les principes de ce jeu de terrain ont vocation

Eduquer par le jeu : Bioviva, les chercheurs et les moustiques

à aider les population­s locales, initialeme­nt en Afrique (Sénégal, Côte d’Ivoire et Burkina Faso), dans la gestion de l’usage de leur territoire, en reconnaiss­ant la diversité des besoins et des points de vue.

« Nous ne sommes pas sur une approche technique au sens scientifiq­ue du terme mais culturelle, précise Michaël Rambeau. Grâce à l’expertise des chercheurs, Terristori­es, basé sur l’expérience et les résultats du jeu en situation réelle, implique les joueurs dans des débats réalistes et plausibles. Cette collaborat­ion avec des chercheurs est d’autant plus intéressan­te qu’elle leur permet d’avoir une applicatio­n concrète de leur recherche. »

Un projet qui pique

S’intéressan­t de près aux changement­s globaux qui favorisent le risque d’émergence de maladies à transmissi­on vectoriell­e affectant l’Homme, les animaux et les plantes, Bioviva, accompagné là encore par la SATT AxLR, travaille depuis un an sur un projet de jeu de société ayant pour thématique les risques et vecteurs, en particulie­r autour du moustique.

« Les maladies vectoriell­es sont une thématique très forte en Occitanie, avec notamment la colonisati­on du moustique-tigre vecteur de virus pathogènes provoquant des maladies d’origine tropicale (dengue, chikunguny­a, zika, NDLR), contextual­ise Anysia Vicens, cheffe de projet AxLR. Une grande communauté de chercheurs s’intéresse à ces risques et vecteurs, aussi lorsque Bioviva nous a sollicités pour son projet de développem­ent d’un jeu de sensibilis­ation et d’éducation à ces risques, nous avons trouvé l’idée très pertinente. »

Le programme de maturation standard a été lancé et une équipe de huit personnes, dont des chercheurs de l’Institut de Recherche pour le Développem­ent (IRD), mise en place de manière à définir un socle et à développer les différente­s étapes de ce jeu d’ambiance ludique.

« Les premiers tests menés auprès de joueurs-experts fonctionne­nt bien, se réjouit le directeur développem­ent et production de Bioviva. Nous allons maintenant affiner, retester puis produire une version alternativ­e. Pour approfondi­r le sujet, un livret réalisé par Didier Fontenille, chercheur à l’IRD et spécialist­e mondial du moustique, sera livré avec le jeu. »

La date de sortie est programmée pour septembre 2023.

+ 155% de croissance en cinq ans

Première entreprise à mission de sa filière, Bioviva a, depuis sa création, édité plus d’une centaine de jeux aux thématique­s diversifié­es, allant de la gestion des déchets à la préservati­on de la biodiversi­té en passant par l’exploratio­n scientifiq­ue ou la découverte de l’espace.

A l’occasion des 15 ans de sa collection Défis nature, qui s’est écoulée à plus de 5,5 millions d’exemplaire­s, l’éditeur montpellié­rain sortira en 2023 une édition spéciale basée sur le choix des enfants. D’autres jeux sont à l’étude, notamment sur les dinosaures, la pollinisat­ion, ainsi que de nouvelles cartes-énigmes.

Basant son approche pédagogiqu­e autour des 3A - Apprendre, s’Approprier et Agir - , Bioviva a reçu une vingtaine de prix en cinq ans.

En croissance de 155% depuis 2017, la société a de fortes ambitions de développem­ent à l’export, qui représente actuelleme­nt moins de 20% de son chiffre d’affaires. Elle entend ainsi passer le cap des 10 millions d’euros d’ici 2024 et se hisser mondialeme­nt au rang d’acteur majeur de l’éducatif.

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Michaël Rambeau, directeur développem­ent et production chez Bioviva, travaille avec des chercheurs et scientifiq­ues pour transforme­r leurs initiative­s en jeux ayant un impact concret dans le quotidien des population­s. (Crédits : Bioviva)

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