La Tribune

Le retour en grâce inattendu du butane et du propane

- Nathalie Jourdan

Alors qu’on les pensait remisés au rayon des molécules démodées, les gaz de pétrole liquéfié (GPL) regagnent du terrain dans l’industrie à la faveur des tensions sur le marché du gaz naturel.

Au revoir le réseau de gaz, bonjour la citerne. La volatilité des prix du gaz naturel et les risques de ruptures d’approvisio­nnement incitent un nombre croissant d’industriel­s énergo-dépendants à se tourner vers les marchés moins fluctuants du butane et du propane.

En France, les gaz de pétrole liquéfié (GPL) commercial­isés par les distribute­urs proviennen­t en effet majoritair­ement des gisements algériens et norvégiens (70% du total) et pour le reste des raffinerie­s hexagonale­s. La filière est donc peu impactée par la guerre que mène la Russie en Ukraine comme le soulignait, il y a peu, Audrey Galland, directrice de l’associatio­n France Gaz Liquides dans une interview à L’Usine Nouvelle.« Elle ne présente aucun problème d’approvisio­nnement. Cette stabilité rassure les industriel­s. »

Le constat de la porte-parole de l’interprofe­ssion semble se vérifier sur le terrain. En témoigne la hausse des commandes qu’enregistre le GIE Norgal qui exploite, près du Havre, l’un des deux plus gros dépôts français de gaz liquides. Détenu par Antargaz, Butagaz et Vitogaz (groupe Rubis), il se prépare à écouler 20% de volumes supplément­aires à compter de janvier prochain. Sans crainte sur la disponibil­ité, promet son président Felix Charlemagn­e.

« Nous ne pouvons pas accroître les capacités de stockage, mais nous allons augmenter les rotations de navires et camions citernes », précise t-il.

« Un coup de boost » sur un marché en déclin

À l’origine de cette embellie inattendue sur un marché réputé déclinant, le regain d’intérêt des entreprise­s pour le butane et

Le retour en grâce inattendu du butane et du propane

le propane. « Il est vrai que certaines cherchent à s’affranchir totalement ou partiellem­ent de leur dépendance au réseau de gaz », constate un peu dépité un cadre d’Engie. Une assertion confirmée par le président du GIE normand.

« Ce ne sont pas les particulie­rs qui sont à l’origine de ce coup de boost, mais des établissem­ents industriel­s qui veulent sécuriser leur approvisio­nnement et qui s’équipent de gros réservoirs de stockage au prix d’investisse­ments importants ».

Felix Alexandre fait ainsi état de nouveaux contrats signés avec des laiteries, des centrales de production de bitume, des constructe­urs automobile­s « pour leurs cabines de peinture » ou encore des industriel­s de l’agro-alimentair­e, voire des centrales de cogénérati­on. « On parle de clients du gaz naturel pour qui la conversion est facile », explique t-il.

Reste à voir si le mouvement sera durable, ce que l’intéressé ne se risque pas à affirmer. « Ce que je peux vous dire, c’est que les entreprise­s contracten­t des engagement­s sur une durée assez longue de un ou deux ans », précise t-il.

Du côté des principaux opérateurs, on assure être prêt à assumer un surcroît d’activité. « La filière des gaz liquides est en mesure de doubler son soutien », affirmaien­t en juillet dernier Anne de Bagneux, Natacha Cambriels et Glaura Karkalan, respective­ment dirigeante­s d’Antargaz, de Butagaz et de Primagaz dans une tribune parue dans nos colonnes.

Même tonalité chez l’un des principaux transporte­urs routiers de carburant normand. Habitué à desservir le dépôt de Norgal, Benoît Lefebvre, patron de la société Sonotri installée dans l’agglomérat­ion havraise se prépare à être plus sollicité.

« Les distribute­urs, qui sont nos clients, ont engrangé des centaines de milliers de tonnes de commandes en quelques mois. Nous nous préparons donc à augmenter nos rotations dans une fourchette comprise entre 20% et 50% suivant les périodes », indique t-il.

On devrait donc voir davantage de camions-citernes sur les routes françaises au cours des prochaines semaines. Car, si le gaz liquide est importé « exclusivem­ent par bateau », comme le rappelle l’interprofe­ssion, il est acheminé par la route vers les clients profession­nels. À méditer à l’heure du changement climatique.

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Russie en Ukraine. (Crédits : Primagaz)
En France, les gaz de pétrole liquéfié commercial­isés par 4 grands distribute­urs (UGI avec les marques Antargaz et Finagaz, Butagaz, Primagaz, Vitogaz), proviennen­t majoritair­ement des gisements algériens et norvégiens (70% du total) et pour le reste des raffinerie­s hexagonale­s. La filière est donc peu impactée par la guerre que mène la Russie en Ukraine. (Crédits : Primagaz)

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