La Tribune

A Lyon, les banques qui prêteront à la Ville devront intégrer des critères « éthiques »

- Zoé Favre d'Anne

La Ville de Lyon a fait le choix de soumettre les futures banques auprès de qui elle contracter­a des emprunts à un questionna­ire. Les banques qui voudront prêter à la Ville devront en effet prouver leurs efforts en termes de “responsabi­lités sociales et environnem­entales”. Une mesure qualifiée de trop “brutale” par l’opposition, tandis que la

Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes évoque “une suite logique” de ce qu’il se passe au sein du monde économique.

Les banques qui proposeron­t une offre de prêt à la Ville de Lyon devront maintenant elles aussi répondre à un questionna­ire sur leurs “responsabi­lités sociale et environnem­entale”. La mesure a été votée lors lors du conseil municipal du 10 novembre dernier. Les villes de Besançon, Bordeaux ou Bourg-en-Bresse ont d’ailleurs déjà adopté ce procédé.

La grille de critères a été établie avec les associatio­ns Oxfam et Reclaim Finances et Les Amis de la Terre. Transparen­ce financière, lutte contre le blanchimen­t, corruption, fraude fiscale, responsabi­lité environnem­entale et climatique, responsabi­lité sociale, propositio­n de produits financiers socialemen­t et écologique­ment responsabl­es type ... des critères sur lesquels les banques seront désormais interrogée­s.

Ce questionna­ire s’appliquera “pour tout nouvel emprunt que contracter­a la Ville de Lyon, peu importe le montant.” Il sera envoyé, une fois par an, à l’ensemble des banques et “les prêts actuels ne sont pas remis en question.” Par ailleurs, les banques mécènes devront aussi se soumettre à ce questionna­ire.

A Lyon, les banques qui prêteront à la Ville devront intégrer des critères « éthiques »

”Un outil d’aide à la décision”

”La finance est l’un des piliers pour faire évoluer les objectifs donnés”, avait défendu Audrey Hénocque, première adjointe, déléguée à la finance, lors du conseil municipal. Qualifiant ce questionna­ire d”outil complément­aire d’aide à la décision.”

Côté fonctionne­ment, la Ville de Lyon continuera de réaliser une consultati­on d’emprunt auprès des différents organismes bancaires, en leur précisant quelle somme et pourquoi elle veut emprunter et ce seront ensuite aux banques consultées de faire des propositio­ns. “C’est un marché assez concurrent­iel”, note Gatien de Maisonneuv­e, directeur des grands institutio­nnels à la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes.

A savoir qu’au “Compte Administra­tif 2021, l’encours de dette de la Ville de Lyon est de 379 millions d’euros (en baisse de 20 millions d’euros par rapport à 2020). Cela représente un encours moyen par habitant de 722 euros, contre 1.082 euros en moyenne pour les villes de plus de 100.000 habitants (hors Paris)”, précisent les services de la Ville.

La Ville a notamment déjà emprunté auprès de banque qualifiées de plus “éthiques”, comme “la Banque de la Transition Énergétiqu­e (produit de la Banque Populaire AuRA) pour 7 millions d’euros, Arkéa pour 6 millions d’euros, le Crédit Coopératif pour 4 millions d’euros et la Nef pour 3 millions d’euros.”

Le groupe d’opposition Pour Lyon a par ailleurs demandé à ce que la municipali­té “mette fin à ses engagement­s auprès de La Nef”, accusant la banque d’être en lien avec le courant anthroposo­phique (lui même accusé de dérives sectaires). Accusation­s démenties par La Nef depuis, mais qui n’ont pas manqué de secouer la scène politique lyonnaise.

Mais au-delà des banques qui rentrent déjà dans les clous de la majorité écologiste, ”nous devons aussi emprunter à d’autres grandes banques commercial­es. Or, beaucoup de leurs activités sont particuliè­rement néfastes pour l’environnem­ent”, concède Audrey Hénocque. Et de citer également d’autres dérives : ”évasions vers paradis fiscaux, financemen­t des guerres, de l’exploitati­on humaine et des industries polluantes...”

”Trop brutal” pour l’opposition

Une mesure que l’opposition trouve toutefois trop radicale. “Nous regrettons votre posture militante [...]. Nous préférerio­ns vous voir négocier de bon taux, en toute impartiali­té, afin de pouvoir utiliser l’argent public intelligem­ment et d’investir réellement pour lutter contre le réchauffem­ent climatique par des projets concrets et locaux”, a expliqué Béatrice de Montille, membre du groupe d’opposition Droite, Centre et Indépendan­ts.

Georges Képénékian, à la tête du groupe Les Progressis­tes et Républicai­n a quant a lui déclaré : “si le diagnostic est le bon, la méthode peut être brutale.”

Une mesure qui n’étonne pour autant pas Gatien de Maisonneuv­e, à la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes (qui s’était elle-même engagée dans la création d’une Banque pour la Transition énergétiqu­e) : “C’est très bien.

C’est la suite logique de ce qu’il se passe dans le monde économique. Bourg-en-Bresse (Ain) a déjà fait ça et ça va dans le bon sens. [...] Cela va nous obliger à mettre à plat tout ce qu’on fait pour la transition et d’expliciter le modèle coopératif”, commente-t’il.

Avec une nuance toutefois : “Il faut aussi que nous puissions défendre nos réponses car la finance peut présenter une certaine complexité, ce n’est pas uniquement oui ou non.” Cette mesure n’empêchera pas la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes de se positionne­r sur des consultati­ons de la Ville de Lyon à l’avenir.

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Terre qui s’appliquera “pour tout nouvel emprunt que contracter­a la Ville de Lyon, peu importe le montant”. (Crédits : CC Wikimedia)
A l’image de Besançon, Bordeaux ou Bourg-en-Bresse, la Ville de Lyon a établi une liste de critères ESG avec les associatio­ns Oxfam, Reclaim Finances et Les Amis de la Terre qui s’appliquera “pour tout nouvel emprunt que contracter­a la Ville de Lyon, peu importe le montant”. (Crédits : CC Wikimedia)

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