La Tribune

Easyjet reste encore loin de la rentabilit­é

- Léo Barnier

L’été a été bon, l’hiver s’annonce prometteur... pourtant Easyjet n’a pas encore pleinement digéré les conséquenc­es de la crise et devra encore patienter avant de retrouver les niveaux de performanc­e connus en 2019. La compagnie low cost doit encore franchir quelques paliers avant d’y arriver, d’autant qu’elle pourrait bien faire face à une grève de son personnel français.

Easyjet va mieux. A la faveur d’un été record, la compagnie à bas coût britanniqu­e a mieux fini son exercice 2021-2022 (clos le 30 septembre) qu’elle ne l’avait commencé. Cela n’a pas suffi pour autant à faire rebasculer les comptes dans le vert sur l’année. Johan Lundgren, directeur général d’Easyjet, affiche tout de même un haut niveau de confiance et croit en ses forces, avec de bonnes perspectiv­es pour les prochains mois, une montée en puissance de l’activité et un bilan financier solide.

En dépit de « multiples vents contraires pour l’industrie » du transport aérien, Johan Lundgren estime qu’Easyjet « a réalisé les meilleurs résultats de son histoire pour un seul trimestre » avec « un rebond record ». Par rapport à l’été 2021, la compagnie a presque doublé son nombre de passagers amélioré son taux de remplissag­e de 15 points ou encore augmenté son revenu par siège de plus de 50 %.

Sur l’exercice complet, l’améliorati­on est peut-être encore plus impression­nante. Avec 70 millions de passagers, un taux de remplissag­e de 85,5 % et un chiffre d’affaires de 6,7 milliards d’euros, toutes les métriques sont en forte hausse par rapport à l’exercice 2020-2021, mais cela tient essentiell­ement à l’extrême faiblesse de ce dernier. La bonne nouvelle est venue des revenus auxiliaire­s (ventes à bord, achats d’options, ventes croisées...). Conforméme­nt au plan de transforma­tion lancé par Easyjet pour faire face à la crise, ils ont crû de 59 % par rapport à 2019 et représente­nt désormais plus du quart des recettes, voire près du tiers en ne tenant compte que des activités de transport aérien.

2019 reste encore loin

Malgré ce dernier point, le fait est qu’Easyjet reste encore loin des niveaux affichés avant la crise. Cela se ressent dans les résultats, malgré une améliorati­on de l’ordre d’un milliard d’euros sur un an. Pour l’exercice qui vient de s’achever, la compagnie affiche

Easyjet reste encore loin de la rentabilit­é

une perte opérationn­elle de 31 millions d’euros, pour une perte nette de 241 millions d’euros. Easyjet est encore loin des profits connus avant crise, où elle dégageait des bénéfices de l’ordre de 500 millions d’euros.

A l’heure où Ryanair engrange les profits, et que des groupes traditionn­els comme Air France-KLM se prépare à un retour à l’équilibre, la situation d’Easyjet apparaît comme peu enviable. Il faut tout de même dire que les dates de son exercice décalé (1er octobre au 30 septembre) l’ont pleinement exposée aux conséquenc­es du variant Omicron l’hiver dernier, puis à l’envolée des coûts de carburant avec la guerre en Ukraine. La compagnie a aussi subi les perturbati­ons dans les aéroports européens cet été, avec des coûts supplément­aires de l’ordre de 90 millions d’euros par rapport à l’exercice 2018-2019, et un coût carburant au siège en hausse de 16 %.

Poursuivre les développem­ents

Johan Lundgren se veut tout de même confiant, évoquant de fortes perspectiv­es sur la demande, notamment grâce aux sports d’hiver. Il estime ainsi qu’Easyjet est la mieux positionné­e en Europe sur ce marché. Il constate également un fort attrait pour les destinatio­ns plus ensoleillé­es comme la Turquie ou l’Egypte.

Easyjet va donc poursuivre sa remontée en puissance, avec une offre en hausse de 25 % au premier semestre puis 9 % au second, avec l’ambition de retrouver les niveaux pré-pandémique­s aux alentours de l’été 2023. Des niveaux qu’elle espérait déjà tutoyer l’été dernier, sans y arriver, contrainte notamment de réduire son programme pour éviter les perturbati­ons opérationn­elles et les annulation­s. Dans le même temps, la compagnie veut améliorer son coefficien­t de remplissag­e de 10 points au premier semestre, ce qui l’emmènerait autour de 87 %.

Pour appuyer ces développem­ents, Johan Lundgren assure disposer d’une situation financière parmi les plus solides de l’industrie, avec une dette nette de l’ordre de 800 millions d’euros pour des liquidités évaluées à plus de quatre milliards d’euros. Cela doit, selon lui, permettre à Easyjet de saisir les opportunit­és disponible­s pour renforcer le réseau et faire croître la flotte, mais aussi de s’ouvrir des possibilit­és sur le marché des fusions & acquisitio­ns, alors que beaucoup de compagnies aériennes ont souffert pendant la crise. Sans qu’il n’y ait de cibles affichées à ce jour, Easyjet ouvre donc la porte à une possible consolidat­ion, tout en assurant être assez solide pour ne pas devenir une cible.

En dépit de ces ambitions, Johan Lundgren reste prudent, admettant qu’il dispose de peu de visibilité sur l’évolution des coûts, notamment le kérosène. Cela se traduit d’ailleurs dans le programme, le dirigeant insistant sur le besoin de se concentrer sur les marchés les plus porteurs et de se renforcer sur les principaux aéroports, mais aussi sur le plan de flotte. Celui-ci se veut flexible pour s’adapter aux opportunit­és. Easyjet, qui opère aujourd’hui 320 avions et dispose de 168 commandes fermes, a établi une fourchette pour dimensionn­er sa flotte dans les prochaines années. Elle est comprise entre 333 et 336 appareils en 2023, puis s’élargit fortement les exercices suivant pour se situer entre 308 et 346 avions en 2025. L’arrivée des A320 NEO et A321 NEO en remplaceme­nt des anciens A319 devrait aussi fournir un surcroît de capacités conséquent.

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Easyjet France dans la crainte d’une grève à Noël

Dans le paysage global d’Easyjet, la France dispose d’une solide position. Dans l’Hexagone, la compagnie orange a affiché un haut niveau de résilience toute l’année, bien aidée par la force du trafic domestique et le rebond du voyage d’affaires, et devrait largement profiter de l’engouement qui se dessine actuelleme­nt pour les destinatio­ns de montagne cet hiver.

Pourtant, Bertrand Godinot, directeur général d’Easyjet France, ne doit pas passer des journées tranquille­s. Deux syndicats de personnels navigants commerciau­x, le SNPNC-FO et l’UNAC CFE-CGC, ont annoncé la possibilit­é d’une grève à Noël. Le premier parle « d’un risque très important d’arrêt de travail » et le second « d’une forte probabilit­é », mais pour l’instant aucun préavis de grève n’a été déposé. Le patron d’Easyjet France affirme vouloir absolument éviter la grève, indiquant que les négociatio­ns se poursuiven­t avec un processus de résolution de conflit.

Face aux revendicat­ions syndicales, la compagnie propose une augmentati­on du salaire fixe de 6,5 %, au-dessus de l’inflation, ainsi qu’une hausse sur la part variable. Elle rappelle également avoir versé une prime cet été, alors que les accords de modération salariale signés l’an dernier pour préserver l’intégralit­é des 1.800 emplois en France courent jusqu’à l’été prochain.

Cela ne semble pas suffisant pour les salariés, qui rappellent avoir consenti au titre de ces accords à un gel des salaires et la suppressio­n des bonus et d’intéressem­ent. Ils dénoncent également une détériorat­ion des conditions de travail.

Easyjet reste encore loin de la rentabilit­é

Easyjet France dans la crainte d’une grève à Noël

Dans le paysage global d’Easyjet, la France dispose d’une solide position. Dans l’Hexagone, la compagnie orange a affiché un haut niveau de résilience toute l’année, bien aidée par la force du trafic domestique et le rebond du voyage d’affaires, et devrait largement profiter de l’engouement qui se dessine actuelleme­nt pour les destinatio­ns de montagne cet hiver.

Pourtant, Bertrand Godinot, directeur général d’Easyjet France, ne doit pas passer des journées tranquille­s. Deux syndicats de personnels navigants commerciau­x, le SNPNC-FO et l’UNAC CFE-CGC, ont annoncé la possibilit­é d’une grève à Noël. Le premier parle « d’un risque très important d’arrêt de travail » et le second « d’une forte probabilit­é », mais pour l’instant aucun préavis de grève n’a été déposé. Le patron d’Easyjet France affirme vouloir absolument éviter la grève, indiquant que les négociatio­ns se poursuiven­t avec un processus de résolution de conflit.

Face aux revendicat­ions syndicales, la compagnie propose une augmentati­on du salaire fixe de 6,5 %, au-dessus de l’inflation, ainsi qu’une hausse sur la part variable. Elle rappelle également avoir versé une prime cet été, alors que les accords de modération salariale signés l’an dernier pour préserver l’intégralit­é des 1.800 emplois en France courent jusqu’à l’été prochain.

Cela ne semble pas suffisant pour les salariés, qui rappellent avoir consenti au titre de ces accords à un gel des salaires et la suppressio­n des bonus et d’intéressem­ent. Ils dénoncent également une détériorat­ion des conditions de travail.

 ?? ?? Easyjet n’a pas encore retrouvé son altitude de croisière malgré la reprise du trafic cet été. (Crédits : ARND WIEGMANN)
Easyjet n’a pas encore retrouvé son altitude de croisière malgré la reprise du trafic cet été. (Crédits : ARND WIEGMANN)

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