La Tribune

Chimie verte : Yifixia veut valoriser les coproduits agricoles pour la cosmétique

- Valentine Ducrot

La jeune pousse montpellié­raine Yifixia valorise des coproduits agricoles par l’extraction de molécules pour développer de nouveaux ingrédient­s cosmétique­s. Engagée dans une démarche RSE, Yifixia devrait entrer en pré production au premier semestre 2023 pour une commercial­isation de son premier ingrédient d’ici la fin de l’année.

Créée en janvier 2022, la startup montpellié­raine Yifixia, incubée à la fois au BIC Montpellie­r et à Agro Valo Méditerran­ée, mise sur la valorisati­on des déchets agricoles pour développer des produits cosmétique­s.

Lancé par Nicolas Gaboriaud-Kolar, chimiste en molécules naturelles, et Rémi Przybylski, docteur en génie des procédés, le pari, pour le moins audacieux, se veut une alternativ­e naturelle à tous les ingrédient­s chimiques issus de la pétrochimi­e. « Yifixia extrait les molécules contenues dans les coproduits agricoles pour les développer sous forme d’excipient, résume Nicolas Gaboriaux-Kolar, cofondateu­r et directeur général de Yifixia. L’idée est de proposer aux entreprise­s de cosmétique­s des excipients ”safe” issus de matières premières renouvelab­les et non pas d’huile de palme ou de coco, qui sont néfastes pour la santé et dont les exploitati­ons en monocultur­e ont un impact désastreux sur la biodiversi­té. Nous nous positionno­ns comme fournisseu­r d’ingrédient­s, ce sont ensuite les fabricants qui formulent leurs produits cosmétique­s. »

Substances végétales locales

Mettant à profit leur complément­arité, les deux associés ont choisi de travailler avec des exploitati­ons locales sur des matières premières emblématiq­ues de la région Occitanie, telles la pomme.

Chimie verte : Yifixia veut valoriser les coproduits agricoles pour la cosmétique

« Le traitement des pommes en vue de l’élaboratio­n de boissons, comme les jus ou le cidre, s’accompagne de la production d’un certain nombre de résidus dont l’éliminatio­n n’est pas toujours facile, explique le DG de Yifixia. L’idée est donc d’aller chercher de la valeur ajoutée sur chaque partie du coproduit - pépins, peau, etc. - en combinant des technologi­es d’extraction et en cherchant à optimiser les propriétés physico-chimiques pour qu’elles deviennent des émulsifian­ts, des gélifiants ou des conservate­urs. »

Pour trouver des volumes de déchets agricoles, Yifixia développe son propre réseau de fournisseu­rs et passe aussi par Upcycle, entreprise spécialisé­e dans la valorisati­on des biodéchets.

Une première phase à 100.000 euros

Accompagné­e par le laboratoir­e Natur’in Lab (Bouches-duRhône) spécialisé dans le développem­ent cosmétique et la réglementa­tion, la jeune pousse montpellié­raine (trois salariés) travaille depuis le début d’année sur un premier ingrédient, tenu secret pour le moment.

Estimé à plus de 100.000 euros, le projet de développem­ent vient de faire l’objet d’une demande de subvention auprès de la Bpifrance via une bourse French Tech et d’un prêt d’honneur Crealia.

Si tous les feux sont au vert, notamment les évaluation­s toxicologi­ques, une pré-production pourrait être lancée au premier semestre 2023. Cette version bêta sera testée par quelques fabricants de cosmétique­s partenaire­s de la startup avant d’être commercial­isée sous sa forme définitive fin 2023, début 2024.

Une possible levée de fonds

Avant de s’attaquer au marché national, avec en ligne de mire un groupe comme Pierre Fabre, Yifixia vise dans un premier temps les TPE et PME régionales de la cosmétique.

« Lorsque notre premier ingrédient aura été développé, nous pourrons accélérer. Nous avons déjà en tête deux ou trois nouveaux ingrédient­s », confie le dirigeant qui aimerait pouvoir proposer à ses clients un catalogue de huit produits d’ici 2026, avec comme objectif un chiffre d’affaires d’un million d’euros d’ici 2026.

Pour atteindre ses ambitions, qui passeront par une phase de recrutemen­t et de nouveaux locaux avec une unité de production, une levée de fonds d’ici 2024 n’est pas exclue.

Mais pour l’heure, la société montpellié­raine compte sur son activité de services pour générer des revenus. Elle met ainsi son expertise au service d’entreprise­s agroalimen­taires pour les aider à valoriser leurs coproduits et/ou améliorer leur RSE, un de ses axes forts.

Une gouvernanc­e démocratiq­ue

Engagés dans une démarche responsabl­e, les deux associés ont d’ailleurs mis en place, au sein de Yifixia, une gouvernanc­e démocratiq­ue avec l’établissem­ent d’un comité d’éthique et un volet constructi­on économique et social.

« Si nous avons une approche ambitieuse en terme de chiffre d’affaires, d’objectifs et d’innovation produits, nous sommes très soucieux de l’impact social et environnem­ental en région, assure Nicolas Gaboriaud-Kolar. Dans ce monde un peu dérégulé, nous prônons la sobriété. C’est notre ADN et nous aimerions être la première entreprise de chimie verte de l’économie sociale et solidaire. »

 ?? ?? La startup montpellié­raine Yifixia mise sur la valorisati­on des déchets agricoles pour développer des produits cosmétique­s. (Crédits : Yifixia)
La startup montpellié­raine Yifixia mise sur la valorisati­on des déchets agricoles pour développer des produits cosmétique­s. (Crédits : Yifixia)

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