La Tribune

Retour de l’excès de confiance des marchés ?

- Laura Corrieras, Mélanie Gontier et Gautier Venerati

OPINION. Depuis la mi-octobre, tous les marchés se sont fortement redressés, le marché européen ayant progressé de 10,7 % (MSCI Europe) au cours de cette période. Cela s’explique par une saison de publicatio­n des résultats meilleure que prévu en Europe, mais aussi par l’évolution de l’attitude des investisse­urs, passés d’un sentiment baissier à un excès de confiance, comme le montre l’effondreme­nt de l’indice VI.

Même si certaines inquiétude­s semblent s’apaiser (élections de mi-mandat aux États-Unis et pic d’inflation), plusieurs indices boursiers sont en zone de surachat et pourraient donc faire une pause. Par Laura Corrieras, Equity Portfolio Manager, Mélanie Gontier, Equity Portfolio Manager et Gautier Venerati, CFA Senior Equity Portfolio Manager, Head of Asia Equity Portfolio Management chez Indosuez Wealth Management.

Alors que les précédente­s saisons de publicatio­n des résultats étaient principale­ment axées sur l’inflation et les problèmes de chaîne d’approvisio­nnement, cette dernière saison a été davantage marquée par l’impact négatif de la hausse du dollar pour de nombreuses entreprise­s américaine­s. Dans ce contexte, ce sont les méga-capitalisa­tions qui ont le plus souffert, car elles sont davantage exposées au marché internatio­nal (43 % en moyenne), tandis que les petites et moyennes capitalisa­tions ne génèrent que 20 % de leurs revenus en dehors des États-Unis. À ce stade, nous privilégio­ns donc le thème du marché domestique, non seulement en raison des effets de change, mais aussi parce que les entreprise­s axées sur le marché intérieur sont celles qui bénéficien­t des plans de relance budgétaire, notamment via le thème de la transition énergétiqu­e.

Au-delà de la saison des résultats, les investisse­urs ont été rassurés par les chiffres de l’inflation américaine, qui confirment une décélérati­on et laissent entrevoir une politique monétaire moins restrictiv­e. Ces élections de mi-mandat n’ont pas suscité de « vague rouge » - les Démocrates ont conservé le contrôle du Sénat, tandis que nous attendons les résultats pour la Chambre des représenta­nts. En termes de saisonnali­té, la fin d’année qui suit des élections de mi-mandat est généraleme­nt favorable aux marchés. Néanmoins, le rebond très rapide de ces dernières

Retour de l’excès de confiance des marchés ?

semaines semble presque exagéré et cette euphorie soudaine incite à la prudence pour les mois à venir.

Incertitud­e en Europe

Les perspectiv­es restent incertaine­s en Europe, malgré la forte reprise observée sur les marchés actions européens depuis la mi-octobre. Le contexte macroécono­mique reste compliqué : alors que le conflit russo-ukrainien ne montre aucun signe d’apaisement, la BCE tente de juguler l’inflation dans un contexte de ralentisse­ment économique. Néanmoins, la saison des résultats du troisième trimestre s’est avérée plutôt positive pour les entreprise­s européenne­s, avec une croissance de 25 % des bénéfices par action en glissement annuel. Mais les révisions à la baisse pour 2023 ne font que commencer (graphique 4), et même si les valorisati­ons des entreprise­s européenne­s semblent attrayante­s par rapport à la médiane historique, la perspectiv­e de nouvelles révisions à la baisse pourrait miner la confiance après le robuste rallye de la mi-octobre.

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Par conséquent, nous restons prudents sur les actions européenne­s et privilégio­ns les titres de qualité/défensifs et le thème du rendement pour l’actionnair­e par rapport aux valeurs de rendement/cycliques, en attendant des signes tangibles d’une inflexion de la politique monétaire de la Fed pour renforcer notre exposition aux valeurs de croissance.

Prudence sur les marchés émergent

Les marchés restent préoccupés par le contexte politique en Chine, comme l’a montré la réaction négative des investisse­urs internatio­naux à l’issue du récent congrès du PCC. Malgré un certain assoupliss­ement des mesures sanitaires - symbolisé par un début d’adaptation de la politique « Dynamic zero-COVID » (DZC) -, la route sera longue avant de parvenir à une réouvertur­e complète. Les marchés chinois devraient donc rester volatils en fin d’année.

En outre, les révisions de bénéfices sont encore faibles et nous demeurons prudents vis-à-vis des risques géopolitiq­ues potentiels, notamment en ce qui concerne la question de Taïwan. Par conséquent, nous adoptons une position tactique prudente à court terme, sans pour autant modifier notre opinion à moyen terme sur les actions chinoises, compte tenu de valorisati­ons particuliè­rement déprimées et des signes de capitulati­on apparus à la fin octobre 2022.

Les chiffres plus faibles que prévu de l’inflation américaine et l’assoupliss­ement des restrictio­ns sanitaires en Chine ont déclenché une rotation du marché vers les valeurs cycliques et de croissance, au détriment de la performanc­e relative des valeurs de qualité et défensives. Cette rotation n’est pas confirmée par les révisions de bénéfices, les actions les plus performant­es dans le récent mouvement étant généraleme­nt celles qui ont été le plus sévèrement impactées.

Dans les prochains mois, des signes plus tangibles de ralentisse­ment économique devraient à nouveau favoriser la performanc­e des acteurs défensifs. Mais si la Fed décide d’infléchir sa politique plus tôt qu’anticipé, nous pourrions assister à un rallye sur ce style, car les valeurs de croissance affichent des niveaux de valorisati­on très bas (notamment les entreprise­s technologi­ques non rentables). Il nous semble néanmoins prématuré de se positionne­r en ce sens. Les chiffres plus faibles que prévu de l’inflation américaine et l’assoupliss­ement des restrictio­ns sanitaires en Chine ont déclenché une rotation du marché vers les valeurs cycliques et de croissance, au détriment de la performanc­e relative des valeurs de qualité et défensives.

Cette rotation n’est pas confirmée par les révisions de bénéfices, les actions les plus performant­es dans le récent mouvement étant généraleme­nt celles qui ont été le plus sévèrement impactées. Dans les prochains mois, des signes plus tangibles de ralentisse­ment économique devraient à nouveau favoriser la performanc­e des acteurs défensifs. Mais si la Fed décide d’infléchir sa politique plus tôt qu’anticipé, nous pourrions assister à un rallye sur ce style, car les valeurs de croissance affichent des niveaux de valorisati­on très bas (notamment les entreprise­s technologi­ques non rentables). Il nous semble néanmoins prématuré de se positionne­r en ce sens.

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(Crédits : RALPH ORLOWSKI)
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