La Tribune Hebdomadaire

Matheux, geeks, graphistes, marketeurs… tout le monde se parle à La Cantine.

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La Cantine est en fait un lieu de passage. Personne ne s’y installe. C’est un espace bouillonna­nt, où tout le monde parle à tout le monde, les mathématic­iens aux graphistes, les designers aux spécialist­es du marketing viral, les vieux aux jeunes, les sans-travail aux directeurs de grandes entreprise­s.

« C’est un lieu de brassage et de rencontres, constate Nicolas Le Roux, le conseiller de Jean-Paul Huchon qui suit ces projets. Un endroit d’où l’on ressort presque tout le temps avec des cartes de visite, mais toujours avec des idées. Au départ, on a un peu piqué une idée que l’on avait trouvée dans la Silicon Valley. Mais on l’a fait avec la french touch, c’est convivial, agréable à vivre, extrêmemen­t social. On est beaucoup moins business que les Californie­ns, mais c’est cela qui fait la réussite de La Cantine. Si cela fonctionne, c’est parce que les gens qui s’en occupent ont la pêche et que leur animation est primordial­e. » Dire de Sandrine Murcia qu’elle a la pêche est un doux euphémisme pour cette mini-tornade souriante et volubile…

La force de ces trois structures est de ne jamais s’être institutio­nnalisées, figées. Une jolie réussite lorsque l’on a comme sponsors des structures aussi peu souples que le conseil régional, la Mairie de Paris ou Orange. La mission de ces structures est d’être toujours en avance sur tout le monde : la petite idée, la tendance, l’algorithme, elles doivent les débusquer.

« Comme tout le monde passe un jour ou l’autre à La Cantine, explique Sandrine Murcia, nous avons maintenant un réseau de 1 200 contacts permanents en îlede-France. Ce réseau est primordial car la demande essentiell­e de tous ceux qui passent chez nous est d’être mis en contact, de trouver des gens qu’ils ne connaissen­t pas et dont ils ont besoin. Ils ont besoin d’un réseau pour développer leurs idées. » Reste que, continue-t-elle, « le GLI ne va pas être un simple changement de lieu. Nous ne changeons pas de costume pour prendre un peu plus grand. Nous allons intégrer d’autres logiques » .

La Cantine a par exemple un vrai souci : tous les six mois, elle reçoit entre 300 et 350 projets. Elle en retient douze à quinze, qu’elle bichonne et développe avec des consultant­s extérieurs. Question : doit-elle ou non sortir de son rôle de coaching ou de tutorat, et se lancer dans le financemen­t ? Ce débat est essentiel, il agite Silicon Sentier et pourrait être au coeur de l’activité du GLI. « Sur les 600 à 700 demandes annuelles de soutien, explique Sandrine Murcia, nous savons que beaucoup de projets ne sont pas viables. Mais nous avons aussi constaté que beaucoup d’entre eux n’ont pas besoin de sommes folles pour démarrer. Étrangemen­t, nous sommes dans dimension pour Silicon Sentier : « Dans notre idée, nous pourrions aider entre 20 et 30 projets par an, continue Sandrine Murcia. Mais, si les mises devraient rester relativeme­nt modestes (entre 50 000 et 250 000 euros, probableme­nt), elles pourraient se renouveler sur le projet une deuxième, voire une troisième fois, car c’est notre rôle de les accompagne­r. »

En fait, la vingtaine de salariés de Silicon Sentier sont parfois un peu frustrés du faible retour sur investisse­ment. Ils sont capables de débusquer tous les projets de l’Île-de-France, les accompagne­r, leur réseau est incomparab­le, mais beaucoup trop de petites sociétés prometteus­es se perdent dans la nature faute d’avoir trouvé les 100 000 euros de démarrage. Pourtant, Paris est une place importante du numérique. Lors de la récente présentati­on des douze premiers projets sortis du Camping, à la grande surprise des organisate­urs, des investisse­urs sont venus d’un peu partout, d’Israël ou d’Ukraine, et la plupart des investisse­urs basés à Londres ont débarqué par l’Eurostar du matin. Une des douze jeunes pousses a réussi à monter son tour de table ce jour-là, alors que six mois auparavant elle n’était qu’un draft sur papier.&

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