François Hollande « a un peu peur de l’explosion en vol d’une débutante qui ne tiendrait pas le choc. »
Certains la voient à la Culture, un domaine qu’elle affectionne, mais le milieu montrerait des réticences. Elle aurait pu prétendre à Matignon, mais il y a parfois incompatibilité d’humeur avec le maire de Tulle…
En revanche, élisabeth Guigou ne devrait pas figurer sur la photo du perron de l’élysée. Ni Anne Lauvergeon. Voilà pour les têtes les plus connues. Il faut mentionner aussi l’arrivée probable de ministres issues des autres partis de gauche. On parle beaucoup de Christiane Taubira (PRG ), ou de Cécile Duflot (Verts). Resteraient cinq ou six femmes à trouver. Le choix devient plus difficile… Parmi les expérimentées, Marisol Touraine a déjà sa place à coup sûr, ou presque, au sein de la future équipe. Proche de Pierre Moscovici et donc de Dominique Strauss-Kahn jusqu’à l’effondrement de ce dernier voilà un an, elle a rallié ensuite François Hollande. Elle s’est imposée pendant la campagne. « Elle a fait un sans-faute », juge un membre de l’équipe. Si elle n’est pas franchement connue du grand public, elle n’a rien d’une novice, en effet. Députée de 1997 à 2002, et depuis 2007, cette spécialiste des questions sociales espérait déjà sous Jospin (1997-2002), entrer au gouvernement, après avoir alimenté la réflexion du PS. Trop tôt ? Cette fille du sociologue Alain Touraine, normalienne, agrégée de sciences économiques, conseillère d’état, détient, quoi qu’il en soit, tous les titres. à 53 ans, elle devrait pouvoir enfin passer à l’action… Quel que soit son portefeuille, elle a bien l’intention de défendre la cause des femmes : elle ne manque pas de fustiger tous les reculs enregistrés sous Sarkozy. Pour être entrée au Palais Bourbon en 2007, Delphine Batho fait aussi figure, à 39 ans, d’élue expérimentée. Ses centres d’inté- rêt sont connus – les questions de sécurité, notamment – mais il ne faut surtout pas lui en demander plus, elle y voit tout de suite un piège, pour deviner quel poste de ministère elle pourrait briguer.
Il est vrai que la députée des Deux-Sèvres, qui a repris la circonscription de Ségolène Royal, est l’une des « ministrables » le plus souvent citées. Porte-parole de François Hollande, c’est elle qui signe des communiqués parmi les plus vengeurs, réclamant récemment, par exemple, que lumière soit faite sur le financement éventuel de Nicolas Sarkozy par le colonel Kadhafi. Pugnace, cette ex-leader du mouvement lycéen de 1990, s’est d’abord située à la gauche du PS, proche de Julien Dray. C’est ce dernier qui insiste pour qu’elle rejoigne Ségolène Royal en 2007, dont elle devient la porte-parole pour la c a mpagne p r é s i d e nt i e l l e . Auparavant, elle avait été secré- sonne », dit l’une de ses anciennes collaboratrices. Elle connaît la machine gouvernementale, pour avoir été conseillère de Martine Aubry (ministre de l’Emploi), puis de Nicole Péry, de 1997 à 2000. Mais elle peut difficilement être ministre et mener la bataille pour succéder à Bertrand Delanoë à la tête de la mairie de Paris, dans deux ans.
Irait-elle à Bercy ? Nicole Bricq se trouve très bien là où elle est, très utile à son poste stratégique de rapporteur général du Budget, au Sénat, qu’elle occupe depuis le basculement à gauche de la Haute Assemblée, en septembre. Mais, bien sûr, si l’éventualité se présentait, elle ne dirait pas non. « Ne pas donner prise aux marchés, éviter les turbulences, c’est une vraie mission », souligne-telle. Sous-entendu : ce n’est pas donné à tout le monde. Proche de Dominique Strauss-Kahn quand celui-ci était ministre, elle roule clairement aujourd’hui pour Fr a n ç o i s Hollande, soulignant qu’elle le soutient de longue date… c’est-àdire depuis la chute de DSK, il y a un an. à la fin des années 1990, elle s’était fait remarquer pour un rapport sur la fiscalité énergétique, qui avait largement inspiré la politique de Lionel Jospin. C’était avant de trouver un nouveau rôle d’opposante, en devenant sénatrice, en septembre 2004. taire nationale du PS pour les questions de sécurité, depuis 2003. Ses réflexions sont reprises pour partie par Ségolène Royal, qui défend alors « l’ordre juste ». Elle assume aujourd’hui cet ancrage à gauche, même si, en tant que porte-parole du candidat PS, elle doit bien sûr se conformer à la ligne officielle.
Il y a une incertitude concernant Anne Hidalgo. Cette adjointe au maire de Paris, en charge de l’urbanisme et de l’architecture, a pour elle d’avoir travaillé, voilà des années, avec François Hollande. Le candidat PS reconnaît sa fiabilité, sa capacité de travail redoutable. « Elle épuise ses équipes comme per-
Ministre, Karine Berger ? Elle ne répond pas à cette interrogation, mais la perspective ne lui déplairait pas, assurément. à tout le moins, un secrétariat d’état à Bercy suffirait à cette économiste. Beaucoup, au PS, voudraient la voir, surtout, apprendre son nouveau métier de député : la probabilité est élevée de voir cette jeune femme de 38 ans, présidente de la fédération PS des Hautes-Alpes, entrer au Palais Bourbon, après avoir frôlé l’élection lors des législatives de 2007. L’aboutissement de longues années de militantisme ? C’est un peu plus compliqué. Karine Berger s’est déjà fait un nom dans le domaine de l’économie. Elle était surtout connue, jusqu’à récemment, pour avoir été, après un passage par Bercy, responsable de la conjoncture à l’Insee et chef économiste chez Euler-Sfac. Contrairement à nombre de politiques, les chiffres, elle connaît (le passage par Polytechnique a aidé). Au point d’avoir été recrutée en 2011 par Canal + pour gérer une équipe de statisticiens dédiée au marketing. Mener de front cette activité professionnelle et la campagne aux côtés de François Hollande n’étant pas tenable, elle a démis- sionné de la chaîne cryptée. Et trouvé sa place dans l’organigramme de campagne : elle a notamment en charge la réflexion sur la réforme des banques, que veut conduire François Hollande.
Najat Belkacem « incarne la nouvelle génération du parti socialiste. » C’est ce qu’elle affirme en tout cas dans son livre publié récemment, Raison de plus, un appel à ne pas désespérer de la politique. à 35 ans, Najat Impossible donc pour François Hollande de se passer d’un tel profil dans son équipe de campagne. Il lui a confié le programme culture, médias et audiovisuel. Elle s’est d’abord mise à dos tout le milieu culturel, traditionnellement proche du PS, en préconisant la suppression du dispositif antipiratage Hadopi et son remplacement par un système de licence globale. Rétro-pédalage obligé… Depuis, les relations avec la culture se sont apaisées, et le monde du cinéma l’apprécie. Lors d’un dîner, François Hollande a rassuré les cinéastes comme JeanMichel Ri b e s ou Bertrand Tavernier, déclarant vouloir faire évoluer Hadopi, et non plus le supprimer.
Piquante, fonceuse, Fleur Pellerin, 38 ans, n’a pas la langue dans sa poche. Sur son blog, cette conseillère référendaire à la Cour des comptes n’a cessé pendant la campagne de conspuer « l’hyperprésident », coupable d’avoir « gavé de petits fours les blogueurs aux frais du contribuable » lors de l’eG8, le grand raout de l’Internet, l’an passé à Paris. La conseillère numérique de François Hollande, l’une des rares personnalités de la société civile au sein de l’équipe de campagne, inconnue jusque-là du grand public, a gagné le respect d’un secteur, auquel elle ne connaissait pas grand-chose.
Sur-diplômée (bac à 16 ans, Essec, Sciences Po, ENA), cette Coréenne adoptée à 6 mois a commencé sa carrière à la Cour des comptes, avant d’intégrer en 2007 Tilder, une agence de conseil en communication, plutôt chronophage. Pour être plus présente auprès de sa fille, elle démissionnera moins de deux ans plus tard. En 2007, elle entre au club XXIe siècle, qui réunit l’élite des minorités visibles. Elle le préside depuis février 2010. Quid de son avenir en cas d’élection de François Hollande ? Dans son équipe, on espère au moins un secrétariat d’état au numérique. Mais la jeune énarque ne s’est jamais frottée au suffrage universel. Un handicap pour quémander un maroquin ministériel ? D’autres parient qu’elle héritera d’un super-poste de conseiller, dans un ministère, voire à l’Élysée.