Proglio, le plus menacé des patrons du secteur public
Le PDG d’EDF est menacé à double titre par l’arrivée au pouvoir de François Hollande. D’abord, comme tous ses collègues dirigeants de grandes entreprises publiques, c’est sa rémunération qui est dans le collimateur. La proposition n° 26 du nouveau président de la République prévoit d’instaurer « un écart maximal de 1 à 20 » des salaires dans les entreprises où l’État détient une forte participation. François Hollande a promis pour « fin mai » le décret instituant cet encadrement. « L’État imposera ce principe dans les entreprises où il détient plus de 50 % du capital et le proposera ailleurs », avait précisé Jérôme Cahuzac, alors responsable du budget dans l’équipe Hollande. Parmi les groupes de la première catégorie (Areva, Aéroports de Paris, EDF, La Poste, RATP, SNCF, Française des jeux, France Télévisions, Radio France…), Henri Proglio est le patron qui a le plus à perdre. Il devrait voir sa rémunération de 1,6 million d’euros en 2011 divisée par 4,5 pour respecter l’échelle (20 fois le smic sur treize mois, soit 353 600 euros). Même en prenant comme plancher le salaire moyen du collège « exécution » d’EDF (24 200 euros en 2010 à la place du smic de 18 200 euros), il faudrait que le PDG d’EDF accepte que sa rémunération soit divisée par 3,3, afin qu’elle tombe à près de 500 000 euros. Ont également gros à perdre : Luc Oursel, le patron d’Areva, qui, à ce régime, devrait voir son salaire divisé par 2 (700 000 euros en 2011). De même que Jean-Paul Bailly à La Poste (610 000 euros) et Pierre Graff, PDG d’Aéroports de Paris (736 000 euros). Gérard Mestrallet (GDF Suez) ou Louis Gallois (EADS), qui ont gagné respectivement 3,1 et 2,6 millions d’euros en 2011, sont encore plus en dehors des clous, puisqu’il leur faudrait accepter des rémunérations pratiquement divisées par 10 et 7 ! Par 4 pour Stéphane Richard (France Télécom), qui a perçu 1,5 million. Même constat pour Jean-Pierre Herteman (Safran, 1,5 million d’euros) et Luc Vigneron chez Thales (1,1 million). Seule différence, de taille : dans ces entreprises, la participation de l’État tourne autour de 25 ou 35 %, voire seulement 15 % chez France Télécom et EADS, ce qui rend très incertaine l’application de cette mesure drastique. Henri Proglio, pour sa part, est de surcroît spécifiquement dans le viseur du PS. Manuel Valls puis Michel Sapin ont publiquement ces dernières semaines émis des doutes sur son maintien à la tête de l’électricien public. Arguant, pour l’un, de sa participation à la campagne de Nicolas Sarkozy, pour l’autre, de ses positions très pronucléaires, qui le mènent « à grossir les chiffres hors de proportion ». Par ailleurs, le putsch manqué du patron d’EDF, visant à placer Jean-Louis Borloo à la tête de son ancien groupe Veolia, n’a pas contribué à calmer les esprits. Le nouveau président de la République pourrait être tenté de faire de la tête de Proglio un symbole. « D’autant plus s’il a besoin de masquer qu’il ne change pas grand-chose au programme nucléaire français » , glisse un cadre socialiste. À suivre.&