La Tribune Hebdomadaire

Il faut aller chercher la croissance organique dans les pays émergents. »

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est-il si noir pour les opérateurs télécoms ?

La période est difficile, c’est vrai. Mais nous ne sommes pas pour autant condamnés à mourir. Il y a des tas de choses à faire, que nous avions identifiée­s dans le plan « Conquêtes 2015 » que j’ai présenté il y a deux ans. Il faut investir dans nos réseaux, dans un monde de concurrenc­e par les infrastruc­tures, c’est le premier levier de différenci­ation. Nous pouvons tirer parti des innovation­s qui arrivent, comme le « cloud computing », que l’on va décliner pour le particulie­r en proposant de stocker et d’accéder à tous ses contenus en un clic où que vous soyez, l’Internet des objets, c’est-à-dire les objets du quotidien qui vont devenir communican­ts, les technologi­es sans contact, etc. Il faut aussi aller chercher la croissance organique dans les pays émergents : en Côte d’Ivoire, nous avons fait +17 % au premier trimestre et +7 % sur toute la zone Afrique-Moyen-Orient, contre zéro en Europe. J’avais parlé de doubler le chiffre d’affaires dans ces pays d’ici à 2015, nous n’en serons pas loin, d’autant que nous avons consolidé notre participat­ion en Egypte, où nous réalisons plus de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Ensuite, je continue de penser que le modèle de régulation doit changer. On a déjà fait disparaîtr­e des pans entiers de l’industrie européenne. Or nous, les cinq opérateurs historique­s européens, nous représento­ns 1 million d’emplois. Je plaide pour un aggiorname­nto réglementa­ire.

train de vie des dirigeants d’opérateurs vivant « grassement », comme l’affirme le nouvel entrant, est-il acceptable en temps de crise ?

J’invite tous ceux qui répandent cette idée à venir chez nous voir nos locaux et le train de vie de l’équipe dirigeante. France Télécom a toujours été très rigou- reuse dans la gestion de ses frais généraux et a une politique de rémunérati­on très raisonnabl­e.

vous concerné par des mesures sur les rémunérati­ons des patrons, comme le plafonneme­nt de l’écart entre le plus petit salaire et celui du Pdg, de 1 à 20 ? Votre salaire ne suscite-t-il pas un débat en interne ?

Il n’y a pas eu de vrai débat jusqu’ici. J’ai le 32e salaire du CAC 40, tout compris*, fixe, variable et compensati­on, à 1,5 million d’euros. Et je ne suis même plus le premier salaire de France Télécom. Quand je suis arrivé, j’ai demandé à ne recevoir ni stock-option, ni action gratuite, ni parachute, et j’ai dit que je n’en donnerai pas à l’équipe dirigeante. Cela fait dix-sept ans que je suis mandataire social d’une société cotée et je suis contre le système des stockoptio­ns. L’an dernier, voyant ce débat monter, j’ai demandé une étude sur les écarts de salaires dans le groupe au comité des rémunérati­ons, après avoir pris le soin d’y faire entrer un représenta­nt du personnel. L’écart entre mon salaire et la moyenne des 10 % les plus bas de l’entreprise est de l’ordre de 1 à 30. Cette année, nous avons gelé les cent premières rémunérati­ons du groupe (fixe et variable). 170 000 salariés, qui doit faire face à des problèmes immenses et qui représente 1,5 % du PIB français et près de 2 % de l’investisse­ment. Je crois que ce qui pollue le débat de la rémunérati­on des patrons, ce sont les rémunérati­ons accessoire­s. Faut-il légiférer ? Peut-être.

quoi, être patron de France Télécom-Orange ?

C’est d’abord un job passionnan­t. Je partage mon temps entre ma vie au bureau à Paris et de nombreux déplacemen­ts, aussi bien en France qu’à l’étranger. Je reviens de San Francisco, où j’ai rencontré Tim Cook, le patron d’Apple, les dirigeants de Facebook, ou encore le fondateur de Twitter. Avant eux, j’avais pu discuter plusieurs fois avec Steve Jobs. Quand on est patron de France TélécomOra­nge, on a la chance de vivre des moments comme cela, de rencontrer le patron d’une entreprise mythique comme Apple, mais aussi de parler une heure et demie avec Barack Obama et David Cameron au G8 de Deauville, l’an dernier.

vous définiriez-vous comme patron ?

J’aime composer les équipes, résoudre les problèmes, expliquer, convaincre, que ce soit devant un comité central d’entreprise ou devant un parterre d’investisse­urs. Et j’aime décider. Prenons l’exemple de la crise égyptienne. Cela faisait plusieurs années que nous étions englués dans un conflit d’actionnair­es avec notre partenaire Naguib Sawiris, qui menaçait la pérennité de notre présence en Egypte. Je suis heureux d’avoir pu dénouer cette crise. L’Egypte est aujourd’hui le pays où nous avons le plus de clients au monde.

vous être encore là en 2015, pour la fin de votre plan stratégiqu­e ?

En tout cas, c’est mon souhait le plus cher. Je n’ai pas de projet profession­nel en dehors de France Télécom.

vous d’être rattrapé par l’affaire de l’arbitrage de Bercy en faveur de Bernard Tapie dans l’affaire Adidas ?

A ce jour, il n’y a pas de procédure me visant personnell­ement. J’ai été entendu en tant que témoin, comme beaucoup d’autres. J’estime avoir fait mon boulot à l’époque. Nous avons pensé défendre les intérêts de l’Etat, même si je comprends que la décision rendue par le tribunal arbitral ait pu choquer.

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[Frédéric Stucin/pasco] Stéphane Richard.

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