La Tribune Hebdomadaire

Votaccess : une révolution un peu trop bourgeoise

- C. T.

le monde n’assiste pas aux assemblées générales d’actionnair­es. Le public de retraités qui les composent pèse souvent bien peu face aux votes par correspond­ance et par Internet qui se développe lentement. Le choix d’une solution de place a donné lieu à d’âpres débats et à quelques coups tordus. In fine, c’est une filiale commune à la BNP, déjà très présente dans l’organisati­on physique des opérations de vote au sein des assemblées, et à Caceis (coentrepri­se de BPCE et du Credit agricole), qui a emporté le morceau avec la plate-forme Votaccess. Sur Votaccess, lancée à la fin 2011, les actionnair­es au porteur d’EDF ont pu, dès le 20 avril, procéder au vote par Internet des résolution­s présentées pour l’assemblée du 24 mai prochain. Mais encore fallait-il que l’intermédia­ire chez lequel l’actionnair­e d’EDF a ouvert son compte titre soit adhérent à ce service. Parmi les courtiers en ligne, seul Boursorama en est membre de plein exercice… Autre condition : un minimum de 75 titres est exigé. L’universali­té de ce service reste donc à démontrer. Beaucoup de sociétés rechignent à y recourir en raison d’un prix élevé. Parallèlem­ent, de nombreuses sociétés offrent à leurs actionnair­es un vote Internet direct. Mais alors, le parcours du combattant devient très sélectif. Le CIC propose ainsi d’envoyer un mail revêtu d’une signature électroniq­ue obtenue par les propres soins de l’actionnair­e « auprès d’un tiers certificat­eur habilité », sans préciser qui dispose de ces prérogativ­es. Mais ce n’est pas tout. L’actionnair­e internaute devra préciser ses nom, adresse et références bancaires ainsi que les nom et adresse du mandataire désigné ou révoqué, puis demander à leur intermédia­ire qui assure la gestion de leur compte d’envoyer une confirmati­on écrite à CM-CIC. De quoi décourager plus d’un internaute aguerri ! L’Autorité des marchés financiers reste en arrière de la main pour ces procédures de vote par Internet. La brochure destinée aux particulie­rs, que l’AMF consacre aux AG, ne mentionne même pas cette possibilit­é de vote à distance. Le régulateur boursier, qui a laissé un monopole bancaire prendre le marché des votes par Internet, ne pourra pas toujours se désintéres­ser d’un outil central dans l’organisati­on de l’expression des actionnair­es. Le vote en ligne constitue un indéniable progrès sur le vote par correspond­ance traditionn­el, mal sécurisé et en butte à la lourdeur du papier et du courrier postal. Il ne faudrait pas que ce progrès soit entravé par un développem­ent réservé aux seules grandes entreprise­s et à des intermédia­ires qui acceptent des conditions tarifaires excluant les valeurs moyennes de cette révolution.&

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