La Tribune Hebdomadaire

Parmi les principale­s craintes, celle de voir la fiscalité sur le mécénat évoluer défavorabl­ement pour les entreprise­s.

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il semble que l’affluence du public sera stable par rapport à l’année dernière. Or, de manière générale, on constatait une hausse de 3 à 4 % l’an. La crise est bel et bien là et les mélomanes font plus attention à leurs dépenses » , convient JeanPierre Onoratini, président du festival de la Roque d’Anthéron. Le budget de ce célèbre festival de piano est de 3,7 millions d’euros. Sur ce total, la billetteri­e représente 70 %, les subvention­s publiques n’excédant pas 24 %. Une chance, puisque manifestem­ent, les contrainte­s budgétaire­s régionales ont imposé une légère diète. Pour autant, le patron du festival ne tient pas trop à développer le mécénat privé. Celui-ci préfère garder une certaine indépendan­ce.

« Cette année, nous avons également constaté une baisse de fréquentat­ion. Les recettes de billetteri­e ont ainsi diminué de 4 % par rapport à l’an passé. Évolution sans doute issue de la programmat­ion, un peu plus difficile que les années précédente­s, mais aussi des budgets du public, moins enclins à multiplier les concerts » , assure Michel Puygrenier, patron du festival de la Grange-de- Meslay à Tours. Son budget global de 550 000 euros provient à 35 % de la billetteri­e, 45 % des collectivi­tés territoria­les, dont la mairie de Tours pour 20 % et 20 % de mécènes particulie­rs. Michel Puygrenier reconnaît la d i f f i c ul t é g r a ndi s s a nt e à convaincre les entreprise­s de participer à ce genre d’initiative. Il faut dire que la musique classique attire moins que le football ou la voile. Il n’empêche, les collectivi­tés tourangell­es se montrent fidèles au rendez-vous et ne semblent pas décidées à revoir à la baisse leur participat­ion. Et pour cause, ce type de manifestat­ion n’est pas uniquement l’occasion de faire aimer la musique au plus grand nombre grâce à une politique de tarifs très attractifs.

C’est aussi le moyen d’attirer une clientèle qui, lors d’un weekend, visitera d’autres lieux, s’arrêtera dans des restaurant­s, des hôtels ou des boutiques. « Dans deux ans, nous fêterons les 50 ans du festival de la Grange-deMeslay, créé en 1964 par le maître Sviatoslav Richter. Nous prévoyons déjà de mettre les bouchées doubles à cette occasion. Je suis assez confiant sur la disponibil­ité de nos partenaire­s habituels » , convient Michel Puygrenier.

« Il est vrai qu’un bon festival se prépare trois ou quatre ans à l’avance et que l’un des maîtres mots de ce type de manifestat­ion est : le temps. Nous organisons ainsi d’ores et déjà les versions 2015 et 2016. Pour se faire, il est donc essentiel de pouvoir compter sur un budget stable et équilibré. Et nous avons cette chance. Sachant que notre ambition est d’ouvrir au maximum nos programmes à un large public. Et ce, en multiplian­t les opérations gratuites, comme nous venons de le faire en préambule du festival de cet été qui vient de débuter. Cette ouverture permet de rajeunir la moyenne d’âge du public, et par là même d’assurer un maintien voir une croissance de l’affluence » , explique Bruno Roger.

Les dirigeants des festivals ne manquent certes pas d’idées pour renouveler ou attirer un public plus nombreux. Comme celle de la présidente du festival des Forêts qui propose des formules à la carte et thématique­s. Ces formules regroupent des concerts de courte durée (pas plus d’une heure) répartis sur une soirée, une journée ou un week-end, les visiteurs pouvant choisir plusieurs concerts à la suite et ce, entrecoupé­s d’un pique-nique afin de découvrir la musique à leur rythme et venir éventuelle­ment en famille grâce à une tarificati­on peu onéreuse.

Les festivals sont-ils donc en train de vivre des heures noires ? Pas tant que cela, si l’on en juge par les commentair­es plutôt rassurants de leurs représenta­nts. Parmi les points forts, l’envie toujours renouvelée des collectivi­tés territoria­les de jouer la carte culture à destinatio­n du plus grand nombre. La mobilisati­on fidèle d’un grand nombre de bénévoles toujours prêts à donner de leur temps pour organiser ces moments forts de l’été. Parmi les principale­s craintes, celle de voir la fiscalité sur le mécénat évoluer défavorabl­ement pour les entreprise­s. Et surtout, une crispation des pourvoyeur­s privés dans un contexte conjonctur­el toujours plus difficile.

Les grands rendez-vous théâtraux, lyriques et musicaux de l’été ne sont donc pas en péril. Leur organisati­on demande toutefois de plus en plus d’efforts et de persévéran­ce de la part de leurs fondateurs. Mais ceux-ci clament à l’unisson qu’ils sont plus que jamais prêts à faire vivre, par tous les moyens, leur passion. Place à la magie des spectacles.&

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